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De deo

 La mélancolie antique me semble plus profonde que celle des modernes, qui sous-entendent tous plus ou moins l’immortalité au delà du trou noir. Mais, pour les anciens, ce trou noir était l’infini méme ; leurs rêves se dessinent et passent sur un Fond d'ébène immuable. Pas de cris, pas de convulsions, rien que la fixité d'un visage pensif. Les dieux n’étant plus et le Christ n’étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc-Aurèle, un moment unique ou l'homme seul a été.
Flaubert Correspondance, en exergue des Mémoires d'Hadrien de M Yourcenar

De deo ! S'agit-il de le connaître ? de lui obéir ? de le servir ? De l'aimer ou de le craindre ? Selon la réponse, on classera cette entrée plutôt dans solidarité, réciprocité ou bien encore dans pesanteur et grâce ! Ce ne sont donc pas nécessairement les bonnes questions à se poser. S'agit-il, selon la réponse faite aux pharisiens par le Christ d'y engager cœur, âme et pensée ( Mt 22,37) voire même sa force comme le souligne Marc 12,30, reprenant les termes de Deut, 6,5, ? mais alors c'est notre être tout entier qui est encouragé solidairement et l'on comprend mieux ainsi le Je ferai de toi un peuple de prêtres et une nation sainte d'Ex 19,6 Cet engagement total, en chaque instant et en tout endroit - qui est la marque de l'Alliance - dit assez bien la solidarité qui se joue ainsi qui ne saurait être un état encore moins une récompense pour service rendue ; certainement pas une supériorité ; une tension perpétuelle.

De deo ! ne le nommer jamais mais y penser toujours.

Il se trouvera toujours laïcard engoncé de certitudes, anthropologue, historien, scientifique assoiffés de démonstrations mais si rarement désaltérés pour rétorquer que voici superstition résultant de réflexe primaire - pour ne pas dire primitif - ou de l'emprise idéologique d'organisations habiles promptes toujours à asservir pour écôt de leur survie quand ce ne serait pas d'institutions politiques qui auraient toujours besoin de goupillon - n'importe lequel d'ailleurs - pour mieux asseoir la suprématie du sabre.

Est-ce bien la question, au reste ? M'épuisent ces arguties d'arrière-boutique n'ayant d'autre fin que de disqualifier l'interlocuteur. Je n'aimerais retenir ni ne veux plus envisager que ce qui vous augmente et abandonner ici, ce qui vous réduit.

C'est, de surcroît, manquer au moins deux fois sa cible.

La question, théologique, de l'existence de Dieu ne se pose pas ; plus, au moins depuis Kant, qui illustrant l'impossibilité de la preuve, laissa sa place à la foi ! L'athéé n'est plus nécessairement un traître ou un mécréant ; le croyant plus irrémédiablement un imbécile ou un candide ! Tant mieux ! En mettant en évidence les limites de la raison, en soulignant que le divin précisément en débordait de toute part, Kant a rendu à la philosophie - et à la métaphysique - ce signalé service de leur éviter désormais d'écrire des sottises. Le domaine de la foi n'est pas celui de la raison : la question semble à ce point définitivement acquise que plus personne, depuis Descartes, ne s'y hasarde plus.

La question morale est tout autre ! A qui me déclare sentir comme une présence en levant les yeux au ciel, qui serais-je pour rétorquer qu'il se trompe ? Qui serais-je en même temps pour ne pas me demander ce qu'il en fait ? si, et en quoi, cette présence change sa vie.

C'était il y a un peu plus d'un siècle, en cette ville du fond de la vallée de la Bruche, en cette Alsace alors allemande, où l'on décida de construire une synagogue devenue nécessaire, la population israélite - come on disait alors - devenant alors assez importante pour mériter lieu à sa mesure et un officiant qui lui fût propre. Est-ce alors que les choses commencèrent ? Evidemment non ! Ces juifs venaient d'ailleurs, du piémont des Vosges et sans doute d'ailleurs encore si l'on s'accorde à remonter plus avant dans les temps. A l'instar de ma famille qui participa un peu à cette histoire.

Est-il jamais un début radical ?

Les choses ne durèrent pourtant pas très longtemps … Des quelques soixante-dix qui assistaient aux cérémonies et fêtes en 1940, combien revinrent ? Si peu que bientôt, après la disparition de l'officiant en 1961, n'en demeura plus qu'un seul. Se peut-on imaginer être ainsi le dernier ? Celui-ci, plus de dix ans s'attacha, chaque shabbat, à ouvrir les portes de la synagogue et à attendre jusqu'au soir tombé, de les refermer. Il savait que personne ne viendrait ; que personne ne viendrait plus … mais jamais il ne dérogea à l'obligation qu'il s'était faite qui était en réalité un honneur. A quoi pensait-il, ces journées durant ? A remercier de pouvoir, jusqu'au bout de toute patience, servir encore et toujours ; à espérer quand même, que peut-être, que sûrement rien ne s'achèverait définitivement avec lui.

Est-il, se peut-il être fin radicale ?

Voici bien la seconde raison pour laquelle il faut écarter les objections malencontreuses ! Qui omettent ce que pourtant nous savons tous et fut pourtant démontré par Gödel : ne saurait exister jamais pensée organisée qui ne comportât au moins une proposition non démontrée mais qui seule rend possible toute la chaîne des raisonnements qui en aval s'enclenche. Ceci même qu'on nomme un principe, un axiome qu'importe. mais qui, parce qu'au début, commande ! Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος. Qu'ils nomment cet ἀρχῇ comme ils l'entendent et n'y voient qu'une idée, une abstraction plutôt qu'un être ne leur épargnera ni l'obligation d'un début, ni l'impossibilité de le démontrer. A tout prendre la confiance qu'ils accordent à la raison, n'est que le nom savant de la foi

Sans compter la faute de raisonnement ici commise, qui donne quitus presque par avance, à cette philosophie du soupçon qu'avait initiée Nietzsche, en se préoccupant moins de ce qui est dit que de qui le dit ; moins du message que du Messager.

C'est donc bien de morale dont il s'agit ! De quelque obédience dont on se réclamerait, comment ne pas admettre que tous nos comportements sont régis par un code qui ne vient pas de nulle part mais bien de ce vieux fonds juif puis chrétien, du Décalogue pour être précis ; que même ceux qui se targeraient, par vanité ou illusion, d'être a-moraux ne le pourraient en définitive qu'au nom de valeurs qui ne seraient sans doute pas bien différentes. Que cette assise de nos valeurs, que ces valeurs de nos valeurs se nomment Dieu, principes ou cammandements je ne vois pas de différence.

Mais ici, seulement, dans la manière dont lâchement parfois, paresseusement souvent, l'on cherche à se dérober. Nul en réalité ne se peut, sans vanité, je veux dire sans vacuité, proclamer à l'instant ni au lieu d'un commencement radical. Il y a toujours un avant, cet avant ! et sans doute, après tout le reste, un murmure après la fin présumée …D'où cette affection nourrie pour ce Monsieur Lehman qui ne cessa de lever les yeux, d'attendre et de demeurer confiant ! Même seul.

Parce que, ce faisant, il ne l'était pas. Ni nous avec lui.

Flaubert voit juste même s'il mêle à cette solitude une jouissance qui n'a sans doute pas sa place ailleurs qu'en son ironie de romancier. Car cette solitude est bien plus encore que celle des périodes de transition ou, faute de rupture, l'ancien râle et tressaille encore tandis que le nouveau peine à émerger. Sans doute d'entre Jérusalem qui scrutait les signes dans le ciel et Athènes qui rêvait de les produire en ses raisonnements ; d'entre Jérusalem qui parle, parle au point de se croire sage et Jérusalem qui écrit et murmure, peut-il sembler y avoir eu intimes contradictions car celle-ci eut des textes sacrés au-delà de quoi il fut interdit autant qu'impossible d'aller tandis que celle-là, inventa, librement, créa et tenta de s'arracher, même provisoirement, même subrepticement, au chaos ambiant. Il faudra l'obstination pieuse de Rome pour en savoir faire la synthèse, certes ; pourtant, dès l'origine, par leur identique espérance qu'au-delà des apparences, il y eût un sens qui fût accessible, déchiffrable, ils se ressemblaient en leur opposition même.

Peut-être l'homme n'a-t-il jamais été seul en réalité mais a-t-il seulement feint de le croire.

Pour qu'il le fût, il fallut que le divin lui-même détournât le regard. Et nous abandonnât ! en se désintéressant de nos destinées funestes.

Je crains bien, décidément, ne pas me tromper, en y voyant affaire de solidarité.

 

Regard impossible, regards détournés … figure de l'abandon

 

 


Préambule

Doutes et ambitions

Solidarité

Réciprocité

Pesanteur et grâce

De la connaissance

Aimer et surtout ne jamais haïr

Rester élégant et jamais vulgaire

 

savoir écouter

savoir parler

Qu'est-ce cela : aimer ?

Trois histoires pour commencer

Révélation

histoires d'insoumises

histoires d'abandons

 

élégance   :

l'éloge de la gratuité  

élégance de l'image

images de l'élégance

élégance de la légèreté

pesanteur de la vulgarité

légèreté de l'élégance

de deo : in solido

l'impensable silence

 

bienveillance

humanisme: une affaire d'élégance

du pardon

doute
donner recevoir
ironie
justesse

diableries

diableries suite

qu'est-ce ceci : haïr ?

grâce    
cloisons à éviter
 
goûter le silence

Etre au service tout en restant libre

Nourrir l'amitié jamais l'indifférence

Etre prudent sans rien perdre de sa force d'âme

gratitude

différence  

chercher

liberté : obéir ou servir

écoute  

philosopher : un geste moral

loi

empathie  

prudence plutôt que scepticisme

 

sexualité

sagesse

 

 
entre silence et parole
    devenir

Rester humble et jamais arrogant

Etre généreux et surtout jamais âpre

Rester juste et fuir la démesure

finitude

franchise et sincérité

entre intensité et prudence

moi

foi ou crédulité

mensonge
être source ?
partage
fissure
témoigner
refuser la déchéance
vicariat