Un nouveau site d'information
Version française du site américain, celui-ci est dirigé par A Sinclair et a pour ambition - il faut dire que le contexte électoral français lui offre une rampe de lancement plutôt favorable - à la fois d'être un site d'informations en continu et un lieu de débat.
Le grand écart, finalement, qu'autorise évidemment la forme Web. La présence d'emblée de grande signatures qui y mettent leurs blogs s'en veut le témoin. Le site qui avale Le Post, site participatif que contrôlait le Monde, s'affirme lui aussi en association avec le Monde.
Sous des formes variées et parfois brouillonnes, s'invente devant nous une nouvelle presse. Après la création des multiples chaînes TV d'information en continu, dont beaucoup gratuites sur la TNT, qui ont pris le relais de la réussite déjà ancienne de France Info à la radio, après la création sur le web de site participatifs et alternatifs du type Médiapart, Rue 89, qui sont des enfants naturels en tout cas dissidents de la presse papier, en voici les enfants légitimes. (Sans compter un Arrêt sur images qui demeure ironiquement la continuation d'une émission disparue des chaînes de TV)
Le Monde avait en son temps réussi le lancement de son site en comprenant qu'il n'avait pas de sens s'il n'était que la duplication de son édition papier, en offrant des contenus complémentaires, dynamiques, tellement réussi qu'il reste encore un secteur d'activité rentable pour le groupe, après que, progressivement, le site du quotidien, ainsi que celui de Libération, furent passé au payant, et eurent proposé via des applications adéquates, un accès sur smartphone et tablette, voici qu'apparaissent des sites, gratuits pour le moment, où se veulent conjuguer à la fois information, débat et participation des lecteurs.
Le destin ambivalent de la presse
C'est tout le sort réservé à la presse qui se peut lire ici, dans ses contradictions, ses impasses mais aussi ses perspectives.
- la presse écrite va mal, qui ne se vent plus - ou si mal - tant et si bien que, toute stratégie d'alliance, de fusion, de concentration essayée, elle se retrouve devant le dilemme de son impossible disparition (voir exemple de France Soir ou même de la Tribune) et d'un introuvable modèle économique
- la presse se lit bien, et de plus en plus sur le Net, ce qui révèle non pas tant un désamour à l'égard de l'information, du politique ou de la presse en général, que l'apparition d'une nouvelle manière d'accéder à la presse.
Quand on présenta il y a quelques années les dernières innovations informatique sous le doux vocable de Multimédia nous avons tous perçu surtout l'accès plus aisé sur nos ordinateurs à l'image puis à la vidéo. Ce qui s'est en réalité passé c'est la convergence - de plus en plus rapide - entre les différents supports.
Il n'y a plus aujourd'hui de grande émission politique à la radio qui ne soit le fruit d'une collaboration avec la presse écrite - mais ceci est déjà ancien ) mais surtout qui ne soit en même temps diffusée sur Dailymotion ou Youtube, en sorte qu'il est désormais difficile de déceler s'il s'agit d'une émission radio ou TV.
De la même manière, l'effet Web 2.0 comme on ne l'appelle plus, c'est-à-dire la possibilité pour chacun de dialoguer, de poster des contenus, de bloguer, bref de participer, outre qu'elle produit un invraisemblable bruit de fond où il est parfois difficile de s'entendre et d'y reconnaître les siens, aura ôté aux médias institutionnels le monopole du contenu.
A-t-on assez remarqué, par exemple, que les images du meeting de Hollande ne sont pas celles des chaînes parlementaires mais celles du PS et de l'équipe de campagne de Hollande ? Il suffit de baguenauder sur les sites officiels des candidats, sur leurs blogs, mais aussi évidemment sur ceux des différents partis politiques, pour observer que, relayées d'ailleurs sur les sites sociaux, d'innombrables vidéos sont disponibles et notamment celles des meetings, des émissions TV auxquelles les uns et les autres participes, voire même dans le cas imaginatif de Mélenchon, des web-séries.
De la même manière les sites de la presse écrite inventent, l'air de rien, des objets nouveaux : les web-docus par exemple
Il est évidemment difficile de deviner comment la presse se sortira de ce mauvais pas, même s'il est vrai que certaines de ses difficultés - notamment sa sous-capitalisation chronique - sont bien anciennes. D'un côté la question du nerf de la guerre demeure cruciale et même si assez joliment on évoque aujourd'hui la nécessité d'un modèle économique à trouver, il n'en reste pas moins que la presse devra bien trouver les moyens sinon d'être très rentable au moins de ne pas être lourdement et endémiquement déficitaire ! D'où d'ailleurs ces négociations si difficiles avec Apple par exemple pour l'accès des contenus via l'AppleStore. D'un autre côté, on imagine mal en démocratie une presse moribonde.
A observer de près !