Friedrich NIETZSCHE
(1844-1900)
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Né en 1844 à Roecken, dans le royaume de Saxe, près de Leipzig, Friedrich Nietzsche est un fils de pasteur. Il fait de brillantes études de philologie avant d'être nommé, à vingt-quatre ans, professeur de philologie classique à Bâle. Mais sa véritable passion est la philosophie et, en 1871, il écrit son premier ouvrage majeur : L'Origine de la tragédie, qui est très mal accueilli par les philologues qui refusent d'y voir un ouvrage de philologie. C'est aussi l'époque de sa grande amitié avec Richard Wagner à qui il dédie ce livre. En 1876, malade, il prend congé de l'université et se met à voyager. Ainsi va-t-il en Suisse, en Italie, et dans le midi de la France. Il publie, en 1880, Le Voyageur et son ombre. Il rompt avec Wagner parce qu'il estime que ses travaux s'opposent désormais fondamentalement à l'œuvre du musicien. La période qui va de 1880 à 1889 est une période d'intense création philosophique qui précède l'effondrement final : Le Gai Savoir (1881-1882) ; Ainsi parlait Zarathoustra (1882-1885) ; Par-delà le Bien et le Mal (1886) ; La Généalogie de la morale (1887).
A Turin, en
janvier 1889, il subit une violente crise et est interné. Selon le
diagnostic officiel, il est atteint de « paralysie progressive ». Sa mère le
prend chez elle, et sa sœur, Elisabeth, soigne Nietzsche jusqu'à sa mort, à
Weimar, en 1900. Elle publiera de façon posthume en 1901 l'ouvrage inachevé
intitulé La Volonté de puissance. Le national-socialisme utilisera, durant
les années 1930, la pensée de Nietzsche sans que sa sœur, alors très âgée,
s'y oppose.
Nietzsche a tout d'abord subi l'influence de la culture et de la réflexion
helléniques. Il salue l'audace des présocratiques (Thalès, Parménide,
Héraclite) en les opposant à Socrate, ce « plébéien inculte », ainsi qu'à
Platon. Mais la philosophie de Schopenhauer le frappe également. Le Monde
comme volonté et comme représentation le bouleversera. Nietzsche rejettera
par la suite le pessimisme ainsi que l'idéal ascétique de Schopenhauer. De
même, Nietzsche a longtemps admiré Richard Wagner avant de lui reprocher
l'atmosphère de kermesse de Bayreuth, ainsi que son adhésion à l'Allemagne
de l'Empire, que Nietzsche tient pour corruptrice de la civilisation.
Nietzsche a traqué, sous toutes ses formes, l'illusion des arrières-mondes :
ce qui compte, c'est notre monde, en tant qu'il est joie, création et
plénitude vitale, volonté de puissance. La volonté de puissance, envisagée
comme énergie conquérante et dominatrice, volonté d'un surplus de force
active et dynamique, faculté créatrice et plénitude de l'âme, consiste, sous
sa forme la plus haute, à créer. Le « surhomme » condense alors l'homme
libre d'esprit et de cœur, le créateur, le point le plus haut de l'humanité.
L'esclave, quant à lui, reste le faible, celui qui ne peut créer
authentiquement et vit dans le ressentiment, c'est-à-dire dans ce sentiment
de rancune et d'amertume que ressentent les faibles devant les créateurs et
les maîtres. Le ressentiment est posé par Nietzsche comme étant l'origine
des valeurs morales qu'il s'agit de renverser.
La volonté de puissance se place au centre de la philosophie de Nietzsche.
Elle forme le « moteur » de l'Univers. Elle se définit comme une « force » à
la fois créatrice et destructrice, qui meut sans but un univers fermé et
éternel, dans lequel tout se modifie sans cesse sous l'effet des cycles que
cette force effectue. Ainsi, tout état de cet univers revient périodiquement
(l'Éternel Retour). Cette force provoque une irrésistible augmentation de
puissance, conduisant tout être à s'enrichir par des créations et des
acquisitions nouvelles qui détruisent en même temps d'autres êtres. La vie
est un des aspects de cette volonté de puissance : elle se manifeste chez
l'homme aussi bien par des créations de valeurs que par la domination du
fort sur le faible.
Cette conception de l'Univers rentre en totale opposition avec les théories
distinguant un monde vrai et un monde apparent, avec les morales classiques,
ainsi qu'avec l'idée d'un devenir soumis au progrès. La vision nietzschéenne
conduit à une virulente critique de toutes les idées établies et débouche
sur un nihilisme total porteur de valeurs nouvelles.