Elysées 2012

C'est parti .... à droite

Visiblement agacés par les résultats des primaires, et, en particulier par la participation élevée observée au 1e tour, l'UMP et le camp majoritaire dégainent - ce qui est après tout de bonne guerre.

En ordre dispersé pourtant :

Les primaires sont-elles conformes à la constitution, en tout cas à l'esprit de la Ve telle que la concevait de Gaulle ? Non semble dire Sarkozy quand en même temps d'autres membres de la majorité y voient une perspective intéressante (Accoyer notamment mais aussi X Bertrand, Juppé) alors qu'il y a peu Fillon mais aussi Copé rappelaient paradoxalement que le principe des primaires était inscrit dans les statuts de l'UMP. Une position pas très claire, effectivement, qui laisse suggérer une petite diatribe d'arrière-campagne, à usage unique et très ponctuel, visant en réalité à disqualifier l'impact plutôt positif des primaires dans les médias. rien de plus.

Dans l'outrance parfois :

Copé qui n'en est pas à une hyperbole près, lui qui occupe, volontairement rappelons-le quand même, le rôle de chef de parti, assume son rôle de polémiqueur en chef, rendant coup sur coup. On l'a dit, la période tout entière monopolisée par les socialistes, aura laissé peu de place au camp majoritaire. Un mauvais moment à passer alors qu'il faut néanmoins occuper l'espace médiatique. On l'occupe donc vaille que vaille, avec des arguments pré-machés - les fameux éléments de langage - qui n'ont pas nécessairement besoin de transpirer la bonne foi, ni d'être toujours pertinents ; qui relèvent de la tactique ponctuelle et ne s'appuient pas non plus sur le centre de gravité de la parole majoritaire. Après la référence ce printemps au fichage politique, voici, toute fraîchement née de ses cendres, l'antique polémique sur l'esprit de la constitution dont le camp majoritaire aurait le monopole, la gauche l'ayant en 58 comme en 62 refusée - Mitterrand en tête. Comme il n'est pas tout à fait possible de se lancer, sans contradiction, dans une attaque frontale dans la mesure où l'UMP prévoit elle-aussi des primaires dans ses statuts, il ne restait plus qu'à botter en touche, soit sur la procédure, soit sur les candidats eux-mêmes.

- D'où la référence (1), concernant Montebourg à 1917 : comparer les propositions de Montebourg à celles d'une horde de bolchevicks prêts à tout pour installer la dictature du prolétariat, agiter le drapeau rouge de l'expropriation ( avec l'implicite du on commence par exproprier les banques mais après ? ...) reste joliment outrancier et ne me semble pouvoir fonctionner que pour autant que les antiennes anticommunistes fonctionnent encore, ce qui, après l'effondrement du bloc de l'Est d'une part, celui électoral du PCF d'autre part, me paraît tout sauf évident, d'autant, enfin, que les jeunes générations manquant cruellement de culture historique et politique, n'ont de cette période qu'un vague aperçu scolaire.

- D'où la référence à Marine Le Pen ensuite, dans le programme anti-euro, anti-libéral, hyperdirigiste de qui il voit une proximité idéologique troublante avec Montebourg. Dans un contexte totalement désidéologisé où prévaut un discours plutôt techniciste que politique, agiter en même temps le chiffon brun et le chiffon rouge a quelque chose de logiquement baroque, d'historiquement absurde, mais néanmoins de possible. Ce qui est, après tout, rendre la monnaie de sa pièce à une gauche qui n'a jamais hésité à brandir la menace d'une alliance prévisible entre la droite et l'extrême-droite... Que l'argument porte est une autre histoire !

- D'où encore le déplacement creusois de Sarkozy où la démondialisation est présentée comme une absurdité économique et comme la régression politique d'une nation cherchant à s'isoler de la marche inéluctable de l'histoire.

A gauche ce n'est pas tellement mieux

Un deuxième tour à achever où il faut bien se démarquer et, qu'on le veuille ou non, tenir compte d'un vote Montebourg élevé qui traduit la radicalisation que nous avions déjà relevée, mais oblige chacun des deux finalistes à se positionner : or, même si les enquêtes tendent à souligner qu'Aubry aurait une image plus marquée à gauche qu'Hollande, il n'empêche que leurs profils politiques, leurs parcours dans les mêmes majorités, les contraignent à surjouer des différences qui sont plus apparentes que réelles et, en dépit de leur inimitié relevée un peu partout dans la presse, à s'envoyer quelques coups bas ... mais sans plus : il ne faut décidément pas insulter l'avenir !

Comment rassembler sans faire peur ? se situer résolument à gauche, se démarquer du social-libéralisme de l'aile droite du PS sans cesser pour autant d'apparaître rigoureux, sérieux et réaliste ? comment en même temps répondre à l'attente des 17 % sans renier sa propre trajectoire ? telles sont finalement les questions que chacun des deux protagonites a à résoudre. Les deux semblent ne s'en être pas trop mal tirés lors du débat d'entre deux tours non sans qu'Hollande eût fait montre de raideur froissée... la question reste entière !

Mais après tout, nous sommes ici dans un jeu de questions et de stratégies qui sont celles, classiques de tout candidat de second tour, même d'une présidentielle où il faut bien se démarquer au premier tour, mais réunir au second ; où, d'évidence, on ne peut gagner qu'en gagnant des voix au-dehors de son propre camp en s'assurant de ne pas perdre les siennes propres ; où tout l'enjeu consiste à convaincre que l'on a entendu tout le monde, sans néanmoins se compromettre, trop promettre, se trahir pour prix de ce dragage-ci.

Mais après tout, à ce petit jeu, qui est sérieux comme tout jeu, où priment la stratégie au moins autant que la posture, où se joue l'échec ou le mat, comment s'étonner que rôdent les vautours, prompts à dépecer, le cadavre ou à parasiter le prédateur.

Ici, Mélenchon qui se fend d'une sublime réponse à Montebourg aux airs de Embrassons-nous Folleville, scrutant dans ses 17% une fabuleuse opportunité ; ici, la curée !

, les écologistes bien décidés à négocier leur alliance future, à marquer le discours du vainqueur et imposer ses exigences, notamment sur la sortie du nucléaire et la proportionnelle ; condamnant le PS à entendre tout en biaisant, à jouer la stratégie de l'édredon ; là, le parasitage.

 


Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, a déclaré que son parti allait "suivre de très près les marchandages et braderies" auxquelles se livreraient François Hollande et Martine Aubry, finalistes de la primaire socialiste, pour courtiser Arnaud Montebourg. "Le score d'Arnaud Montebourg (près de 17 % ) a fait mentir les sondages, c'est lui le faiseur de roi et le problème des faiseurs de roi. Il va devenir l'homme le plus important de la Terre pour Mme Aubry et M. Hollande", a poursuivi le parlementaire.

La patron de l'UMP n'a pas hésité à lancer un axe de communication anti-PS et à faire un parallèle entre le numéro 3 de la primaire socialiste et la présidente du Front national : "L'idéologie d'Arnaud Montebourg, la démondialisation, décréter que la France sera une île, fermer les frontières, je ne connais qu'une seule personne qui est proche de ces idées, c'est Marine Le Pen. Il y a une proximité idéologique troublante" a-t-il lancé.

"ENFIN UN ADVERSAIRE"

Jean-François Copé a ironisé sur le rôle d'arbitre de la primaire dévolu à Arnaud Montebourg, "celui qui parle de ce concept fou de démondialiser la France, celui qui fait rigoler le monde entier". Selon le patron de l'UMP, une alliance avec la gauche modérée de François Hollande serait le "mariage de la carpe et du lapin" alors que celle avec Martine Aubry serait celle de "la gauche avec la gauche de la gauche."

Dans le déroulement de la primaire socialiste, le député et maire de Meaux a toutefois vu "une première bonne nouvelle", la désignation prochaine du candidat socialiste. "Nous allons avoir enfin un adversaire et combattre à armes égales."

Eric Nunès


1) Copé sur Canal a déclaré à propos de Montebourg qu'il était

"celui qui dit on va exproprier les banques", c'est-à-dire "en gros" mettre en place "une tutelle des banques sans que ça coûte aux contribuables. C'est ce qu'ont fait les bolcheviks en 1917. Je ne sais pas si vous voyez l'état psychologique d'une partie de la gauche française !" (...) "Quand il dit : on va démondialiser", cela veut dire "notre petite France va vivre toute seule, on ferme les frontières", a ironisé M. Copé. Et c'est "lui le faiseur de roi, archi-courtisé et par Aubry et par Hollande"