Palimpsestes

Jean-Pierre Raffarin : "La TVA sociale nous a fait perdre 60 députés"

A Matignon, dimanche 17 juin à 18 h 30, lorsque François Fillon réunit ses ministres et les principaux responsables de la majorité, le décor est planté. Le premier ministre se félicite : "On a gagné, on a la majorité absolue, on va pouvoir faire les réformes." "Nous, on savait tous que tout allait mal", témoigne un participant.

Tous les regards convergent alors vers Jean-Louis Borloo. Le ministre de l'économie est accusé par plusieurs de ses collègues d'être tombé dans le piège de la TVA sociale qui lui avait été tendu par Laurent Fabius, dimanche 10 juin au soir sur TF1. "Toute la semaine, nos candidats se sont fait interpeller par leurs électeurs sur la hausse de la TVA", assure un ministre.

Dès l'annonce des résultats, l'ancien ministre Renaud Dutreil lance la première salve contre M. Borloo, son rival au sein du Parti radical. "Il faut que l'on tire les leçons de cette erreur majeure de communication qui nous a coûté, je pense, beaucoup de voix en France", observe l'ancien ministre des PME, élu dans la première circonscription de la Marne, dans une déclaration à l'AFP.

"DEUX MORTS ET DEMI"

L'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin renchérit : "La TVA sociale nous a fait perdre 60 députés", confie-t-il, à la Maison de la chimie, à Paris, où ont été conviés les militants de l'UMP. "On ne peut pas poser cette question entre les deux tours, ce n'est pas un sujet que l'on peut traiter en une minute trente", tranche-t-il. Avant de se reprendre : "Il ne doit pas y avoir de règlements de comptes pour autant, il ne faut pas remettre en question l'unité." Trop tard. La victime expiatoire du jour tente une justification sur le plateau de France 2 : la TVA sociale, dit-il, "c'est l'analyse - d'ailleurs partagée sur tous les bancs - que la France a un problème de délocalisations, qu'un certain nombre de charges pèsent sur le travail et qu'il faut trouver des pistes". Le ministre de l'économie se défend : "Le président Sarkozy avait dit : Nous y réfléchirons loyalement, clairement. Le premier ministre l'avait évoquée aussi en disant queça ne toucherait pas le pouvoir d'achat des ménages." Bref, grince le député (UMP) de Paris, Pierre Lellouche : "S'il y en a un que l'on peut féliciter ce soir, c'est Fabius." Un conseiller soupire : "A quatre cents députés, personne n'aurait moufté, à seulement trois cents, la parole se libère", constate-t-il. Le premier ministre, qui était allé jusqu'à évoquer la possibilité d'une hausse de 5 points de cet impôt en 2009, est lui aussi pris pour cible : "Les graffitis sur les affiches et les slogans de l'opposition sur les marchés, c'est la TVA à 25 %", glisse un défenseur de M. Borloo.

M. Raffarin qui, en 2002, avait fait mieux que son successeur en 2007 et qui s'est placé en première ligne dans la campagne, se frotte les mains : "Maintenant, on va rigoler." François Fillon, interrogé sur le sort d'Alain Juppé, battu à Bordeaux, sourit. Borloo, Juppé et, dans une moindre mesure, Fillon : "Deux morts et demi", calcule un membre de la majorité.


Christophe Jakubyszyn Article paru dans l'édition du 19.06.07