Histoire d'un quinquennat

Epines

Pour la droite, il y en a désormais deux, même si, à y bien y regarder, elle se recouvrent en réalité.

Celle de la division d'abord : entre des ambitions, sans doute, mais plus fondamentalement entre des orientations politiques.

La campagne de l'entre deux tours - et ce qu'il est désormais convenu de nommer la stratégie Buisson - a laissé des traces. On voit bien qu'entre l'aile dite humaniste de l'UMP et la droite populaire il y a quelque chose qui ressemble fort à un grand écart qui devra bien, d'une manière ou d'une autre réduit faute d'engendrer demain l'explosion de l'UMP.

Il concerne, politiquement, le rapport à entretenir ou non avec l'extrême-droite à l'égard de qui on maintient pour le moment le dogme, hérité de Chirac, de l'absence d'alliance possible.

Il concerne idéologiquement, et c'est en réalité bien plus engageant pour l'avenir que les strictes et ponctuelles accointances pour sauver un siège, le logiciel de la droite : la reprise, demain et sous quelles formes, des thèmes de la frontière, de l'immigration ....

De ce point de vue on peut effectivement constater combien ces élections auront marqué un bouleversement qui ne se révèle ainsi pas que politique mais aussi idéologique. La droite est peut-être à un de ces croisements, qui marqueront son histoire, que révèle d'ailleurs le si difficile choix de Bayrou entre les deux tours.

Cette croisée n'aura évidemment pas lieu avant les législatives ... mais après. Et, au fond, une cure d'opposition cela sert aussi à cela. Pour y parvenir, elle devra prendre à bras le corps non tant la question des valeurs que celle de ses principes. Mais elle devra aussi analyser plus finement le vote FN que la précipitation des événements ne permet pas de faire en ce moment.

Il n'est pas faux de considérer que la droite se trouve devant un choix analogue à celui de la gauche dans la période 1980/2000 où elle se vit ou crut contrainte, sous couvert de modernité, de faire sa mue social-libérale. Sous des allures plus activistes que véritablement idéologiques, le sarkozisme aura peut-être caché une mue plus profonde qu'on ne l'imagine ; l'aura en tout cas rendue possible. Demeurent me semble-t-il toujours, parce qu'ici aussi il y a retour du même, les mêmes courants repérés par R Rémond d'une droite distinguée entre légitimiste, orléaniste et césarienne. Sauf à considérer que clivage et simplification aidant, on se retrouve devant une droite effectivement libérale qui irait du pôle humaniste de l'UMP aux centristes de tout poil d'un côté, et une droite plutôt césarienne qui regroupe pour le moment l'aile droite de l'UMP mais pourrait concerner demain ce qu'il y a de vague bleu-marine au FN une fois exclue la frange trop explicitement fascisante des archéo-lepénistes.

Quand le FN tente de se banaliser et une frange de l'UMP de se droitiser, s'ouvre nécessairement un champ politique possible que Sarkozy croyait pouvoir conquérir. Il se sera - de peu - trompé ; son choix n'aura-t-il été que cynique électoralement et que politiquement prématuré ?

C'est tout l'enjeu de la période qui s'ouvre.

Le retour de la droite maurrassienne ?

Mais c'est bien ici aussi qu'il faudra ne pas se tromper - une erreur d'analyse qui d'ailleurs pourrait entraver aussi bien la gauche que la droite.

La stratégie Buisson aura en réalité consisté à promouvoir une droite sur des bases maurrassiennes et certainement pas fascistes. Et il est plus que probable que la stratégie de M Le Pen consiste, de son côté, à, sinon exclure, en tout cas paralyser, ce qu'il reste de relents fascisants et pétainistes au Front National. Si tel devait être le cas, alors oui, invariablement, des rencontres, des dialogues deviendraient possibles dont les propos de Longuet, entre les deux tours, n'auront été que le signe avant-coureur. Ce qui peut donner un air de vraisemblance à cette analyse tient au repérage que certains ont fait, avant même le scrutin, et après, que le vote FN puis Sarkozy du second tour, aura été un vote rural et suburbain, de ce point de vue étranger à la présence ou non de populations immigrées à l'inverse du vote de gauche majoritaire dans toutes les grandes villes.

Dans une telle perspective, il serait erroné, vain et dangereux politiquement de hurler au loup fasciste comme on le fit dans les années 90. Il vaudrait mieux au contraire essayer de comprendre ce qui du maurrassisme serait - ou non - en train de resurgir sur les terres de droite.

Le tenter ici passera par trois étapes :

- comprendre ce que sont les fondamentaux de la pensée Maurras et en particulier du nationalisme intégral

- distinguer ce qui sépare le fascisme du nationalisme maurrassien, trouver les lignes de clivage

- repérer dans le discours de l'UMP ce qui s'y trouverait - ou non - : se servir pour cela à la fois des textes émis par la droite populaire et analyser le dernier discours de campagne de Sarkozy à Toulon.

 


1) édito de Legrand sur F Inter

2) La Droite Populaire a

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