Chronique du quinquennat

Petite analyse des discours de Toulon et de Toulouse
(entre deux tours de la présidentielle)

1) lieux communs avec FN
2) Deux remparts
3) Premier ennemi : l'immigré
4) Second ennemi : la gauche
5)La république sarkozyste
6) La Nation
7) La frontière

rappel Introduction 2 remparts Quatre ennemis solutions
Maurras lieux communs entre droite et extrême droite La France l'immigré la République nouvelle
anti-lumière   La République l'anti-France La Nation
antisémitisme     la gauche La frontière
nationalisme intégral     les corps intermédiaires  
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Ce qu'est la République

Ce qu'elle n'est pas


 

Derrière le discours sur le peuple, sur les élites, il y a en réalité en creux, et parfois explicite, un discours sur la Nation. Et sous ce discours sur la Nation, un second, sur la frontière, perçue comme la solution, le remède. Ce qu'on trouve dans le discours de Toulouse

La Nation

On sait le concept flou ; on sait surtout l'opposition traditionnelle entre une approche naturaliste, essentialiste de la frontière et l'approche contractuelle ; opposition qui fut clairement mise en évidence après 1871 à propos de la question de l'Alsace-Lorraine : était-elle allemande par la culture, la langue ? ou bien était-elle française par la volonté ?

Entre un Vacher de Lapouge qui dira :

L'individu est écrasé par sa race et n'est rien. La race, la nation sont tout

et un Renan qui déclara

un plébiscite de tous les jours, comme l'existence de l'individu est une affirmation perpétuelle de la vie

Ce que Sarkozy affirme à Toulouse, c'est l'oubli de la Nation et la nécessité de la retrouver parce qu'elle serait la condition à la fois de la République, de la liberté donc, et celle de la civilisation.

Il y a bien a priori un gouffre immense entre l'approche monarchiste d'un Maurras et celle républicaine déployée par Sarkozy dans sa campagne. Une fois écartée ce qu'il y put résider de convoitise des voix du FN, il y a pourtant ici un discours construit où chaque élément fonctionne comme la condition de l'autre, qui mérite d'être analysé.

Pour Maurras, la nation invariablement s'inscrit dans le monarque, dans l'aristocratie. Elle est affaire de race, de dignité, de noblesse. A l'inverse des Lumières qui entendront toujours la nation comme synonyme de peuple. Si, pour cette raison, l'Etat n'est acceptable que pour autant qu'il s'identifie à la noblesse et donc au monarque, on voit en même temps prendre tout son sens l'expression maurrassiste distinguant entre le pays réel et le pays légal : sitôt que la Nation ne s'identifie plus à l'Etat, c'est-à-dire au Roi, l'Etat devient peu ou prou l'obstacle, le gêneur, celui qui rompt solidarité, unité et vertu de la Nation.

Avec Sarkozy, on est loin évidemment de cette approche aristocratique de la Nation ; il y a pourtant des points de rencontre qui sont loin d'être anodins :

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- une approche moins rationnelle que sentimentale, moins théorique qu'instinctive de la nation.

- une méfiance à l'égard, non de l'Etat en tant que tel mais de ce qu'il appellera le système où s'entremêlent les médias, la gauche, la pensée unique et les élites.

- une égale sur-évaluation du peuple qui lui ne se trompe pas face à la gauche qui veut créer du conflit, qui ne croit qu'à la lutte des classes et la droite qui ne veut rien partager ; la bourgeoisie qui se contente de défendre ses intérêts. Seul le peuple est resté attaché à la nation quand les élites l'ont oubliée - trahie. Seul le peuple reste attaché à la Nation quand les États l'ont sacrifiée sur l'autel de la mondialisation et du laissez passer laissez faire ...

- le rôle éminent joué par les racines - et notamment chrétiennes -

- l'affirmation des valeurs universalistes - bien contraires à celles de Maurras - mais immédiatement atténuées par l'attachement viscéral à la terre, à la culture de ses parents. L'affirmation de la différence, le refus de la dilution de la nation dans l'homogénéisation induite par la mondialisation.

- le refus de la décadence - ici traduite sous le concept de sortie de l'histoire. A entendre dans le cadre du discours de Dakar de 2007. Ne pas être civilisé, c'est n'être pas entré dans l'histoire. La décadence, c'est en sortir.

Les oppositions théoriques n'en sont pas moins cruciales, ne serait ce que parce que Sarkozy se situe dans une perspective héritée des Lumières. Ce qu'à travers Sarkozy Guaino tente c'est au fond une vaste synthèse - tenir les deux bouts de la chaîne comme le soulignait le discours du Latran - entre un schéma historique, progressiste et celui, essentialiste , hérité de la monarchie.

En cela, dans cet effort de synthèse, il rejoint Maurras, lui qui venait du comtisme pour étoffer finalement le monarchisme chrétien.

Cette synthèse se révèle, comme pour la frontière, par une anaphore qui définit la nation en un aimable fourre-tout qui réunit :

- l'amour de la patrie
- le bien commun
- le partage
- l'identité commune
- le civisme
- la solidarité
- la fierté
- la différence

Et elle rejoint Maurras en ceci qu'elle permet de remettre à l'ordre du jour la Nation définie à la fois

- contre les élites et l'Etat - ce qui est quand même un comble pour un président sortant.
- comme un oubli à réparer, une erreur sur quoi revenir.
- comme le lien suprême qui permet de s'adresser au peuple et donc d'unir et non de diviser
- comme une transcendance qui permet de tenir à égale distance le socialisme qui n'aurait que classes sociales et lutte des classes à la bouche, d'un côté ; et l'élite bourgeoise de l'autre côté
- comme ce qui permet de dépasser à la fois le socialisme et le libéralisme du libre-échange échevelé

Or sur ces cinq points, c'est évidemment du Maurras quand il se veut à la fois anticapitaliste et antisocialiste.

La frontière


1) réécouter ce passage et relire le discours

* sur le discours du Latran voir

2) Guaino qui s'interrogeait en même temps sur la valeur de la transcendance