Elysées 2012

Symbole
représentation, légitimité et pouvoir

 

De la symbolique et du pouvoir
à la surface au mitan en profondeur
Primaires Esprit de la Ve République Symbole
réussite   fondation
Petits coups   rite grec
addition   rite albin
éléments de langage   Hestia
miel & fiel   Moïse
    fondation mosaïque
    Du prophétisme

 

Le symbole

Etymologie

Du grec, σύμβολον, le symbole désigne d'abord un signe de reconnaissance, un morceau de bois par exemple, divisé en deux, et devant servir de signe de reconnaissance. Dès lors que ces deux personnes se seront reconnues, le symbole ne sert plus de rien, ce pourquoi il est jeté - jeté ensemble qui est le sens premier de συμβάλλω, qui signifie donc aussi réunir ou se rencontrer.

Dans la tradition catholique, le symbole désigne aussi l'ensemble de formules résumant la foi chrétienne; profession de foi chrétienne. Et, par analogie, profession de foi, exposé de principes.

Principes du symbole

Le symbole est ainsi un outil, un trait d'union, le truchement que l'on adopte pour se réunir ou se retrouver. La marque de cette union est l'emboitage des deux morceaux et donc l'évidence de leur complémentarité. Il est tout à fait remarquable que le symbole renvoie à une union en train de s'opérer et non à une unité déjà accomplie : le symbole est processus et non état de fait.

Pour qu'il puisse fonctionner il faut évidemment à la fois que l'emboitage soit possible mais pourtant pas encore réalisé ; que les deux protagonistes soient proches, ou plus exactement s'approchent - et ne s'éloignent donc pas l'un de l'autre - mais ne soient pas encore réunis. A sa manière, le symbole est une arme à un seul coup : une fois sa fonction réalisée, il ne sert plus de rien.

Le symbole s'adresse ainsi à ceux que le Christ nomme le prochain, celui qu'on est supposé aimer comme soi-même, ce qui implique qu'il soit non pas identique à moi-même mais semblable, celui qui, au sens plein du terme s'approche de moi. Le symbole est facilitateur de cette union désirée.

Il faut insister sur le suffixe βάλλω que l'on retrouve dans une foultitude de termes : ce qui se jette et qui dès lors se trouve devant moi et parfois contre moi - objet - ce qui se trouve en dessous de moi - su-jet. Le symbole est le biais d'une dynamique en train de se réaliser et ne peut y parvenir qu'à la double condition que les protagonistes soient à la fois proches et éloignés, ce qui n'est contradictoire qu'en statique ; mais fécond en dynamique. Il y a une logique là dessous : on ne cherche tant à réunir que ce qui est séparé ; on n'y parvient que pour autant que ce qui est séparé aspire à la réunion. Le symbole renvoie donc à la volonté ou au désir.

Le symbole est donc médiation, médiateur : ce qui se trouve à l'intersection et qui, de part et d'autre, porte la cause de l'union - son désir ou sa nécessité. Parce qu'il est medium il relève de plain pied de la communication. Serres avait raison : celui qui l'incarne au mieux c'est Hermès. Hermèsqui est ange- ἄγγελος : messager.

Si Hestia, dans la mythologie grecque renvoie explicitement à l'enracinement, à la terre, au foyer, si elle rassemble tous les membres du genos, et leur confère leur identité ; si, par ailleurs Hestia participe encore de cet espace pré-euclidien, non homogène, mais au contraire ontologiquement qualifié et qualifiant et incarne en conséquence l'intersection entre ces espaces, Hermès, en revanche, se place non pas au centre, mais sur les marges : celui qui va à l'encontre de l'autre, de l'étranger. Il est à la porte de la cité, symbole de l'ouverture.

Mais ce terme connote tout ce qui, dans la tradition chrétienne mais juive aussi relève du messianisme. En tout cas de l'Alliance :

Emmanuel : c'est le nom que porte le Messie annoncé par Isaïe 7, 14

Ah certes! Le Seigneur vous donne de lui-même un signe: Voici, la jeune femme est devenue enceinte, elle va mettre au monde un fils, qu'elle appellera Immanouel.

(...)

Il se précipitera sur Juda, entraînant tout sur son passage, arrivant jusqu'au cou, et l'envergure de ses- ailes couvrira toute l'étendue de ton pays, ô Immanouel! (8,8)

Sa signification est bien : Dieu avec nous ! au point qu'il puisse être adjectivé pour désigner le Christ. La tradition chrétienne utilise Paraclet ( παράκλητος) qui étymologiquement signifie celui qui est appelé auprès, l'intercesseur, l'avocat (advocatus) .

Deux fonctions donc se distinguent dans cette fonction d'intermédiaire :

- l'ange(ἄγγελος) qui est celui qui porte le message : Evangile - la bonne nouvelle vient de là .

- l'intercesseur, le médiateur

Deux fonctions qui semblent tellement distinctes que le Nouveau Testament semble, dans les propos du Christ, en faire deux personnes distinctes ou, à tout le moins, selon l'orthodoxie catholique deux instances distinctes le Fils et le Saint Esprit

Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu'il demeure éternellement avec vous,
Jn, 14,16

l'Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point et ne le connaît point; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous.
14,17

Quand sera venu le consolateur, que je vous enverrai de la part du Père, l'Esprit de vérité, qui vient du Père, il rendra témoignage de moi;
Jn,15,26

Ce ne peut être un hasard si la tradition chrétienne nomme le diable Antéchrist : au même lieu, à la même intersection, le diable - antonyme parfait διάϐολος du symbole est celui qui sépare, qui distingue, qui jette sur les bas côtés, qui éloigne et pour ceci calomnie. Grand tentateur, il est l'instance du pari et le premier qu'il fait se situe bien avant sa chute au début du Livre de Job à quoi la tentation du désert ne fait que rendre écho.

On comprend d'autant mieux la fonction du Paraclet qu'on observera les agissements de son antonyme : le diable sépare les hommes de Dieu ; il est celui qui parcourt la terre, s'y promenant. Il est bien ainsi celui qui porte la lumière (Lucifer) loin au devant, qui descend sur la terre pour y porter le message. καταβολη, κατα désignant un mouvement vers le bas, mais au lieu de réunir, il sépare, ou cherche à y parvenir. Dans les deux exemples cités, il échoue à déchirer le lien de Job et de Jésus avec Dieu : mais la tentation - et la calomnie - résident toujours dans ce διά qui s'oppose si violemment au συν.

Le Paraclet est bien ainsi celui qui se tient en-dehors de la sphère divine, à l'intersection du divin et de l'humain, celui qui se tient sur le point de jointure et y exerce sa fonction de médiateur. Symbole maintenu, vivant, parce que l'écart le sera de toute éternité, le Paraclet peut assumer sa fonction dans la mesure stricte où la confusion entre les deux termes n'a pas lieu, où l'emboitage dont nous parlions ci-dessus n'est jamais accompli.

Intersection

Le terme nous place donc, deux fois, à l'intersection :

- des origines de notre culture, grecque et judaïque ;

- du dispositif même de la relation à l'autre, au sacré, au pouvoir

Mais il nous place aussi à ce moment si particulier de la fondation. Tout a l'air de se passer comme s'il ne pouvait pas être de système s'instituant, de cités s'érigeant, de croyances s'imposant sans qu'en même temps se mette en place un dispositif symbolique qui le rende possible ... et lisible.

Celui qui bâtit, d’abord creuse : les fondations. Fundationes désigne les assises par quoi on affermit un édifice. La métaphore est classique, implicite ici d’entre ce qui est fragile et se bâtit sur le sable et ce qui s’édifie sur le roc 3 . L’acte même de fonder est le signe de la force. Le grec dit, pour fondation, καταβολη désignant à la fois le contraire de ana c'est-à-dire un mouvement vers le bas et βαλλω : jeter, lancer mais aussi frapper. 4 Ce même suffixe que l'on retrouve dans symbole.

Le terme est manifestement ambivalent qui dit à la fois le mouvement vers le haut et vers le bas ; qui dit à la fois la construction et la destruction. Volvo vient de ελυω qui signifie rouler

C’est ce terme qu’utilise Jean dans l’Apocalypse : révéler des choses cachées depuis la fondation du monde ( καταβολη κοσμου ) Le cosmos c’est l’ordre, l’organisation et donc la discipline, mais aussi la construction.

On est là au centre de ce qui importe : avec le même suffixe on a symbole, diabole et catabolisme et anabolisme ; avec le même préfixe : catastrophe. Celle-ci est donc l’action de se détourner vers le bas pour éviter les coups.

Ceci constitue la première leçon à retenir avec la nécessité de l'emboitage possible mais jamais accompli : le symbole nous renvoie toujours à l'acte fondateur.

Du signe

On aura remarqué que le point commun des deux cultures, reste la capacité d'émettre des signes.

Car le Christ ne m'a pas envoyé baptiser, mais annoncer l'Evangile, et cela sans la sagesse du langage, pour que ne soit pas réduite à néant la croix du Christ. Le langage de la croix en effet, est folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui se sauvent, pour nous, il est puissance de Dieu. Car il est écrit: Je détruirai la sagesse des sages, et l'intelligence des intelligents je la rejetterai. est-il le sage ? Où est-il l'homme cultivé ? Où est-il le raisonneur de ce siècle ? Dieu n'a-t-il pas frappé de folie la sagesse du monde? Puisqu'en effet le monde, par le moyen de la sagesse, n'a pas reconnu Dieu dans la sagesse de Dieu, c'est par la folie du message qu'il a plu à Dieu de sauver les croyants. Alors que les Juifs demandent des signes et que les Grecs sont en quête de sagesse, nous proclamons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens mais pour ceux qui sont appelés, Juifs et Grecs, c'est le Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu.

Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes (5)

Jean met sur le même plan, le double échec des juifs et des chrétiens : les premiers attendaient des signes et ne surent pas les reconnaître ; les seconds, en dépit de leur philosophie ne surent pas plus voir en la révélation les termes de la sagesse qu'ils crurent fonder.

Jean n'a pas tort : pour les grecs, et à sa manière le mythe platonicien de la caverne l'atteste, la philosophie est justement ce qui nous pousse à sortir de la caverne, de l'obscurité en projetant au-dehors la lumière qui aide à comprendre le monde. Pour les juifs, les signes envoyés par Dieu. Dans les deux cas, une sortie hors de la caverne, une montée vers l'absolu. Cette montée-ci qui est accomplissement est identiquement

Le christianisme se pense donc bien comme le dépassement de la double impuissance juive et grecque à entendre les signes, à reconnaître le symbole, à fonder la médiation.

Ce que ces textes nous disent c'est la nécessité de comprendre cet instant, non des origines mais de la fondation dans ses trois flexions, juive, grecque et romaine parce que ce sont les trois flexions dont tout notre système participe.

Ce qu'ils nous rappellent c'est qu'il est donc assez logique que toute réflexion sur le symbole nous ramène à celle sur le pouvoir, et que toute réflexion sur le pouvoir, nous entraine du côté de la fondation.

Ce qu'ils nous enseignent enfin, plus ponctuellement, c'est qu'il n'est pas anodin du tout, que toute remise en question de la légitimité d'une procédure politique nous entraîne ainsi de ce même côté, si enfoui, tellement caché depuis la fondation du monde (καταβολη κοσμου) que nous serions presque enclins à l'oublier.

Fondations


1)

Job, 1.6 Or, les fils de Dieu vinrent un jour se présenter devant l'Éternel, et Satan vint aussi au milieu d'eux. 1.7 L'Éternel dit à Satan: D'où viens-tu? Et Satan répondit à l'Éternel: De parcourir la terre et de m'y promener. 1.8 L'Éternel dit à Satan: As-tu remarqué mon serviteur Job? Il n'y a personne comme lui sur la terre; c'est un homme intègre et droit, craignant Dieu, et se détournant du mal. 1.9 Et Satan répondit à l'Éternel: Est-ce d'une manière désintéressée que Job craint Dieu? 1.10 Ne l'as-tu pas protégé, lui, sa maison, et tout ce qui est à lui? Tu as béni l'oeuvre de ses mains, et ses troupeaux couvrent le pays. 1.11 Mais étends ta main, touche à tout ce qui lui appartient, et je suis sûr qu'il te maudit en face. 1.12 L'Éternel dit à Satan: Voici, tout ce qui lui appartient, je te le livre; seulement, ne porte pas la main sur lui. Et Satan se retira de devant la face de l'Éternel.

(...)

Job, 2.1 Or, les fils de Dieu vinrent un jour se présenter devant l'Éternel, et Satan vint aussi au milieu d'eux se présenter devant l'Éternel. 2.2 L'Éternel dit à Satan: D'où viens-tu? Et Satan répondit à l'Éternel: De parcourir la terre et de m'y promener. 2.3 L'Éternel dit à Satan: As-tu remarqué mon serviteur Job? Il n'y a personne comme lui sur la terre; c'est un homme intègre et droit, craignant Dieu, et se détournant du mal. Il demeure ferme dans son intégrité, et tu m'excites à le perdre sans motif. 2.4 Et Satan répondit à l'Éternel: Peau pour peau! tout ce que possède un homme, il le donne pour sa vie. 2.5 Mais étends ta main, touche à ses os et à sa chair, et je suis sûr qu'il te maudit en face. 2.6 L'Éternel dit à Satan: Voici, je te le livre: seulement, épargne sa vie. 2.7 Et Satan se retira de devant la face de l'Éternel. Puis il frappa Job d'un ulcère malin, depuis la plante du pied jusqu'au sommet de la tête. 2.8

2) Mt, 4, 1- 11 (voir aussi Lc, 4, 1-13)

Alors Jésus fut emmené par l’Esprit dans le désert, pour être tenté par le diable. Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim. Le tentateur, s’étant approché, lui dit : Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. Jésus répondit : Il est écrit : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. Le diable le transporta dans la ville sainte, le plaça sur le haut du temple, et lui dit : Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera des ordres à ses anges à ton sujet ; et ils te porteront sur les mains, de peur que ton pied ne heurte contre une pierre. Jésus lui dit : Il est aussi écrit : Tu ne tenteras point le Seigneur, ton Dieu. Le diable le transporta encore sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire, et lui dit : Je te donnerai toutes ces choses, si tu te prosternes et m’adores. Jésus lui dit : Retire-toi, Satan ! Car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul. Alors le diable le laissa. Et voici, des anges vinrent auprès de Jésus, et le servaient.

 

3) on la retrouve dans l’AT comme dans les Evangiles ! on la retrouve chez Descartes pour illustrer la nécessité du cogito .

4) avec le même suffixe : problème
προβάλλω «jeter devant; mettre en avant comme argument; proposer (une question, une tâche, etc.

5) Jn, l, 10-11



Francois Hollande sur le 1er tour des primaires par francoishollande

 


Déclaration de Martine Aubry à l'issue du... par PartiSocialiste