Elysées 2012

La fondation mosaïque :

De la symbolique et du pouvoir
à la surface au mitan en profondeur
Primaires Esprit de la Ve République Symbole
réussite   fondation
Petits coups   rite grec
addition   rite albin
éléments de langage   Hestia
miel & fiel   Moïse
    fondation mosaïque
    Du prophétisme

 

Qui a doté l’homme d’une bouche? Qui rend muet et sourd, clairvoyant ou aveugle? N’est-ce pas moi, Yahvé?
Va maintenant, je serai avec ta bouche et je t’indiquerai ce que tu devras dire.
Moïse dit encore: “Excuse-moi, mon Seigneur, envoie, je t’en prie, qui tu voudras.” La colère de Yahvé s’enflamma contre Moïse et lui dit:

“N’y a-t-il pas Aaron, ton frère, le lévite? Je sais qu’il parle bien lui: le voici qui vient à ta rencontre et à ta vue il se réjouira en son cœur. Tu lui parleras et tu mettras tes paroles dans sa bouche, et je vous indiquerai ce que vous devrez faire. C’est lui qui parlera pour toi au peuple; il te tiendra lieu de bouche et tu seras pour lui un dieu. Quant à ce bâton, prends-le dans ta main, c’est par lui que tu accompliras les signes.”  Ex 4, 10-17

Passage tout à fait éclairant où l'on voit la mission de Moïse se dessiner : porte-parole, il n'est maître de rien, transmetteur seulement. Ni maître de ce qu'il dit, ni même du rôle qu'il a à jouer. Qu'il vienne seulement à vouloir se dérober, lui qui est bègue, voici qu'il encourt l'ire divine. Le prophète est intermédiaire, il ne peut se faire ni principe, ni fin. Que, pour résoudre le mal parler, se mette en place une double délégation, sans doute, mais qui n'est elle-même qu'une ultime hypostase du signe, décidée par Dieu, pas par Moïse.

De ceci l'on peut tirer une véritable théorie du mal : est pervers tout intermédiaire, tout médiat, tout moyen qui se voudrait prendre pour fin. Il est tout à fait intéressant que tout au long de l'Apocalypse, est rappelé l'alpha et l'omega , le principe et la fin. Seul le divin est aux extrêmes : le symbole est entre les deux, médiat et médiateur ; toujours.

Et, pour ceci, rappelons-le, Moïse n'a pas d'origine claire. Sauvé des eaux, comme le seront les fondateurs de Rome Romulus et Rémus, il a peut-être une famille, il en aura deux. Il n'aura pas de fin : il s'éteindra à la fin de l'exode et n'entrera pas en terre promise, lui qui pourtant en fut le truchement.

Conversion, épreuve et formation

M Serres a décidément raison de dire que la caverne est une grille de lecture possible du livre des fondations : pour le grec comme pour le juif, la caverne est ce d'où l'on sort, au dehors de quoi guide la lumière. Ici point de caverne à proprement parler mais une vallée de larmes, de sujétion et de souffrances. Mais de sortie, oui. L'Egypte est cette caverne, et les quarante années d'errance dans le désert ressemblent à s'y méprendre aux différentes phases de formation que subira l'homme de la caverne avant de pouvoir soutenir le regard du souverain bien.

La théorie de la ligne, avec ses quatre phases ponctuées d'éblouissement esquissent assurément un chemin vers la sagesse, où nombreux resteront en route, où le point d'arrivée est réservé aux quelques uns qui se pourront véritablement dire philosophes qui seront parvenus à traverser langage et raison - dialectique - pour soutenir le souverain Bien mais les épreuves qu'ils subissent et, notamment, le sentiment répété de ne plus être du monde, ni compris par lui, et les aveuglements qui les laissent désemparés avant que progressivement ils ne parviennent à s'accoutumer, disent le temps long de la formation, le temps d'épreuves de la conversion.

Ad Jerusalem convertere : ces temps-là sont effectivement de retournement. On ne sait trop dans le texte platonicien qui dénoue les liens de l'homme et rend possible ainsi sa délivrance, signe sans doute de la difficulté de sortir de l'illusion première, en revanche on le sait, dans la tradition juive où systématiquement c'est l'élu de dieu, le prophète, qui assure cette tâche, en fixant le point d'horizon, et prenant la direction de la bataille. Mais dans les deux cas, identiquement, il y a retournement, épreuves et temps long de la formation.

Dans les deux cas, ascension et sortilège. Au même titre que Romulus et Rémus montent qui sur son Aventin qui sur son Palatin pour lire les augures - sens étymologique de sortilège - identiquement Moïse fait l'ascension du Sinaï pour entendre la parole divine, qui, on le sait se traduira par le décalogue.

L'acte de fondation