Elysées 2012

Martine Aubry

Femme étrange dont on se demande toujours si elle en a véritablement envie ou non. Comme si le renoncement de son père en 95 devait la plomber génétiquement. (Encore une de ces facilités journalistiques...) Toujours est-il que la levée de l'hypothèque DSK l'oblige désormais à se repositionner et à éviter surtout de paraître un candidat de substitution, un pis aller.

Femme d'appareil, mais aussi de pouvoir elle traine avec elle cette image de dame des 35 H 1 qui n'est un obstacle que pour les hommes de droite ; néanmoins son bilan, apparemment pacifié, à la tête du PS où elle aura réussi à taire la guerre des egos en dépit d'une accession controversée à la tête du parti ; sa ténacité farouche à respecter le calendrier des primaires, renvoient une image rigoureuse mais bien peu passionnelle - encore moins passionnante - d'une alternative à gauche.

Mise à part son animosité connue vis à vis de F Hollande, on devine mal, néanmoins, ce qui politiquement la sépare de lui : figure d'un socialisme réaliste, elle suggère la dimension de son père, mais ni plus ni moins que Hollande qui se revendique de lui.

C'est tout le problème de ces primaires 2 - comme il y a cinq ans d'ailleurs : comment se démarquer, se positionner politiquement quand on est supposé défendre le même programme, préalablement établi ?

Une figure à l'écart du people

C'est bien au fond ce que révèle en contrepoint cette rubrique déjà ancienne de Guillon sur France Inter à propos de l'expression pot à tabac.

Anti bling bling par excellence, ayant réussi jusqu'à présent à laisser en retrait sa vie privée, Aubry apparait comme une véritable politique derrière quoi il n'y a rien; rien à dire; rien à redire. Et ceci est déjà un exploit. On verra au fil des mois, si elle se présente comme il est vraisemblable, dans quelle mesure elle parviendra à maintenir ce cap, cette absence d'image personnelle dans une logique présidentielle qui est une logique de personnification, qu'on le veuille ou non. Dans quelle mesure elle parviendra à se construire comme personnalité sans sombrer dans le people; ce qui serait déjà un exploit.

Une femme

Ne sous estimons pas cette dimension dans la mesure où, si elle parvenait à porter les couleurs de son parti, elle serait la seconde à pouvoir le faire après Royal. Dans la mesure aussi où, scenario possible qu'esquissent les sondages, on pourrait parfaitement dans le cas d'un 21 avril à l'envers se retrouver avec un second tour opposant Marine et Martine.

Je continue à penser, en dépit de l'échec de 2007, que le PS en présentant une femme, et demain peut-être deux, aura largement contribué à désamorcer l'antienne machiste en politique. Un coin aura été ouvert dans le monopole masculin desp résidentielles : que demain une femme puisse légitimement espérer concourir au second tour, et donc être élue, sans que ceci déplace les orientations et les choix de l'électorat, est déjà une grande victoire.

Anti Ségolène par excellence, tant d'un point de vue politique qu'iconographique, moins transgressive mais moins imprévisible aussi que Royal, elle ne manquera pas de jouer sur la rigueur, la détermination où se dessine quelque chose comme la figure tutélaire de Pierre Mendès France. C'est en tout cas ce qu'il faudra observer dans les mois qui viennent.

Une réelle dimension sociale

Les 35 heures, en dépit des critiques faites par la droite, qui ne manqueront pas de resurgir, sont quand même la dernière avancée sociale depuis longtemps, depuis surtout les régressions que le pouvoir en place aura infligées: de la perte du pouvoir d'achat, au blocage de fait des salaires ; des remises en questions incessantes du droit social aux réformes de la retraite, on ne me fera pas croire que le souvenir des 35 H ne représente un plus sur quoi sans doute elle jouera.

A suivre ...


1) l'expression venant, on le sait, de l'ouvrage éponyme de P Alexandre

2) nous reviendrons sur la question des primaires

3) se souvenir de cette rublique de Guillon


Rien sur le physique de Martine Aubry par franceinter