Elysées 2012

L'affaire

En réalité il y en a deux en une : la chute de la maison DSK en elle-même qui a un côté tragique et la manière dont les media l'auront traitée.

Tragédie ?

Difficile pourtant d'envisager l'affaire sous ce noble et si riche vocable tant elle comporte de sordide, de vulgaire, d'ignoble.

C'est sans doute la première colère que cette histoire inspire qui vous a un arrière goût de trahison. Dans la balance, d'un côté un avenir que l'on promet brillant et un présent que chacun, étrangement vante, de l'autre cette impuissance à résister aux pulsions primaires qui laisse pantois. Trahison parce qu'à tord ou à raison, nous continuons à attendre de nos politiques quelque chose de plus, d'autre. Sans nécessairement sombrer dans la magie ou le sacré, sans pour autant attendre d'eux je ne sais quel pouvoir thaumaturge, il n'empêche que la rencontre d'un homme avec la nation ne saurait ressembler à une simple récolte de suffrages. Non décidément, nous espérons tous, plus ou moins consciemment, que nos politiques se mettent à hauteur de la fonction, qui n'est pas rien. Celui-là n'y sera pas parvenu. Son avenir m'importe peu. Il m'arrive de songer a posteriori qu'il nous aura rendu un fier service, ne serait-ce que celui de nous épargner une campagne électorale dont tout annonçait qu'elle glanerait ses motifs dans les bas fonds ; ne serait-ce que celui de nous épargner incapable de sacrifier à cette mue politique.

Tragédie : se souvenir que le mot vient de τράγος et de ωδος! Le chant que l'on entonnait au moment du sacrifice du bouc durant les fêtes de Bacchus. Il y a bien quelque chose de cela, de cette confrontation inéluctable entre le héros et le destin, entre l'histoire toujours déjà écrite par les dieux et l'homme qui entame néanmoins le combat. C'est ici la chute qui est tragique ! pourtant le héros se sera dérobé devant l'ultime combat. Je crois bien que c'est ceci qui me dérange le plus et que je ne pardonne pas. D'avoir à l'ultime instant renâclé devant l'obstacle !

Bien sûr la chute soudaine, médiatiquement orchestrée, de celui qui était promis aux plus hautes destinées a quelque chose d'émouvant. De tragique? Pas sûr ! de sordide, assurément ! Les dieux n'y sont pour rien ; le destin non plus. Cet homme-là s'est suicidé tout simplement, incapable qu'il fut de se hisser à hauteur d'homme, non plus que de héraut.

Vulgaire encore que cette obligation où l'on nous mit d'assister en direct à cette chute comme s'il ne nous était réservée d'autre place que celle du voyeur. Mise à mort en direct qui nous place dans la foule braillarde et enragée se réjouissant secrètement du spectacle ainsi offert, tout en faisant mise de s'offusquer.

Car c'est bien ici que le bât blesse et je m'interroge devant la pertinence de ces TV d'information en continu, de ces flashs spéciaux qui balaient en boucle les mêmes images ou la même absence d'image pour relayer une absence de péripétie. Devant ces mêmes commentaires s'insurgeant devant la violence de la procédure judiciaire américaine alors même qu'en arrière-fond on repassait ces mêmes images. Des medias qui se repaissent de ce qu'ils dénoncent, plongeant incontinent dans une contradiction dont j'aimerais qu'ils ne se remettent pas. Oui bien sûr ces menottes avaient quelque chose de fort pour illustrer au mieux la chute d'un puissant ! Oui bien sûr cette face jaunâtre contraste à merveille avec le luxe de la résidence qu'il se choisira demain !

Beau piège que cette affaire-là où chacun y sera allé de son commentaire moral ou politique (1) sans plus trop voir que se jouait ici quelque chose de la délectation vengeresse du pauvre devant le riche, du faible devant le puissant.

Le jeu de massacre a commencé, même si en l'espèce la victime ici aura tiré sa propre salve.

Tout le monde a perdu dans cette affaire : nos dirigeants qui ont souvent perdu une belle occasion de se taire ! la victime présumée, bien sûr, invisible certes à ce stade de l'affaire mais qui intéressait moins en son drame intime que la tempête politique qu'elle impliquait; nous, les spectateurs !

La politique surtout ! Je ne pardonne pas que ce qui devrait être la rencontre de la nation avec ses choix, ses craintes et ses ambitions se mue ainsi en raclures de caniveau ! que ce qui devrait être dialogue, débat, réflexion en une époque suffisamment troublée pour le justifier, soit ainsi rabaissé ! Sans compter le risque toujours présent qu'un moralisme ultra-montain n'y prenne le relai pour demain revendiquer une transparence qui ne manquera pas de bafouer le reste de démocratie qui nous subsiste encore.

On mésestime assurément la sourde colère du peuple : silencieux encore mais impatient déjà ! Je ne sais si les scores atteints par M le Pen aux actuels sondages en est le signe mais il est évéré en tout cas que la précédente campagne a laissé des traces. L'écart assourdissant entre les promesses faites en 2007 et la réalité d'une politique qui laisse entrevoir un fossé de plus en plus grand entre les nantis et les autres, le sentiment largement partagé d'une politique qui favoriserait toujours les mêmes laissent présager une frustration voire une colère que l'on mesure mal mais dont la crainte d'un 21 Avril - à l'envers ou non - témoigne de la réalité.

Tous les dés sont désormais pipés qui risquent de dérouler un faux débat.

Le vainqueur de 2012 sera celui qui parviendra à donner un sens à tout cela, au mieux; qui parviendra à coup d'entourloupes, à masquer médiatiquement cette colère, au pire.


1) celle, discrète de Sarkozy ; celle moins discrète de Fillon ....

Blog du Monde Elysée côté jardin

17 mai 2011 Sarkozy juge en privé que le PS a perdu la bataille de la morale pour 2012

Nicolas Sarkozy a fait exprès de ne pas prononcer le nom de Dominique Strauss-Kahn. Au petit déjeuner de la majorité, mardi 17 mai dans la matinée, le chef de l’Etat a parlé de tout, sauf de ce dont tout le monde parle. François Fillon a évoqué l’affaire dans son propos liminaire, avant de parler économie. Il a fallu l’intervention de l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin pour que le sujet soit abordé. « Il y aura un avant et un après DSK. Il est très rare qu’il y ait un tel choc dans la vie politique à partir d’un événement qui ne l’est pas », a déclaré l’ancien premier ministre.

Le chef de l’Etat en a profité pour donner à ses troupes la feuille de route : « travail, sang-froid, unité, dignité », a dit M. Sarkozy, répétant deux fois le mot « dignité ». M. Sarkozy, qui a félicité ses troupes pour leur retenue, a répété l’exigence de faire de 2011 une année utile et a fait le tour des dossiers : refus d’introduire une tranche supplémentaire de l’impôt sur le revenu, le nucléaire, la réunion sur l’Internet dans le cadre du G8, la crise de la dette, l’emploi, l’Egypte, etc.

En privé, le chef de l’Etat estime que l’affaire est un désastre pour le Parti socialiste, qui aurait perdu une partie du combat pour la présidentielle : celui de la morale. Un responsable de l’UMP prédit des divisions au sein du PS, notamment entre les femmes et les hommes. Ce responsable s’attend à ce que l’affaire connue dans le sérail, celle de Tristane Banon qui s’est dite agressée par M. Strauss-Kahn, divise le parti.

Le scandale intervient alors que la droite estimait depuis une dizaine de jours déjà que le pire était passé : retour de la croissance et de l’emploi, reprise en main de la diplomatie après le raté tunisien, rebond dans les sondages de l’exécutif. La droite laisse l’affaire DSK avancer seule. « La seule chose de bonne à faire, c’est de se taire et de faire son travail », commente Bruno Le Maire, le ministre de l’agriculture.

Fillon

 

 



Socialistes, tous ensemble pour un avenir pire par franceinter