palimpseste Chroniques

Paradoxes de la rentrée 2012

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C'est la rentrée et les choses sérieuses commencent. Et d'abord avec une curieuse ambiance. Les sondages donnent les deux têtes en deçà de 50% de satisfaits ; Mélenchon râle et réclame son dû ; les écologistes - mais n'est-ce pas monnaie courante ? - ont des états d'âme ; les socialistes s'apprêtent à faire semblant de ne pas se diviser à La Rochelle et trouvent dans la bataille de l'UMP qui commence à s'épicer quelque consolation ; la presse se pose des questions sur le rythme et la posture de Hollande dont la normalité a fini de porter ses fruits et commence à porter plus d'épines que de suc ... oui décidément une drôle de rentrée!

Et pourtant jamais la gauche n'a abordé une rentrée avec autant d'atouts : elle vient de gagner les deux élections nationales ; elle tient le Sénat et, pour deux ans encore, quasiment toutes les régions et de nombreuses grandes métropoles. Oui mais, jamais la situation économique n'a paru si désastreuse. On aurait pu s'attendre à ce que ce nouveau pouvoir prît le taureau par les cornes : non, il prend son temps, nomme des commissions et, inévitablement, déçoit. Sans compter les petites anicroches d'un été où Taubira ne manque pas une occasion de marquer sa différence avec Valls. Où un Cahuzac qui envisage de rétablir la publicité sur les chaînes publiques quand une Filipetti s'y oppose.

Duflot déclare avoir une muselière qui lui permet de l'ouvrir un peu ; les Verts se demandent si ce qu'ils gagnent dans l'exécutif, ils ne le perdent pas dans la société elle-même ; et de risquer par là même d'y perdre leur âme ; mais se révèlent aussi tellement divisés sur le Traité européen. Ajoutons à cela l'inénarrable Cohn Bendit qui continue de tirer contre son propre camp ... et une Joly qui se met à craindre que la gauche au pouvoir ne finisse par se normaliser. Et comment taire les sorties de Mélenchon qui crie haut et fort, pour réclamer son du et regretter que ce furent cent jours pour rien ... ou presque.

Du paradoxe au dilemme

A n'écouter de pas trop près, on croirait entendre le Quilès du congrès de Valence à l'automne 81, réclamant des têtes ....

S'y joue évidemment la place de Mélenchon dans le Front de Gauche ; mais aussi du PC au sein de la gauche. Mais plus globalement s'y joue ce rôle si difficile quand on est au pouvoir, de la transaction ; du compromis - que Mendès réduisait à la temporisation - jeu où il y aura toujours quelqu'un pour déclarer qu'on ne va pas assez loin voire que l'on aura déjà trahi ; et d'autres que l'on est déjà allé trop loin.

Vieille rengaine du politique assurément mais qui en même temps repose le problème du rôle d'un parti au pouvoir. Rôle que le PS sut mal assumer en 81-86 quand il fut même écarté en 88-93. Comment ne pas être un parti godillot comme le fut l'UNR tout au long de la période gaulliste ? mais ne pas ruiner non plus les chances du gouvernement que l'on est supposé soutenir.

C'est bien tout le problème, aggravé d'ailleurs par le rôle de plus en plus limité des partis qui ne sont plus que de grosses machines électorales. Finchelstein le rappelle dans cette matinale de France Culture : les partis n'ont plus ni le monopole de la formation, ni de l'information ; encore moins du programme ni même plus, au PS, de la désignation de leur champion. Or l'expérience a montré qu'un parti sans champion n'a aucun avenir réel ; mais son champion n'est plus vraiment le sien ...

Ambiance ! C'est vrai que la gauche n'a jamais été réputée pour son union et Cambadélis n'a pas tout à fait tort de le rappeler. Pour autant les petites bisbilles entre amis sont un luxe, qu'au pouvoir, on ne peut se permettre.

Alors ?

Alors, il reste à l'exécutif à donner sa pleine mesure. Or c'est loin d'être le cas ! La normalité hollandienne visait à redonner de la marge au gouvernement ... Or Ayrault se fait presque plus discret que le président ! On attendait un rééquilibrage.

On a eu un escamotage. Et ce n'est rien de dire que quelques uns au PS même commencent à s'inquiéter. Erreur de casting que d'avoir choisi Ayrault ? Peut-être pas ! mais erreur de communication estivale, sûrement.

Messieurs il est temps de s'y mettre ! Vous ne pourrez longtemps donner l'impression ainsi de tergiverser. C'en des fini des interludes, intermèdes et vacances.

Le pire est qu'on ne peut pas dire que rien n'a été fait : c'est bien plus grave ; cela en donne l'impression.

Le programme décevra ; il déçoit déjà ! la question n'est pas là : elle demeure dans ce manque de visibilité, de perspective comme s'il n'était plus personne pour donner le la de l'action gouvernementale et lui donner un sens.

Une affaire de com ? Sans doute ! Mais pas seulement.