Elysées 2012

Epicé

Il nous l'avait promise épicée cette campagne : alors oui, sur cette dernière semaine, les poubelles sont de sortie. Après l'affaire Karachi, le financement trouble de son appartement - revendu depuis - de l'ile de la Jatte, voici le grand retour de DSK.

Poubelles

Énervements classiques de l'ultime semaine de campagne ? c'est du déjà vu !

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Étonnant pourtant d'aller rechercher DSK qui n'est pas vraiment dans l'actualité : faut-il vraiment qu'il n'y ait plus d'autre argument ! On peut au moins, rétrospectivement, se réjouir de l'éviction prématurée de la campagne de DSK : qu'eût été la campagne avec lui comme candidat ? Sordide, assurément.

Figure de la gauche ?

Je reste encore aujourd'hui surpris du destin de cet homme : chacun a sa part d'ombre, mais celle-ci est bien sombre pourtant. Graveleuse. Mais étonnant quand même que celui-là qui avait tout pour lui, compétence affichée, expérience, notabilité, fortune personnelle - dans tous les sens du mot fortune - eût été capable de tout mettre dans la balance pour ce qu'il appelle une relation inappropriée laisse pantois.

Du coup c'est une figure qui heurte par quelque bout qu'on la prenne, l'image que l'on se fait du politique. Si on l'approche en mauvaise part, celle d'un homme ivre de pouvoir, ambitieux jusqu'à la démesure, et prêt à tout sacrifier pour l'obtenir il offre le négatif du dilettante, léger jusqu'à l'insoutenable. Si on l'approche avec les paradigmes républicains de l'homme de devoir, là non plus cela ne fonctionne pas, lui qui aura émaillé sa carrière de toute une série d'incidents de parcours. Non sans charme, mais parler de charisme demeure exagéré, tout entier arc bouté sur sa compétence supposée, il est la figure même du social-libéral une fois admis qu'il faudrait accentuer le second terme plutôt que le premier. Homme de responsabilité plus que de conviction, où le technocrate semble toujours plus l'emporter chez lui sur le politique il est aux antipodes des grandes figures tutélaires de la gauche : Jaurès, Blum et même Mendès.

On peut se demander vraiment comment le PS a pu voir en lui un candidat possible : décidément Mitterrand qui, comme tout monarque finissant ne s'imaginait pas un héritier possible, laissa les siens orphelins. Fallait-il, après le choc du 21 avril, que le parti fût désemparé pour que le PS se donnât un tel mentor ! Ce fut déjà un choc que de passer de parti d'opposition à parti de gouvernement, c'en fut un autre que de se reconstruire un logiciel susceptible d'affronter les crises successives et la mondialisation ... sans se trahir.

G Bedos s'amusait dans ses revues de presse à toujours corriger s'agissant du PS : il votait socialiste, pas à gauche ...

Rester de gauche tout en se proposant de gouverner et ceci sous l'assaut d'une droite qui sous le vocable de modernisation intimait l'ordre au PS de renoncer en réalité à ses fondamentaux ... beau challenge ou dilemme ?

La campagne en distribuant si nettement les rôles d'entre Mélenchon et Hollande aura illustré en tout cas que demeurait de ce côté-ci de la ligne politique un courant vivace, prêt à s'enflammer, qui rechignait à passer avec armes et bagages de l'autre côté de la ligne, du côté de la rigueur, du sérieux, du réalisme qui sont toujours les termes dont on affuble une abdication jamais avouable.

Être de gauche aujourd'hui c'est peut-être, comme ce le fut en 1905 lors du rassemblement de tous les socialistes dans le cadre de la SFIO, tenter de réunir ces deux flux éthiques de la responsabilité et de la conviction. (1) DSK n'aurait en tout état de cause pas été l'homme de cet engagement-ci.

Hollande ? Si le cours des événements ne l'y contraignent pas, si la pente naturelle du pouvoir à ne très vite plus envisager les événements que sous leur aspect technique ne l'y entraîne pas ... peut-être !

Dût-il y parvenir qu'il laissera une trace dans l'histoire ! sinon il fera partie de cette longue liste de dirigeants qui nous auront fait perdre notre temps ... et nos rêves !

L'occasion de revenir sur une autre de ces figures puisqu'elle réapparaît à l'occasion de cette fin de campagne :

Lionel Jospin

 

 

 


1)relire ce texte de Weber

Il est indispensable que nous nous rendions clairement compte du fait suivant: toute activité orientée selon l'éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées. Elle peut s'orienter selon l'éthique de la responsabilité ou selon l'éthique de la conviction. Cela ne veut pas dire que l'éthique de conviction est identique à l'absence de responsabilité et l'éthique de responsabilité à l'absence de conviction. Il n'en est évidemment pas question. Toutefois il y a une opposition abyssale' entre l'attitude de celui qui agit selon les maximes de l'éthique de conviction - dans un langage religieux nous dirions : « Le chrétien fait son devoir et en ce qui concerne le résultat de l'action il s'en remet à Dieu» - et l'attitude de celui qui agit selon l'éthique de responsabilité qui dit: « Nous devons répondre des conséquences prévisibles de nos actes. » Vous perdrez votre temps à exposer, de la façon la plus persuasive possible, à un syndicaliste convaincu de la vérité de l'éthique de conviction que son action n'aura d'autre effet que celui d'accroître les chances de la réaction, de retarder l'ascension de sa classe et de l'asservir davantage, il ne vous croira pas. Lorsque les conséquences d'un acte fait par pure conviction sont fâcheuses, le partisan de cette éthique n'attribuera pas la responsabilité à l'agent, mais au monde, à la sottise des hommes ou encore à la volonté de Dieu qui a créé les hommes ainsi. Au contraire le partisan de l'éthique de responsabilité comptera justement avec les défaillances communes de l'homme (car, comme le disait fort justement Fichte ( 1 , on n'a pas le droit de présupposer la bonté et la perfection de l'homme) et il estimera ne pas pouvoir se décharger sur les autres des conséquences de sa propre action pour autant qu'il aura pu les prévoir. Max Weber,

Le Savant et le Politique (1919),