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De la tentation

ne nous induis pas en tentation, mais délivre-nous du malin. Car c'est à toi qu'appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen !
Καὶ μὴ εἰσενέγκῃς ἡμᾶς εἰς πειρασμόν, ἀλλὰ ῥῦσαι ἡμᾶς ἀπὸ τοῦ πονηροῦ
Mt, 6, 13

On le sait, c'est une des sollicitations du Notre Père mais ce qui ne laisse pas de surprendre c'est combien en grec, en latin comme en français le terme enferme la double signification d'essayer, de tester et celle d'induire à l'action mauvaise.

 

πονηροῦ : le terme πονηρος qui est de mauvaise qualité, défectieux d'où mauvais méchant pervers au pluriel désigne le mal, ma méchanceté, les vices en général a le sens non seulement de ce qui est mauvais mais en plus entraîne le mal.
πειρασμόν : on retrouve per de expérience mais aussi de percer ; la pointe de l'épée ; il y a bien le double sens d'essayer de de tester mais aussi d'induire en ...
πονεω : avoir du mal, de la peine ; souffrir
πονημα travail pénible, oeuvre difficile

Comment passe-t-on ainsi d'un travail pénible au vice auquel l'on est incité sinon précisément par l'épreuve ? C'est en tout cas assez suggérer que la tentation est une épreuve que l'on subit le plus souvent, dont on est victime. Elle a tout de la passion. On remarquera que dans la langue, la double signification (essayer, induire) ne vaut qu'à l'actif : à la voie passive ne demeure plus que l'induction.

Même si la tradition nous a légué une liste de sept péchés capitaux en face de quoi elle disposa une série de vertus catholiques : la chasteté, la tempérance, la prodigalité, la charité, la modestie, le courage et l'humilité, que par ailleurs ces péchés ne sont capitaux que parce qu'ils entraînent en spirale tous les autres, que donc la tentation ressemble ainsi à s'y méprendre à un engrenage infernal dont par prudence il vaudrait mieux ne pas s'approcher, on ne peut pas ne pas observer l'ambivalence foncière de l'objet de la faute qui est toujours en même temps le truchement par quoi se sauver : vrai pour le travail qui vous condamne et rend possible le salut ; vrai pour l'amour même si en l'espèce, il glisse imperturbablement du matériel vers le spirituel.

Ce qui tente, en réalité, relève toujours de ce qui produit plaisir et jouissance et donc ce qui vous ramène à soi, plutôt qu'à l'autre, mais à soi dans sa réalité matérielle, physique plutôt qu'intellectuelle et spirituelle. L'argent en est évidemment la figure emblématique tout simplement parce qu'il est un objet blanc, un joker - un de ces objets étranges et sans doute fascinants pour cette raison, de ne valoir rien en lui-même et donc de pouvoir prendre toutes les valeurs.

Lire page spécifiquement consacrée à l'argent

Οὐδεὶς δύναται δυσὶν κυρίοις δουλεύειν: ἢ γὰρ τὸν ἕνα μισήσει, καὶ τὸν ἕτερον ἀγαπήσει: ἢ ἑνὸς ἀνθέξεται, καὶ τοῦ ἑτέρου καταφρονήσει. Οὐ δύνασθε θεῷ δουλεύειν καὶ μαμωνᾷ.
Nul ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l'un, et aimera l'autre ; ou il s'attachera à l'un, et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mamon.
24 25
Διὰ τοῦτο λέγω ὑμῖν, μὴ μεριμνᾶτε τῇ ψυχῇ ὑμῶν, τί φάγητε καὶ (N καὶ τί πίητε → [ἢ τί πίητε]) τί πίητε: μηδὲ τῷ σώματι ὑμῶν, τί ἐνδύσησθε. Οὐχὶ ἡ ψυχὴ πλεῖόν ἐστιν τῆς τροφῆς, καὶ τὸ σῶμα τοῦ ἐνδύματος;
C'est pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ?
Mt, 6, 24-25
Ce passage est connu mais il importe de se souvenir qu'il apparaît tout de suite après l'exhortation à une prière intime et surtout pas ostentatoire, après l'énoncé aussi du Notre Père.

Dans tous ces textes, on trouvera un jeu d'opposition sans cesse maintenue entre extérieur et intérieur où le premier représente toujours le risque de la chute en tout cas du mensonge, de l'apparat, de l'ostentatoire, l'épreuve à surmonter mais ne présente jamais de valeur positive en soi ; où, au contraire, l'intimité est le seul espace où authenticité, sincérité ont quelque chance de prévaloir. Ce qui offre un écho remarquable au Mon royaume n'est pas de ce monde qui ne fut pas seulement une affirmation de la divinité du Christ mais, de manière apparemment définitive la relégation du monde au rang le plus faible d'espace d'épreuve, de tentation, de séjour, certes, mais provisoire. Dans ce passage, l'exhortation à ne pas s'inquiéter de ses conditions de vie, de faire confiance, qui est après tout le premier sens de foi, renvoie à ce peu de considération que le monde antique nourrissait à l'égard du monde. Même pour des raisons différentes, le grec ne pensait pas autrement mais s'il cherchait lui aussi dans une vie intérieure, dans la méditation, quête de la sagesse un refuge que l'on retrouvera chez les stoïciens latins, le grec lui tente néanmoins d'inventer un espace public qui soit à sa portée. Mais dans les deux cas, tout ce qui vient de l'extérieur porte le sceau du danger - en tout cas de l'épreuve.

Les très peu nombreuses propositions dont on peut supposer qu'elles résument tous les préceptes et commandements spéciaux, […] prennent comme norme le soi et donc la relation de l'homme avec lui-même. Dans le contexte qui est le nôtre, peu importe si la norme est l'amour de soi, comme dans les préceptes judéo-chrétiens, ou la crainte d'avoir à se mépriser, comme chez Kant. Si nous avons été surpris, c'est parce qu'après tout, la moralité est supposée gouverner la conduite de l'homme à l'égard des autres
Arendt, p 132
C'est d'ailleurs ceci, paradoxal, que relève Arendt : alors que la morale, finalement, commence avec le rapport à l'autre, c'est pourtant dans l'approche de soi-même voire l'amour de soi qu'elle fonde ses certitudes. La vertu est une évidence qui s'impose d'elle-même dans le silence de la méditation ou de la prière ; ce sera toujours le brouhaha du monde, les trépidations de tous les affairements qui viendront nicher de l'incertitude, trouble et scrupule, où il y avait calme et évidence. Etre libre, dira Kant c'est commencer absolument une série causale, c'est donc n'être déterminé que par soi-même. Dès lors, effectivement, penchant et tentation sont équivalents qui conduisent à me soumettre à autre chose que ma volonté libre. Si l'on comprend bien, le mal est un renoncement à soi, une aliénation au sens précis d'un devenir autre, étranger à soi ; ce n'est que dans un second temps qu'il s'avère être une négation de l'autre.

Idées reçues ?

De là une triple idée qui traîne dans la pensée occidentale :

De l'évidence

Pour autant que l'époque moderne ait cru tout pouvoir jeter cul par dessus tête, et, à l'encontre des préceptes éthiques au moins autant que des leçons de la philosophie, faire l'éloge de la passion, de la jouissance, de la quête matérielle comme moteur de nos actions, il n'y a pas à s'étonner que des esprits ombrageux aient pu la considérer comme période de perdition. C'est exact, on ne peut que constater que la modernité a pris le contre-pied de son histoire - mais pas nécessairement au sens où on l'entend parfois.

Il faut bien prendre l'épisode nazi pour ce qu'il fut aussi : une déroute morale. Un épisode qui en tout cas montra combien ces trois idées étaient fausses :

Rien, aucune voix ne retint ceux qui par enthousiasme, prudence ou simple résignation suivirent le mouvement : autant dire que l'évidence du mal vola en éclat. Avouons au moins qu'elle fut rien moins qu'universelle. Si certains, dans le secret de leur conscience, comprirent le fossé immense qui tout à coup séparait le juste du légal au point de n'y pouvoir consentir, force est de constater que cette évidence se révéla sous le tour unique d'un je ne peux pas qui sauva assurément leur honneur mais les condamna presque en même temps à l'impuissance. Ce qu'il y eut de caractéristique de l'épisode nazi est bien u'il n'autoris aucune voie moyenne entre le consentement enthousiaste et le refus catégorique et illustre de manière cruelle combien cette évidence morale tient mal quand tout alentour la dénie. Qu'il s'agisse ici du point de jointure entre le principe et l'acte, entre le moral et le politique, sans doute, mais ceci nous aide-t-il ?
Les actes que j’accomplis sont toujours, en derniers ressorts, individuels, et j’en suis moralement responsable ; cela est vrai de tous mes actes, mêmes politiques et militaires. La formule “un ordre est un ordre” (Befehl ist Befehl ) ne peut jamais avoir de valeur décisive. Un crime reste un crime même s’il a été ordonné (bien que, selon le degré de danger, de coercition tyrannique et de terreur, on puisse admettre des circonstances atténuantes) ; et de même tout acte reste soumis également au jugement moral. L’instance compétente, c’est la conscience individuelle, c’est la communication avec l’ami et le prochain, avec le frère humain capable d’aimer et de s’intéresser à mon âme.
Jaspers
Que les justes effrayés de l'écart se soient mis dans la position de ne plus reconnaître la loi, en en appelant à ce que la constitution de 92, après Rousseau, avait nommé le devoir de révolte, que pour eux ce fut une évidence telle qu'elle ne se présenta pas sous la forme d'un dilemme ou d'une question mais d'une réponse péremptoire, illustre assurément ce que Jaspers écrira plus tard qui engage notre responsabilité morale : nul ne saurait jamais se réfugier derrière le paravent commode de la nécessité ou de l'ordre - Befehl ist Befehl ; pour ceux-ci il n'y avait pas de doute, aucune incertitude ; juste l'effroi que ce qui était évident pour eux ne l'était plus pour les autres.

Ce qui confirme encore une fois ce que Nietzsche avait compris : la morale est faite pour les faibles ; elle n'est contraignante que pour ceux qui sans ses règles failliraient invariablement. Pour les justes, ici, la désobéissance à la loi n'était ni un ordre moral, ni une injonction venant d'on ne sait où : une évidence simplement.

Où était la tentation ici tant ce qui se passait relevait assurément plus du repoussoir que du désirable ?

Où l'on peut considérer ce glissement sémantique de tenter sitôt qu'on le conjugue plutôt à l'actif qu'au passif. C'est alors que prévaut le sens de test, de mise à l'épreuve et dans certains cas de provocation. Qui tente, venant toujours de l'extérieur, troubler les habitudes, les certitudes, l'évidence morale, en réalité semble tester les lignes de résistance. La réalité extérieure, le politique ici, mais à l'occasion ce peut être aussi simplement le social ou léconomique, se présente à ce point comme la contradiction de ce que la conscience morale indique comme juste qu'elle ne peut que revêtir l'allure d'une provocation : à la lâcheté d'abord, se laisser faire, entraîner dans le flux du sens commun - elle équivaut alors au renoncement passif ; à la trahison, à l'autre extrême, visant à prendre le contre-pied systématique de ce que l'on tenait alors pour juste ; à l'hypocrisie consistant à ne plus se poser la question de la valeur de ses actes… Dans tous les cas, c'est la ligne qui sépare intérieur et extérieur qui est en jeu ; en péril ; dans tous les cas, consiste à faire prévaloir le point de vue de l'extérieur, du monde, de la matière. La tentation se présente ainsi comme une confrontation et donc comme un rapport de force. Entre la règle et le siècle ? Pas vraiment : entre le sentiment intérieur de ce qui est juste et la loi.

On pourra arguer qu'entre la situation d'un allemand en 1933 et celle d'un entrepreneur ou d'un salarié aujourd'hui, il n'y a aucun rapport et que c'est abuser un peu de l'argument ad hitlerum que de procéder ainsi.

Pourtant rapport il y a au moins en ce qui concerne le bafouement explicite des valeurs par le champ social. Faut-il prendre des exemples ?

Alors oui, il y a un rapport :

Il tient exactement à ce qu'Arendt nommait acosmisme. Quoiqu'il fasse, être seul, avec sa conscience ou reclus dans le rôle assigné de producteur/consommateur ; impuissant désormais à faire corps ; à reconquérir l'espace social et politique désormais dévasté par l'économique.

La tentation du Christ

voir le tableau de Botticcelli

Alors Jésus fut emmené par l'Esprit dans le désert, pour être tenté par le diable.
Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.
Le tentateur, s'étant approché, lui dit : Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains.
Jésus répondit : Il est écrit : L'homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
Le diable le transporta dans la ville sainte, le plaça sur le haut du temple,
et lui dit : Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera des ordres à ses anges à ton sujet ; Et ils te porteront sur les mains, De peur que ton pied ne heurte contre une pierre.
Jésus lui dit : Il est aussi écrit : Tu ne tenteras point le Seigneur, ton Dieu.
Le diable le transporta encore sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire,
et lui dit : Je te donnerai toutes ces choses, si tu te prosternes et m'adores.
Jésus lui dit : Retire-toi, Satan ! Car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul.
Alors le diable le laissa. Et voici, des anges vinrent auprès de Jésus, et le servaient.
Mt, 4, 1- 11
Et prend assez aisément la figure du diable. C'est évidemment le cas dans la grande confrontation du désert entre Satan et Jésus. Scène étonnante, somme toute, que celle d'un dieu dont il faudrait tester la solidité, ou plus exactement, la faillibilité tant on imagine plutôt la divinité tout d'une pièce, d'un seul tenant, éternellement présente à soi, identifiée à ses principe dont elle est en même temps l'origine et l'hypostase. Mais, après tout, n'y eut-il pas révolte des anges ? ou, pour le moins cet étonnant passage du prologue du livre de Job où le Satan se propose avec l'assentiment de Dieu de tester la foi et la fidélité de Job.

Mise à l'épreuve, tel est bien le sens souvent de ce terme (notamment dans Ps. 78:56, Ex 17:2-7, Nb. 14:22, Dt. 6:16, Is. 7:12 : mais dans chacun de ces passages, ce n'est pas Dieu qui met l'homme à l'épreuve mais bien l'inverse. Le terme prend alors le sens de révolte et souligne bien la nuque raide de ce peuple si peu enclin à se soumettre, si prompt à la rébellion.

Est-ce un hasard ? révolte, révolution mais aussi conversion, diversion, subversion participent de la même source : tourner. Il en va jusqu'à voûté comme si l'échine voûtée n'était jamais que le pendant de la nuque raide… Dans sa caverne, l'homme se retourne et s'habituant progressivement à la lumière, à coups de souffrances et d'éblouissements, parvient à s'extirper des apparences pour contempler enfin le soleil - l'Idée ; le Souverain Bien.

Tenter, au sens actif, revient ainsi à inciter l'autre au détour, au renversement. C'est bien ce que l'on observe ici tant avec l'invitation à rompre le jeûne, à sauter du haut du Temple, ou enfin à se prosterner devant lui.

Dans les trois cas, privilégier le matériel plutôt que le spirituel, l'extérieur plutôt que l'intérieur. La puissance temporelle plutôt que la vertu.

C'est pourtant la seconde qui parait la plus révélatrice, contrairement aux apparences, puisqu'elle revient - le texte l'énonce - à tenter Dieu lui-même.

Sauter du haut du Temple, pour provoquer l'intervention des anges ne signifie pas seulement tester l'immensité des pouvoirs matériels du Christ, sa capacité à produire des miracles ; ceci reviendrait à inciter Dieu à l'action, fût ce par l'intermédiaire des anges ; à aller surtout à l'encontre de ses propres lois - ici physique de ka pesanteur - et donc à se renier lui-même.

On remarquera que c'est à cette même configuration qu'il se refusera un peu plus tard lors de son arrestation : à celui qui tente de le défendre et sort son épée, il invite à la soumission - attitude qui n'est pas si éloignée de celle qu'adopta Socrate et que développe la prosopopée des lois du Criton. Le soin qu'il met à toujours se référer aux Ecritures pour attester qu'elles se confirment, attitude qui est déjà la sienne lors de la confrontation avec le diable, l'affirmation selon laquelle il est venu pour accomplir non pour abolir (Mt, 5, 17) tout ceci va dans le même sens : la fidélité au Père, à la loi, aux commandements que l'on retrouve jusque dans les prières du Mont des Oliviers (Mt, 26,39)

Et voici, un de ceux qui étaient avec Jésus étendit la main, et tira son épée ; il frappa le serviteur du souverain sacrificateur, et lui emporta l'oreille.
Alors Jésus lui dit : Remets ton épée à sa place ; car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée.
Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père, qui me donnerait à l'instant plus de douze légions d'anges ?
Mt, 26, 51-53
Oui, il pourrait invoquer une armée d'anges qui, ici l'empêcherait de tomber ; là d'être arrêté. Mais ne le fait pas.

Ce n'est pas seulement de répondre à la violence par la violence à quoi il se refuse mais qui en soi, déjà, ruinerait son message ; c'est à faire prévaloir sa propre volonté, son propre intérêt.

Satan n'est pas sot, au reste, qui ne lui suggère pas de trahir sa mission mais de la réaliser plus vite, plus aisément, en se servant des pouvoirs matériels qu'il aurait à sa disposition. C'était déjà ce à quoi l'on assista dans le Prologue du Livre de Job : ange, messager donc, il ne peut vouloir autre chose que ce que Dieu veut mais lui, autrement plus brutal, sondant les âmes et la sincérité de la foi, cherche à séparer le bon grain de l'ivraie : plonger Job dans la maladie, la pauvreté et la solitude simplement pour vérifier que tienne ou pas la ligne de défense. A Jésus il promet la puissance et la gloire, à Job, la maladie et la pauvreté extrême : autre destinataire, autre ruse mais en réalité c'est la même. Pousser à se rebeller contre Dieu, à le renier, ou bien le provoquer à agir revient ici au même. Tenter l'autre revient à mettre le Père à l'épreuve.

Ce qu'il y a d'intéressant ici revient surtout à l'inversion de perspective : nous avons l'habitude - la paresse ? - de nous poser comme victimes de tentations extérieures et si nous n'arguons plus de pressions diaboliques, ne nous manquent aucune abstraction-prétexte pour remplir ce rôle : la société ; le système ; la finance ; la mondialisation …

Les réponses faites à la tentation se ressemblent toutes finalement : toujours elle reviennent à énoncer que l'essentiel est ailleurs. Que la puissance absolue ne saurait être ni matérielle ni temporelle ; qu'elle ne saurait s'exercer pour conquérir une place ou s'assurer une prééminence ; qu'il n'est pas de révolte qui vaille contre les puissances du moment qui toutes reviendraient à une révolte contre le Père.

Assurément un tel message s'entend bien dans le contexte d'un judaïsme qui selon les textes bibliques aurait interprété son destin et la promesse à lui faite comme étant celle d'une libération contre les oppresseurs : les Égyptiens d'abord, les Romains ensuite. Que la promesse ne fût pas politique et ne se résumât ni à la sortie d'Égypte ni à la libération du joug romain, signifie-t-il pour autant un abandon total de la sphère politique aux païens ? la quête n'est-elle que spirituelle ? Toute l'histoire de la chrétienté le dément évidemment et l'instauration progressive de l'ecclesia comme Eglise universelle, en premier lieu.

Nous voici à la fois très loin et très près en même temps des temps modernes et de notre préoccupation.

Très près : quand la France de 1905 se sépare de son Église et proclame qu'elle ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte, que fait-elle d'autre, tout en inventant la laïcité, que de reléguer le religieux dans la sphère privée, dans cette intimité de la conscience dont elle a légitimité à garantir la liberté ? Dit-elle véritablement autre chose que cette invite christique d'une prière dans le silence plutôt que l'ostentation, dans le recueillement plutôt que la manifestation publique ?

Très loin : on aura beau jeu de constater que la sphère publique s'est assurée la prééminence et que la quête des biens et jouissances matérielles prévaut désormais - ce que l'hégémonie de l'économie dans la sphère des sciences humaines mais aussi dans le domaine politique attestent sans conteste. Pour autant ce serait porter bien trop courte vue : le retour au ou du religieux, que l'idéologie commune ne comprend pas et avec quoi elle ne sait que faire, le souci d'une éthique professionnelle, maintes fois répété même si souvent de manière terriblement instrumentale en disent trop long sur les bouleversements pour qu'on se puisse satisfaire de raccourcis simplificateurs.
la société de masse détruit non seulement le domaine public mais aussi le privé: elle prive les hommes non seulement de leur place dans le monde mais encore de leur foyer où ils se sentaient jadis protégés du monde, et où, au moins, même les exclus du monde pouvaient se consoler dans la chaleur du foyer et la réalité restreinte de la vie familiale.
Arendt
H Arendt
l'avait aisément repéré : ce qui se joue désormais c'est à la fois la privation de toute vie publique et l'arasement de toute vie privée : signe, s'il en fut jamais, que la question éthique n'engage pas exclusivement le privé ou le public mais engage résolument la relation entre les deux. Signe surtout que cette solitude est bi-face qui peut se révéler à la fois dévastatrice et libératrice.

D'où la distinction que fait Arendt entre solitude- qui est dialogue intérieur - esseulement - qui est ennui - et isolation.

De même qu'aujourd'hui l'Administration force ses sujets à vivre de manière administrative, de même tout se passe comme si le collectif avait réussi à rendre impossible la vie solitaire et retirée. Au moment même où la politique ne saisit plus les forces qui travaillent et transforment le collectif, la vie privée seule devient toute politique. La société ou le public poussent à vivre de façon sociale et politique, les réseaux de relation rendent impossible la vie sans relation, les vérités acquises en commun excluent celles dont l'intuition frappe soudain le chercheur isolé, l'extase du corps et de l'âme monade passent pour malade. En somme, pour le vrai, l'existant et l'heureux, l'ego vient de mourir. En le citant, nous ne parlons plus que d'une ombre témoin d'une culture disparue. Descartes mort, il nous reste à écrire : je me relie donc je suis. La relation précède toute existence.
M Serres, Hominescence
Très loin : dans la précipitation en tout cas qui est la marque de notre temps. Toujours plus vite, toujours plus gros, toujours plus efficace … ce qui apparaît autant dans nos vies privées que professionnelles. Ce que M Serres nomme la mort de l'ego. La vérité, même philosophique, émergeait de ce dialogue intérieur entre soi et soi-même qu'Arendt nomme solitude que l'on retrouve dans le poêle de Descartes ou la librairie de Montaigne. Bien sûr ceux-ci vivaient dans le monde et s'y affairèrent à la guerre ou à l'administration ; évidemment ils emportèrent du monde ce qui put les enrichir ; pour autant

S'il est une différence incontestable entre le christianisme et les religions qui l'ont précédé, elle tient bien à cette exaltation du moi intime par rapport au moi social. Ce qu'illustre parfaitement l'invite à prier à l'écart [1] Ce n'est pas tout à fait la même chose que d'en appeler à la foi de l'individu, à son engagement personnel, que d'exhorter à ce que celui-ci se soumette à la volonté du Père à l'instar de ce que fait le Fils, plutôt que d'attendre, par la pratique rituelle, l'attachement à la Cité, à la terre. La religion du Fils invente le moi, plus sûrement encore que la philosophie grecque. Evidemment, l'histoire donnera suffisamment de signes de la tendance de toute foi à s'instituer - ce que Ricœur nomme le pôle Il - et je ne connais pas de foi, si sincère soit-elle qui, ne cherchant à se répandre, ne finisse pas s'inventer les relais, institutions et assemblées qui feront d'elle une église, un pouvoir ; un contre-pouvoir. Evidemment cette Eglise le disputera en terme de puissance aux monarques puis aux Etats : faut-il rappeler le temps nécessaire pour qu'elle se résolût à accepter la République ? Pour autant voici configuration nouvelle où ce n'est plus le destin d'un peuple qui est en jeu mais le salut d'une âme qui chemine.

Autant le dire, nous avons ici le lieu de la tentation, en son cœur : il est intime et sans doute n'est-ce pas un hasard qu'elle eût lieu, à l'écart, dans le désert pour le Christ. Elle intervient au cœur même de ce dialogue intérieur qu'elle vient perturber voire empêcher. Elle est bien détour en ce qu'elle nous déporte systématiquement vers l'extérieur, vers les nécessités du monde, les arguties du siècle ; vers les choses.

Car rien, décidément, n'est plus fragile que ce moi intérieur que vient d'inventer le christianisme, comme s'il avait été bafoué sitôt que reconnu. On peut le lire avec J Ellul (le bluff technologique) avec Serres ou avec Arendt : le constat est le même, qui n'est qu'apparemment paradoxal. Ce moi est fragile qui ne peut se maintenir qu'à la double condition d'à la fois pouvoir œuvrer c'est-à-dire créer des représentations qui lui offre un monde humain à partager, et celle de pouvoir se retirer, sans necessairement s'isoler, pour n'être pas pris dans la spirale infernale de l'action et de ses contraintes spécifiques. Etre ramené à sa pure réalité physique de n'être plus considéré que comme producteur-consommateur de biens par définition périssables, ou n'être plus au monde revient au même. Comment être certain que l'invite à la prière - qui ici équivaut à celle d'un dialogue intérieur - soit encore audible aujourd'hui ? En ouvrant tout espace privé aux réseaux, la modernité sape ses propres fondamentaux : il n'est pas étonnant alors que le retour du religieux se présente comme un réflexe identitaire d'autant plus ravageur qu'il ne sait plus chanter que l'air du collectif.

M Serres voit cohabiter deux je sans trop pouvoir deviner qui des deux l'emportera sur l'autre, l'un intime sans quoi il n'est pas de création possible, l'autre, collectif grevé de bruit, de relations, de réseaux ; Arendt voit dans le processus même de la priduction même une aliénation qui laisse le travailleur Weltlos ; Ellul met en avant la vanité d'une maîtrise possible du système technicien qui obéit à ses propres contraintes. Tous pourtant disent l'impérative nécessité de lutter contre cette invasion.

Se déconnecter ? Chercher le silence ?

 

 

 

De même que Descartes, dans son poêle, doutait, ainsi je me débranche souvent. L'enseignement par les nouvelles technologies se complète donc par une pédagogie de la déconnexion et par une éthique du détachement. L'avenir appartient aux ordres contemplatifs. nous sauvera de la chute évolutive vers les sociétés d'insectes, celui qui inventera une nouvelle génération de monastères : ce mot signifie une association paradoxale de solitaires et de solidaires. Nous aurons besoin d'un Saint Benoît, d'un nouveau moi et d'autres prochains.
Serres, ibid
Je comprends mieux l'insistance sur l'observance du shabat ; mieux pourquoi aussi me révulse tant ces réformes supposées modernes visant à généraliser le travail le dimanche, l'ouverture des grandes surfaces au prétexte que ceci fût créateur d'emplois. C'était avouer, sans même honte retenue, que l'individu se résumait à sa double fonction soit de producteur soit de consommateur ou vouloir l'y restreindre ; c'était supposer que sans l'acte d'achat, la vie privée, notamment familiale ne serait que vacuité pure ! Il ne faut donc pas prendre à la légère sa présence dans la loi fondamentale [2]: cette observance est fondatrice et n'a strictement rien à voir avec un quelconque rituel social visant à souder la communauté, encore moins avec la nécessité physiologique de reproduire sa force de travail mais bien au contraire un impératif intime qui constitue la condition même de l'humain. S'il devait, à tout prendre, n'y avoir qu'une seule prescription à retenir qui concerne éminemment le champ économique et social, c'est bien celui-ci : scander ainsi le temps social et économique, c'est préserver l'espace privé.

L'évidence du juste est discutable, sans doute, en tout cas d'autant plus discutée que tout dans le champ social en dénoncerait la pratique : ménager des temps de recueillement, où, au moins, pouvoir se poser la question du sens de notre action, est une exigence pour lui laisser sa chance d'apparaître.

Enfreindre cette presciption est un délit contre l'humain ; ni plus ni moins.

Passion ou raison

Second présupposé, concernant la tentation, l'idée selon laquelle elle trouverait sa puissance dans les passions. Ici, tentation est synonyme d'attraction et passion d'impuissance à se contrôler. Que les interprétations chrétiennes, protestantes surtout, mais catholiques déjà, aient souvent voulu réduire au domaine de la sexualité ne fait pas de doute. Argent et plaisirs charnels forment ici un duo infernal et la liste même des péchés capitaux en témoigne où figurent à la fois concupiscence, avarice, envie …

Pourtant, rien de grand dans l'histoire ne s'est fait sans passion ; pourtant ce sont bien désirs et tendance qui régissent notre rapport au monde et nous incitent à agir. Pourtant, ni la passion seule ni la raison ne suffisent à expliquer comment un peuple entier succomba ainsi dans ce qu'on aimerait appeler vent de folie si l'expression n'était galvaudée et fallacieuse. La raison en tout cas n'aura pas suffi à en retenir l'élan et fut même, pour certains intellectuels, le piège même qui les empêcha de comprendre ce qui était en train de se passer.

Le vieux rêve de modérer les passions, de les tempérer, le souci du juste milieu, on le devine, est bien plus grec que chrétien, même si on le retrouve chez Pascal. Dans le christianisme, surtout primitif, l'heure n'est que rarement à la transaction ; peu à la recherche d'un point d'équilibre entre pesanteur et grâce. Résister au monde, en sortir voici l'idéal ;

Ce bien, ou en d'autres termes, la sanctification, je le divise en plusieurs degrés, pour que chacun de nous puisse y prendre part. Le premier degré, c'est la virginité conservée depuis la naissance. Le second comprend la virginité qui, depuis la seconde naissance, c'est-à-dire le baptême, nous purifie dans le mariage; d'après le consentement des deux époux, ou persévère dans le célibat par une décision volontaire. Reste un troisième degré, la monogamie, en vertu de laquelle un sexe renonce à l'autre, quand le premier mariage a été dissous par la mort. La première espèce de virginité a le bonheur d'ignorer complètement ce que plus tard on regrette d'avoir connu. La seconde dédaigne héroïquement ce qu'elle n'a que trop connu. La troisième, qui renonce au mariage une fois que l'union conjugale est rompue, outre le mérite du courage, a aussi le mérite de la modération. N'est-ce pas être modéré que de ne pas regretter ce qui nous a été enlevé, enlevé surtout par le Seigneur, sans la volonté duquel il n'est pas une feuille qui se détache de l'arbre, ni le plus humble passereau qui tombe à terre?

 

Non pour autant que la vertu soit une négation de soi (aime ton prochain comme toi-même) mais que la finalité soit l'autre.

Il y a plus : dans toutes nos représentations, plus ou moins consciemment assumée, demeure l'idée que la valeur morale nous est sinon innée en tout cas évidente.

Il s'agit encore ici d'évolution au sens biologique du terme ou d'un stade bien précis dans le processus d'hominescence. Deux périodes se succèdent dont l'une commença, sans doute, avec le christianisme., religion qui propose le salut de l'âme individuelle et donc où l'on demande la foi de la personne elle-même, ignorée des précédentes religions, toutes fondées sur la ville ou le peuple, où donc s'engage une instance nouvelle, cet ego tout justement que les Grecs ni les Latins ne connaissaient que vaguement, puisque le fameux "Connais toi toi-même" n'invite qu'à estimer ses limites. Son credo commence par ce pronom (ego) credo, non écrit. Le christianisme quitte à la fois le collectif collé par le sacré, abandonne aussi bien, l'enchantement du monde comme le démontra Auguste Comte, mais il délaisse surtout le religieux fonctionnant comme lien collectif, pour s'adresser, dès le départ, à l'âme solitaire, face à son destin et à son salut éternel.

Du coup, la mort contemporaine du je porte un coup terrible, non seulement à la culture européenne, formée à Montaigne, à Dominique, mais au christianisme, même si l'on fait semblant de croire qu'il rejoint aujourd'hui la sphère privée : non, il l'avait inventée. Les religions retournent, à l'état archaïque de ciment sociétaire, ou, plutôt, et à l'inverse, la nouvelle et puissante colle collective s'expanse en intégrismes, d'où les guerres qui les opposent, comme aux temps les plus anciens. Trop moderne face à cette étrange régression, le christianisme redevient difficile à comprendre. Comme il s'adresse à l'âme personnelle et à son destin au delà du temps, il critique de façon dévastatrice tout intégrisme entendu comme béton sociétaire. La fin du je inflige enfin une blessure peut-être mortelle à une culture dont l'universalisme doit à cette instance existentielle son rayonnement et sa créativité, pour le pire et le meilleur, jusqu'aux droits de la personne.

 

Vivre une vie entièrement privée, c'est avant tout être privé de choses essentielles à une vie véritablement humaine: être privé de la réalité qui provient de ce que l'on est vu et entendu par autrui, être privé d'une relation " objective " avec les autres, qui provient de ce que l'on est relié aux autres et séparé d'eux par l'intermédiaire d'un monde d'objets commun, être privé de la possibilité d'accomplir quelque chose de plus permanent que le vie. La privation tient de l'absence des autres; en ce qui les concerne l'homme privé n'apparaît point, c'est donc comme s'il n'existait pas. Ce qu'il fait reste sans importance, sans conséquence pour les autres, ce qui compte pour lui ne les intéresse pas.
Dans les circonstances modernes, cette privation de relations " objectives " avec autrui, d'une réalité garantie par ces relations, est devenue le phénomène de masse de la solitude qui lui donne sa forme la plus extrême et la plus antihumaine. Cette extrémité vient de ce que la société de masse détruit non seulement le domaine public mais aussi le privé: elle prive les hommes non seulement de leur place dans le monde mais encore de leur foyer où ils se sentaient jadis protégés du monde, et où, au moins, même les exclus du monde pouvaient se consoler dans la chaleur du foyer et la réalité restreinte de la vie familiale. La vie au foyer s'est épanouie en espace intérieur, privé: nous le devons à l'extraordinaire sens politique des Romains, qui contrairement aux Grecs, ne sacrifiaient jamais le privé au public et comprirent que ces deux domaines devaient coexister

Le terme grec πειρασμος a souvent dans la Bible un sens particulier, qui fait allusion au passé historique d'Israël, quand il mettait Dieu à l'épreuve (ainsi Ps. 78:56, cf. Ex 17:2-7, Nb. 14:22, Dt. 6:16, Is. 7:12 etc.). Il a alors le sens de "révolte", qui peut être préféré dans le contexte du Notre-Père, juste avant la demande d'être délivré du Mauvais, c'est-à-dire du Tentateur, qui pousse à la révolte. La demande contre la tentation revient, de ce point de vue, à demander de ne pas se trouver dans une situation de fragilité qui nous expose à la tentation du Mauvais. Toute tentation, quand elle est inspirée par le Mauvais, est donc, selon le Notre-Père, une mise à l'épreuve de Dieu

 


1) Gardez-vous de pratiquer votre justice devant les hommes, pour en être vus ; autrement, vous n'aurez point de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux.
Lors donc que tu fais l'aumône, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, afin d'être glorifiés par les hommes. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense.
Mais quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite,
afin que ton aumône se fasse en secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
Lorsque vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, qui aiment à prier debout dans les synagogues et aux coins des rues, pour être vus des hommes. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense.
Mais quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
En priant, ne multipliez pas de vaines paroles, comme les païens, qui s'imaginent qu'à force de paroles ils seront exaucés.
Mt, 6, 1-7
où l'on voit que privé s'oppose à public, intime à ostentatoire, silence à hypocrisie comme prière à révolte. Prière qui s'entend ici non pas comme sollicitation ou revendication, mais comme action de grâce, vénération, soumission.

Je tiens pour essentiel que ce soit ici dans le même passage que figurent à la fois cette invite à la discrétion humble, l'énoncé du Notre Père et l'exhortation à s'écarter des mirages de l'argent.

 

 

 

 

 

 

2) Rachi indique :

Souviens-toi (zakhor) « Souviens-toi du jour du Chabath » et « garde le jour du Chabath » (Devarim 5, 12) ont été prononcés simultanément. Il en est de même de : « Celui qui le profanera, mourir, il sera mis à mort » (infra 31, 14) et : « Et au jour du Chabath, deux agneaux » (Bamidbar 28, 9). De même : « Tu ne te vêtiras pas d’une étoffe mixte » (Devarim 22, 11) et : « Tu te feras des tresses » (Devarim 22, 12). De même : « La nudité de la femme de ton frère, tu ne la découvriras pas » (Wayiqra 18, 16) et : « Son beau-frère viendra sur elle » (Devarim 25, 5). Comme l’écrit le verset : « Eloqim a parlé une seule fois, j’en ai entendu deux » (Tehilim 62, 12). Le mot zakhor (« souviens-toi ») est à l’infinitif, comme dans : « Mangeons (akhol) et buvons (wechatho), car demain nous mourrons » (Yecha’ya 22, 13), « Son mari alla avec elle, allant (halokh) et pleurant (ouvakho) derrière elle » (II Chemouel 3, 16). Le mot zakhor signifie : Appliquez-vous à vous souvenir toujours du jour du Chabath, de telle manière que s’il vous advient un bel objet, vous le mettrez de côté pour Chabath (Beitsa 16a).