Bloc-Notes
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Histoires d'amalgames, de confusionnisme ; de malhonnêteté ?

De l'amalgame en 5 étapes
1 Terreur terrorisme 2 Histoire de tolérance ? 3 Brouillage idéologique
ou le confusionnisme d'Onfray
4 Retour aux mots 5 Idéal idéologie

 

Terreur ... terrorisme

L'horreur n'était pas suffisante ; il fallait encore lui ajouter l'indignité. Il ne faut jamais très longtemps pour qu'ici et là on aille rappeler que la terreur fut inventée en 93 par Robespierre et qu'elle constitue la part d'ombre de la mythologie républicaine. La manœuvre est connue, éculée ; n'en cesse pas moins de resurgir non sans quelque efficacité. Hommes de gauche, vous êtes les pères putatifs de ces terroristes-ci, involontaires peut-être, naïfs sans doute, dans le meilleur des cas, sournois et ivres de pouvoir dans le pire, mais vous en êtes l'incontestable origine.

Rien à cet égard n'est plus révélateur dans notre iconographie imaginaire que ce duel Danton/Robespierre que Lorenzi en son temps avait dénommé la Terreur et la Vertu. D'un côté l'homme aimable, épris de plaisirs et de vie, prompt aux compromis et parfois aux compromissions, joliment soupçonné de débauches en tout cas de corruption ; de l'autre l'intègre par excellence, celui que l'on nomme l'incorruptible, fidèle d'entre les fidèles, à une idée, à un idéal et prêt à lui sacrifier beaucoup ; tout.

L'image est sans doute fausse ! trop caricaturale, trop manichéenne pour ne pas receler sa part d'hyperbole. Une opposition que l'on retrouvera pourtant tout au long de notre histoire d'entre ceux qui trouveront toujours qu'on est allé trop loin, que la révolution est finie (Mirabeau, La Fayette...) qu'il faut savoir l'achever et ceux pour qui elle ne ferait que commencer (les jacobins ) ; que l'on retrouvera dans les premières années de la République d'entre les opportunistes à la Ferry et les radicaux à la Clemenceau (première manière) ; ou en 17 entre les menchevicks et les bolchevicks, ou encore à Tours où un Blum fidèle à un socialisme républicain se propose de garder la vieille maison en attendant que s'achève l'aventure communiste ...

Nous sommes convaincus, jusqu'au fond de nous­-mêmes que, pendant que vous irez courir l'aventure, il faut que quelqu'un reste garder la vieille maison. (...)
Dans cette heure qui, pour nous tous, est une· heure d'anxiété tragique, n'ajoutons pas encore cela à notre douleur et à nos. craintes. Sachons nous abstenir des mots qui blessent, qui déchirent, des actes qui lèsent, de tout ce qui serait déchirement fratricide. Je vous dis cela parce que c'est sans doute la dernière fois que je m'adresse à beaucoup d'entre vous et parce qu'il faut pourtant que cela soit dit. Les uns et les autres, même séparés, restons des socialistes; malgré tout, restons des frères, des frères qu'aura séparés une querelle cruelle, mais une querelle de famille, et qu'un foyer commun pourra encore· réunir.
Blum, Tours p 274 et sq

Blum eut beau espérer que l'irréparable ne fût pas commis, que invectives, ni insultes ne rendissent demain la réconciliation impossible, l'histoire montrera, de la stratégie de front de classe de l'entre-deux-guerres aux insultes des années 47-48 (social-traître ; hyène dactylographe ou chacal puant ...) combien c'était là vœux pieux ... Robespierre, tout opposé à la peine de mort qu'il fut, votera la mort de Danton, de Camille Desmoulins ... L'idéal, ou l'idée, prime sur le fait, les liens ou tout simplement l'humanité. Est-ce ceci qu'à droite on nomme paresseusement idéologie (cf Guaino) où l'on affecte de considérer le pire des maux ? Mais c'est tellement oublier que même le pragmatisme ou le réalisme dont ceux-là se targuent est lui-même déjà une idéologise. Est-elle ici la limite qui sépare le politique de la force ? le dialogue de la terreur ? la normalité républicaine de la pathologie terroriste ?

Celui qui crève d'idéal est-il décidément un ennemi ? invariablement ? au risque de sombrer dans le scepticisme radical ou pire encore dans le relativisme ?