Chronique du quinquennat

Impuissance ?

A lire les titres de la presse, c'est bien le mot qui vient à l'esprit.

Des taux d'intérêts qui s'envolent, une Espagne à la peine en attendant l'Italie et la France ; une bourse bien peu vaillante, nerveuse en tout cas ... et des politiques qui font se succéder plans d'austérité qui ne disent pas leur nom à mesures drastiques sans donner jamais l'impression d'avoir la situation en main. Perspectives économiques affligeantes selon l'OFCE ! Bref quelque chose comme un piège qui se referme d'autant plus douloureux que la campagne électorale avait donné l'illusion qu'une alternative même modeste se dessinait.

L'impuissance qu'est-ce donc sinon cette situation étrange où; quoique l'on fasse, rien ne s'ensuit ? On peut y déceler la responsabilité des politiques en les trouvant faibles ou désinvoltes : c'est le cas de l'édito du Monde 1 On peut aussi y suspecter une situation qui vous échappe comme si les événements enroulaient désormais leurs propres effets sans barguigner avec la précision d'une minuterie qu'on ne saurait plus arrêter ou que l'on fût en train de redonner corps à la fable de l'apprenti-sorcier.

Chronique d'un désastre annoncé, chronomètre enclenché que plus personne ne peut arrêter ? Sans céder ni à la panique ni au catastrophisme, force est pourtant de constater que l'ambiance distillée par la presse - et par l'actualité - suscite plus de morosité que d'enthousiasme ; plus de craintes que d'espérances. Tout a l'air de se passer comme si, dans la réaction classique de qui se recroqueville pour parer les coups, le monde impavide se préparait à assister à son propre désastre.

Ambiance délétère qui ne laissera pas le politique intact - voire l'emportera - s'il n'est pas capable demain de dessiner des horizons sinon enchanteurs, au moins ouverts. C'est ici tout le challenge de Hollande et des autres ...

Il y a quelque chose comme la noirceur de la veillée d'armes .... Et même si l'histoire ne se répète jamais, il y a plus d'analogies avec les années trente qu'on ne veut bien l'admettre.

Et ce n'est guère réjouissant .....


 


*Urgence économique, désinvolture politique
Edito du Monde du 26/07/12

En principe, tout avait été calé pour quelques mois de répit sur le front de l'euro. Il faut déchanter. L'été est meurtrier. Marchés boursiers à la baisse un peu partout, taux prohibitifs sur les bons du Trésor italiens et espagnols, pour ne pas parler de l'impossible cas grec - l'ensemble sur fond de quasi-récession.

On était pourtant sorti quelque peu requinqué du sommet européen de la fin juin. On semblait être enfin dans la bonne direction. On s'était repris à espérer dans les mérites d'un traitement qui semblait correspondre à l'urgence de la situation et aux nécessités du long terme.

Les dix-sept membres de la zone euro décidaient d'aider l'Espagne à recapitaliser ses banques. Ils mettaient jusqu'à 100 milliards d'euros à la disposition de Madrid. Il semblait convenu que cette somme pourrait être directement mise à la disposition des établissements financiers concernés. Ainsi, contournant l'Etat espagnol, elle ne viendrait pas ajouter à la dette publique du pays.

Les dix-sept finalisaient encore l'adoption de leur nouveau pare-feu financier, le Mécanisme européen de stabilité (MES) - une sorte de Fonds monétaire de la zone euro. Enfin, ils confirmaient leur intention d'aller résolument vers une union bancaire et budgétaire des plus étroites.

On avait cru pouvoir exprimer un peu d'optimisme. C'était compter sans les gouvernants de la zone euro, leur désinvolture, leur irresponsabilité. A peine sortis du sommet, ils se disputaient déjà sur son interprétation. On ne sait toujours pas si l'aide à Madrid transitera ou non par l'Etat.

On croyait être dans l'urgence, dans un monde où les marchés réagissent à la nanoseconde... Naïveté là encore. On n'a vu nulle part que les dix-sept éprouvaient le besoin de soumettre leurs décisions de la fin juin à des procédures exceptionnelles. Ils ont le temps, voyez-vous.

Les juges de la Cour suprême allemande prendront leurs vacances : ils ont reporté à septembre l'approbation constitutionnelle du MES. Rien ne presse.

Cette semaine, le gouvernement grec était convaincu que le président de la Commission, José Manuel Barroso, lui rendait visite mercredi, alors que ce dernier avait prévu de se rendre à Athènes jeudi... Quelle importance ?

Les marchés, eux, n'ont pas attendu. Ils jugent l'euro à l'aune de la pusillanimité des dix-sept. Car ceux-là sont incapables de créer un climat de confiance. Ils sont inaptes à parler d'une seule voix. Ils ne savent pas orchestrer leurs lendemains de sommets. Ils ne donnent jamais l'impression d'avoir la même conception de l'euro et de son avenir. C'est la cacophonie là où il faudrait le sentiment d'une direction ferme.

Devant le désastre de l'évolution des coûts des dettes espagnole et italienne, on se retourne vers la Banque centrale européenne. Elle finira par venir à l'aide de Rome et de Madrid. Mais son président, Mario Draghi, a mille fois raison quand il dresse lui aussi ce constat : les dix-sept ne font pas leur travail. Quel que soit le jour de la semaine !

 

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