Il y a 100 ans ....

« En Allemagne, la Grande Guerre n’est pas une notion fondamentale à acquérir »

Fritz Schäffer, lycée d'Ingolstadt, Haute-Bavière :

Quel que soit le sujet traité en cours d'histoire, on se demande bien entendu si tel ou tel événement n'est pas trop abstrait pour les jeunes de notre époque. En ce qui concerne la première guerre mondiale, il existe tout de même un intérêt pour les conséquences concrètes de la guerre – par exemple l'intervention de la technologie dans la manière de tuer. A Ingolstadt, nous avons aussi la possibilité de visiter le Musée bavarois de l'armée. Une exposition permanente y montre la vie quotidienne sur le front ou les privations subies par les familles à l'arrière ; là, en général, on parvient tout à fait à intéresser les jeunes. On y a reconstitué des tranchées, on peut y soupeser des sacs à dos de combattants. Mais l'enseignement est beaucoup plus difficile pour ce qui concerne les aspects abstraits de la guerre mondiale.

La première guerre mondiale n'est qu'un sujet parmi beaucoup d'autres dans le cours d'histoire. En huitième année [l'équivalent de la classe de 3e en France], on prévoit une quinzaine d'heures pour étudier le thème « Impérialisme et première guerre mondiale ». En règle générale, dans les lycées bavarois, les professeurs d'histoire en consacrent une bonne moitié à la première guerre mondiale.

Sur la totalité des études, le sujet a même tout récemment perdu de son importance : dans le nouveau programme du deuxième degré de l'enseignement secondaire, contrairement à ce qui se passait auparavant, la première guerre mondiale n'est plus traitée. Il est vrai que la seconde guerre mondiale ne fait pas l'objet d'un traitement beaucoup plus généreux ; le complexe thématique du national-socialisme apparaît cependant encore deux fois sur le chemin du baccalauréat. On traite de manière explicite la chute de la République de Weimar et la prise du pouvoir par les nazis, ainsi que l'extermination des juifs sous le IIIe Reich.

D'une manière générale, nos programmes historiques ne sont pas très détaillés pour ce qui concerne le nombre d'heures exact consacré à chaque sujet. Pour la première guerre mondiale, par exemple, on évoque des blocs thématiques grossièrement dessinés, comme « La nouvelle dimension de la guerre : guerre de positions, bataille de matériels et effets sur la population civile ». C'est aux enseignants qu'il revient de choisir les points sur lesquels ils mettent l'accent dans leur cours – mais aussi dans quelle mesure ils traitent, par exemple, les événements survenus sur le front. L'unique notion fondamentale qui doit absolument être acquise est le traité de Versailles. Quand on songe que, par exemple, la Bulle d'or de 1356 est classée notion fondamentale, mais pas la première guerre mondiale, il y a de quoi s'étonner un peu...

Beaucoup d'élèves ne sont pas conscients de la césure qu'ont constituée dans l'histoire du monde l'entrée en guerre des Etats-Unis et la Révolution d'octobre en Russie.

Il faut bien comprendre : ce sont des élèves de 14 ans. On peut bien entendu leur faire apprendre des connaissances par cœur, mais se débrouiller pour que les jeunes comprennent les choses est un défi beaucoup plus difficile à relever. Ici, on manque aussi de temps pour approfondir ces sujets. Et au total, le traitement du national-socialisme chez les jeunes suscite un bien plus grand intérêt que celui de la première guerre mondiale.