Chronique d'un temps si lourd
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Manifs ....

Effet de circonstance ou bien plus douloureusement retour inexorable d'un refoulé qu'on avait cru pouvoir oublier ? Toujours est-il que les revoici ces hordes de familles bien sous tout rapport, de mères si pénétrées de conviction qu'elles en balaient toute objection et brandissent leurs marmailles comme autant de reproches vivants ...

On les avait vues déjà ce printemps à l'occasion du mariage pour tous improbablement réunies autour de l'inénarrable figure de Frigide Barjot n'hésiter pas à se tromper de combat, non plus qu'à se mêler à des troupes d'extrême-droite fielleuses et haineuses, non plus qu'à laisser filer ça et là ce racisme (1) qui déshonore toute cause.

Quarante ans après la loi sur l'avortement si brillamment portée par une S Veil qui n'en revint pas des horreurs, insultes et amalgames portés par son propre camp, profitant de la situation espagnole et du soutien du pape, les voici battant le pavé pour nous rappeler à nos devoirs, à leurs valeurs.

Quarante ans ! La France d'alors s'essayait à une modernité qui allait bientôt ne plus lui suffire au moment même, mais le savait-elle vraiment, où débutait un cycle encore inachevé de crises qui lui ferait prendre le deuil de ces années insouciantes et si prometteuses de l'après-guerre. Un Giscard qui voulait rompre avec la roideur gaullienne et entamait son mandat par le meilleur des réformes dites de société (majorité à 18 ans ; loi sur l'avortement ) avant de s'engluer définitivement dans un économisme dont il ne sortirait plus.

Je peux comprendre les réticences qu'une foi religieuse peut inspirer devant l'avortement ; moins devant la contraception. Je ne comprendrai jamais - ou je comprends trop ? - l'acharnement mis à combattre des lois qui, après tout portent liberté mais pas obligation. Il y a derrière tout ceci, sous l'obsession à défendre prétendument la vie sous toute ses formes, une propension à prendre le pouvoir sur l'intime.

Il n'y va de rien d'autre.

La répulsion si caractéristique de l'extrême-droite face à l'homosexualité, que tout psychanalyste interpréterait goulûment, le devoir frénétique et hyperbolique d'enfant sont manifestations claires de cet affairement douteux à vouloir ériger sexualité et vie privée en espaces surdéterminés par le devoir.

Ah prendre le pouvoir sur les âmes ! Le prêtre n'est jamais loin ; le tyran non plus. Cette collusion est fatale qui jette sans qu'elles y puissent mais à moins qu'elles n'y consentent secrètement, qui jette ses mères si aimablement bourgeoises dans les bras empressés de la racaille fasciste. Décidément les églises savent mal choisir leurs soutiens, leurs alliés !

Ultime soubresaut d'une frange intempestive ou lente résurgence d'une réaction d'autant plus violente que la crise aura brisé bien des repères ?

Quand même, après l'ignoble offensive contre Taubira, les horreurs de Dieudonné et Soral, cela fait beaucoup en quelques mois.

Serait-ce que la campagne si droitière de Sarkozy aurait laissé des traces ? réveillé la bête immonde ?

 


1) ce que nous en écrivions :

mariage

horreurs

excuses