palimpseste Chroniques

Mariage ?

dans les années 70La grande journée de la droite décomplexée, de l'extrême-droite et de tout ce que ce pays peut compter de réactionnaires de tout poil .... L'alliance objective entre chrétiens intégristes, pétainistes nostalgiques et extrême droite n'est pas nouvelle : elle est même à l'origine du FN, on l'a vu . La chose n'est même pas insolite : on l'avait déjà vue en 84 dans la grande offensive pour l'école libre qui fit reculer Mitterrand ; on l'aura revue sous Jospin à l'occasion du vote du PACS.

Ce serait presque amusant si n'était ....

Sinistre

Cette tentative par Copé, notamment, de se refaire une virginité à cette occasion. La presse le repère assez bien : non pas un mais trois cortèges qui iront des homophobes patentés, aux intégristes douteux en passant par une hiérarchie catholique qui ne peut pas ne pas être là mais sent qu'elle y a des alliés gênants.

Révélatrice

Cette double fixation sur la famille et l'homosexualié. Quoique avec de substantiels changements, la famille demeure pour beaucoup l'ultime îlot d'ordre dans le tourbillon de la modernité. A préserver donc coûte que coûte ! Signe, s'il en était nécessaire, combien la grande invention paulinienne de l'individu, ne fait que commencer, jusque et y compris dans le monde chrétien, et qu'à la responsabilité de la conscience libre et engagée, d'aucuns préféreront toujours la nécessaire soumission, subordination - en tout cas pieuse obéissance. De ce côté-ci, la cellule de la société ne saurait être que la famille et l'espace ainsi dessiné, qui échappe au public, pour s'affirmer privé, demeure à la fois celui sur quoi le pouvoir ne doit jamais pouvoir légiférer sous peine d'empiétement tyrannique et la frontière à ne pas franchir, où la démocratie ne saurait avoir de sens. Que ce soit la métaphore biologique ou simplement logique, ce n'est jamais impunément que l'on érige la famille en cellule ou en élément premier de la société : derrière s'y nichent non seulement la pulsion conservatrice, ce qui ne serait pas bien grave, mais surtout une logique de soumission prompte à justifier tous les autoritarismes, patriarcats et autre disqualification des femmes.

Il y aura toujours quelque chose de pathétique dans cette obsession à vouloir considérer mariage et reproduction, puisque dans la tête de ces gens-là les deux sont intimement liés, comme des réalités naturelles qu'on ne saurait modifier sans tout altérer. Signe assurément de ce besoin de repères d'autant plus tonitruant que le monde change à vitesse épuisante ! mais quand même signe d'une frilosité d'autant plus pernicieuse qu'elle n'a rien à revendiquer d'autre que le maintien en l'état ; que le rejet de toute histoire.

Comme en passant ....

De mas, mari, mais mâle d'abord, le mariage vieille institution certes porte jusque dans ses origines la sceau du patriarcat. Il est vrai qu'il participe trop des structures élémentaires pour ne pas susciter des réactions outrancières. Décidément ! mais, dans une époque où l'on meurt à plus de quatre-vingt ans, qu'a encore de commun un mariage de plus de 50 années avec celui d'autrefois ?

S'y greffent des réalités aussi essentielles et ambivalentes que l'amour, la fidélité, l'engagement même s'il est aussi un de ces modes de transmission par quoi toute société se définit. Sur le sujet j'aurais - et de loin - préféré entendre quelques réflexions sagaces sur la rencontre de l'autre, sur l'étonnante difficulté où nous sommes de parvenir encore à faire corps durablement, sur cette part d'irrationalité qui nous définit et nous meut, sur le dilemme où il nous tiraillé constamment d'entre les plus nobles passions et les pulsions les plus bestiales, sur ce prix précieux de lumière qui se paie de tant d'ombre ...Au lieu de ceci, l'itération lancinante de la norme ...

L'Eglise décidément demeure ce qu'elle fut toujours : moins une assemblée que l'institution d'un ordre intérieur. Elle aura abandonné au politique l'espace public : elle ne saurait sans risquer de disparaître abandonner l'espace intérieur, privé, intime. L'Eglise a la main sur l'âme : elle ne saurait l'abandonner. Elle encourt constamment l'incroyable paradoxe d'en appeler à l'esprit mais de toujours focaliser son attention sur le corps. Elle a beau ne parler que d'amour, elle s'enivre de sexualité. Le discours du corps lui est étranger et, pourtant, elle ne reconnaît que lui, pour le brider ou magnifier, qu'importe ! L'église aime l'ombre pour se croire rai de lumière ; aime les corps en souffrance, purulents et grabataires ; là, elle est à son affaire. N'aime tant le corps que pour le nier, l'amour que pour le brider.

Il m'est arrivé de penser quelque fois que si d'aventure devait exister un Dieu, je préférerais qu'il eût à se préoccuper de nos âmes plutôt que de nos corps et ne saurais oublier le il y a plusieurs demeures dans la maison de mon père qui résonne décidément plus que cet incroyable discours de fermeture que l'on aura entendu à cette occasion.

La gauche s'honore d'ouvrir le terrain : elle aurait pu le faire, avec un peu plus de courage et ce dès 97 où, avec le PACS, elle s'arrêta au milieu du gué. Après tout, la voici se forgeant l'allure réformatrice à peu de frais comme si cet État impécunieux n'avait plus la main que sur ce type de questions.

Que décidément ce pays est étonnant : à la traîne si souvent, rigide si aisément, et ici notamment ; mais capable d'un même tenant de grandes impatiences et de saintes colères ! S'il est encore vivant, il laissera bien demain sourdre celles-ci. En attendant, il faut être bien aveugle pour ne pas considérer combien, loin d'être des décisions politiques ou des lois, ce sont les mutations sociales qui auront profondément bouleversé nos fondamentaux et, en particulier, la famille. Il n'est pas si loin que cela le temps où l'on regardait avec suspicion, dégoût et condamnation avide, la jeune femme enceinte sans être mariée ; pas si loin que cela celui où la femme divorcée était réduite en un tacite bannissement ... et il suffit de relire Mauriac pour comprendre combien le souci des familles étaient moins les habitudes que Monsieur pouvait avoir à la grande ville que les éventuelles tares ou secrets que la jeune promise pouvait éventuellement cacher. Pas si loin non plus le temps (1981) où une enquête révélait que la majorité de l'électorat était disposé à voter contre son camp si d'aventure le candidat était soit une femme soit un juif ! Depuis, Paris s'est donné à deux reprises un maire homosexuel sans ce que ceci ne fasse la Une ou n'émeuve en quoi que ce soit ; le PS se sera donné une candidate en 2007 ; et se seront succédé deux présidents l'un divorcé et divorçant et se remariant durant son mandat ; l'autre pas même marié ! Tout laisse à penser que ce combat est d'arrière-garde et que peut-être l'électorat s'en moque, n'y voit pas un enjeu essentiel.

Bouteille à moitié vide ou pleine ? C'est vrai, on peut y voir aussi les prémisses de la montée des extrêmes

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