palimpseste Chroniques

Le rapport Jospin

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Comme prévu la Commission a terminé ses travaux pour cette mi-novembre. Il s'agissait, comme le soulignait la lettre de mission et l'intitulé même de la Commission de permettre le renouveau de la vie politique et d'en définir la déontologie. Comme inévitable, des commentaires opposés : les uns estimant que la commission était allée trop loin ; d'autres, pas assez.

Trois choses sont frappantes :

- l'intention ferme de suivre les recommandations de la Commission, comme ce fut déjà le cas pour le rapport Gallois. Le temps semble loin - ou est-ce une illusion ? - où l'on créait une commission précisément pour enterrer un problème. Qu'un exécutif s'entoure de conseils de spécialistes avant de prendre ses décisions est de bonne facture démocratique même si, en l'occurrence, il était plutôt de tradition républicaine et parlementaire, de laisser les Assemblées elles-mêmes décider de leur destin, règlements et autres procédures, au nom même de la séparation des pouvoirs. Ici, Jospin lui-même mis à part, et Bachelot, qui vient de se retirer de toute vie politique, seuls à avoir été au gouvernement, tous les autres membres sont des enseignants, des juristes ou des hauts-fonctionnaires. Ceci est justifié par l'exigence d'impartialité mais agace notoirement les parlementaires, directement concernés.

- le côté finalement très convenu et prévu de longue date des propositions faites qui toutes ou presque figuraient déjà dans le programme de Hollande de ce printemps comme si la formation de cette Commission n'avait été qu'une parade ou un aimable prétexte. Comme d'habitude d'ailleurs, et ce fut le cas quelques jours plus tôt avec le rapport Gallois, la presse en avait déjà annoncé la teneur avant même qu'il ne fût remis à son destinataire. O tempora, o mores !

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- la présence en fin de rapport de deux positions personnelles - comme pour mieux marquer que le consensus ne fut pas véritablement atteint - celle de D Rousseau et JC Casanova qui tous deux estiment sans s'opposer à ce qui fut proposé, estiment qu'on ne sera pas allé assez loin. C'est bien ce qui frappe d'ailleurs dans les réactions de la presse qui pour partie évoque un big bang pour l'autre, un coup d'épée dans l'eau voire une petite vengeance personnelle de Jospin à l'endroit du Sénat (Figaro) .

A bien y regarder, si on peut effectivement estimer que chacune de ces mesures va dans le bon sens - et comment ne pas apprécier les propositions sur le statut pénal du président de la République ? - on peut néanmoins regretter que la Commission n'a pas remis en question la large concentration des pouvoirs aux mains de l'exécutif, concentration aggravée encore par l'institution du quinquennat. Or c'est la nature du régime qui a été bouleversée par le quinquennat et l'on ne sache pas que le saupoudrage de quelques mesurettes autour du renforcement du Parlement soit de nature à rien bouleverser en la matière.

Travail de synthèse, bien à la manière de Hollande et de Jospin, mais peu propice à une reparlementarisation du régime. Comme si l'on n'était jamais farouche partisan du parlementarisme que dans l'opposition. Il faut dire que l'exemple vient de loin : Mitterrand lui-même qui, après avoir dénoncé le régime et suggéré qu'il était dangereux avant lui et le redeviendrait après lui, n'a rien fait pour le rééquilibrage des pouvoirs ni entre la présidence et Matignon, ni entre l'exécutif et le législatif.

Seule petite lueur au tableau, les foucades du Front de Gauche et des écologistes qui, par deux fois, ont permis de recaler un projet de loi au Sénat - preuve s'il en est que d'avoir la majorité ne signifie pas nécessairement - et surtout pas à gauche - avoir une majorité servile ou godillot.

Reste la question morale ! Ce qui est une autre façon de suggérer que plus il y a concentration des pouvoirs, plus il y a risque de corruption ! Mais alors, que tout ceci est léger ! et ressemble plus au gage que l'on concède au temps et à l'opinion publique qu'à une réelle réflexion et à un combat que l'on se propose de mener avec détermination.

Au fond, à la fois la dureté de la crise qui en appelle logiquement à un pouvoir fort, et, d'un autre côté, le contre-exemple de la IVe, font que nul ne se sent plus désormais le courage d'une profonde réforme constitutionnelle : nous voici englués dans la Ve jusqu'à satiété de peur de courir l'aventure.

Ah Montebourg, qu'elle est loin ta VIe République !

 

 

 

 

 


1)1 lire le rapport

2) ITV de Jospin sur Europe 1