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Que faire ?

La question, presque logique, que suscita mon précédent billet ! Je pourrais faire le coup de l'éthique de conviction vs l'éthique de responsabilité mais à quoi bon ? Je n'ignore pas combien rares sont nos actions qui s'appuient sur une connaissance rigoureuse : c'est au reste le grand rêve technocrate que de rabattre le corps social (économie + politique) sur un corps de savoirs restreints duquel il n'y eût plus qu'à extirper quelques recettes toutes préparées vous garantissant à tout coup succès. Jamais les choses ne se passent ainsi et c'est crime, en tout cas malhonnêteté de nous le faire accroire. L'humanité au long de son histoire s'est le plus souvent trouvée confrontée à des problèmes qu'elle ne savait résoudre et pour quoi il lui fallut inventer une réponse hasardée, ou comme l'affirme Comte une théorie quelconque.

Je n'ai pas de réponse.

En aurais-je que ceci signifierait qu'une physique sociale serait possible et qu'un déterminisme universel régenterait les comportements - ce que même les sciences dures ne prétendent plus. Ici encore il faut écouter Comte qui, comme souvent, avoue par maladresse, ce que d'autres prudemment taisent : il n'y a pas de liberté de conscience en physique ! Oui ces cauchemars scientistes ne seront jamais que des offenses à peine camouflées à notre liberté.

Je n'ai pas de réponse et préfère ne pas en avoir.

Mais, précisément je ne suis pas au pouvoir et n'en détiens aucun. La clé est ici : qui a le pouvoir est bien contraint par sa position de prendre une décision.

A-t-on assez dit que l'action, en définitive, est une passion ?

Je vois tout au plus ce qui se trame et m'apparaît le contraire du souhaitable :

S Wahnich, décidément sagace, l'a vu : savons-nous encore faire corps autrement que pour cette réaction grégaire de bétail affolé ? C'est pourtant bien de ceci dont il s'agit. Nos antiennes modernistes ont laissé se déliter le lien social et l'équilibre depuis la promotion de notre individualité tant nécessaire n'a pas été trouvé encore. Tout y semble réseau ; rien n'y est encore lien. Tout nous raccorde mais rien pourtant de nous y parle. Condamnés jusqu'au délire à la performance et à la concurrence, ivres d'une liberté qui ne se conjugue qu'en jouissances éphémères, non, décidément, nous ne savons plus faire corps ; plus faire société. Sans doute parce que nous ne tentons plus que d'avoir prise sur les choses ; que nos gouvernails ne pointent que vers les marchandises. Si loin de l'homme.

Je ne crois pas beaucoup me tromper en disant que nous ressemblons à nos ennemis : nous ne sommes guère plus humanistes que nos adversaires ! De la flexibilité à la performance ; des moindres droits sociaux désormais présentés comme des charges insoutenables à la production en masse de travailleurs inutiles de quoi la modernité s'est fait la spécialité, tout converge vers l'oubli de l'humain.

C'est pourtant lui qu'il importe de soigner ; qui est notre seul poids, notre seule espérance.

Oui Wahnich a raison : comprendre ce que faire société signifie, qui n'a rien à voir ni avec les racines, ni avec les identités, ni avec la langue, ni avec l'histoire mais avec ce que les anciens nommait stéréo : cet espace précis, à la fois intime et ouvert où solidité rime avec solidarité.