Chronique du quinquennat

Détestable, l'image de l'écologie ?

Il fallait s'y attendre : la nomination de Batho à l'écologie fait grincer des dents et, pour une fois, Placé et Cohn Bendit semblent sur la même ligne. Placé y voit une éviction et «un drôle de message» envoyé aux écologiste. Et s'interrogé sur le sens «du signal envoyé par rapport à l'éviction de Nicole Bricq qui avait très bien démarré»

On pourrait y voir l'insondable ingratitude du politique : il faut dire que Placé aura plutôt bien négocié l'accord avec le PS qui lui aura garanti un nombre de députés bien au delà de son score aux Présidentielles ; un accord qui aura servi à tout le monde puisqu'il permet en même temps à Hollande de paraître ne pas laisser se former un gouvernement monocolore même si au fond il l'est.

Il faut y voir l'ambiguïté d'EELV qui apparaît finalement beaucoup plus soucieuse de places que de faire valoir son programme et à qui, en fin de compte, Hollande aura fait avaler son chapeau sur la question du nucléaire ! C'est un peu ce que l'iconoclaste Cohn-Bendit avoue à mot cru en reprochant à Placé d'être trop occupé (...) à trouver un ministère.

On existe à l'Assemblée, au Sénat et au gouvernement, mais plus dans la société. Nos succès institutionnels ne sont pas accompagnés, bien au contraire, d'une dynamique citoyenne. Notre image est devenue détestable. Nous avons échoué là où on voulait redonner espoir en faisant de la politique autrement. Aujourd'hui, nous incarnons souvent l'insoutenable légèreté de l'arrivisme

Bigre ! et quand il ajoute à propos de Duflot

Quand on la voit par exemple, dans un documentaire, brandir son stylo en jurant qu'elle ne signera jamais un accord avec le PS sans la sortie du nucléaire, et qu'évidemment on le signe quand même car c'est un bon accord, cela est dévastateur.

force est d'avouer qu'en plus de la suspicion d'être capable de vendre son âme au diable pour un poste, Cohn Bendit pointe où cela sans doute fait le plus mal : l'incroyable écart demeurant entre l'audience des Verts dans le pays et la place qu'ils occupent désormais dans l'appareil institutionnel. En bon franc-tireur agaçant qu'il sait être, Cohn Bendit comme souvent dans ces cas-là, tire à la fois contre son propre camp et suggère l'essentiel.

- l'écologie politique est en crise qui n'a pas su encore inséminer les différents programmes politiques : nous en sommes restés à une inflexion verte mais confidentielle de nos programmes ; certainement pas encore au bouleversement complet de nos modèles de développement. Et rien jusqu'à présent, ni de leur programme, ni de leur pratique politique, ni même de leur participation ministérielle antérieure (sous Jospin) ne laisse présager qu'ils en soient capables, ni même qu'ils en aient réellement envie. Au fond dans ce camp-ci on croit bien retrouver les doubles stigmates, pour les uns de l'arrivisme ; pour les autres du dogmatisme. Rien de bien affriolant.

- Ils sont en train de rater l'essentiel de l'inversion sociale : au même titre qu'Internet et plus généralement des nouvelles technologies, l'effort vert ne passera pas par de grands réseaux centralisés ; ne viendra pas du sommet, mais s'insinuera vraisemblablement plutôt à partir de la multitude d'initiatives individuelles - ce qu'illustre parfaitement le mécanisme des panneaux solaires qui fait de chacun de nous potentiellement à la fois des producteurs et des consommateurs dans un réseau en étoile. La défection de cette base, l'incapacité qu'ont les Verts de faire de la politique autrement et d'introduire une manière plus citoyenne, participative, de prendre sa part dans les mutations à venir, risque bien de les condamner à devenir demain un parti comme les autres.

Dommage.


 


 

 

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