Elysées 2012

Posture

Par PAUL QUINIO

 

Le dilemme est classique pour les présidents candidats à leur propre succession. Mais il prend avec Nicolas Sarkozy une dimension personnelle particulière. Giscard, Mitterrand, Chirac se sont, avec des fortunes diverses, interrogés sur la meilleure manière de porter cette double casquette. Tous les trois, chacun avec son style, ont opté pour la posture du sage au-dessus de la mêlée, père de la nation plus que représentant d’un camp, davantage président qui rassemble que candidat qui exacerbe les clivages. Les entourages du chef de l’Etat incarnent jusqu’à la caricature ce choix stratégique que Sarkozy devra faire d’ici quelques semaines. L’embellie qu’il connaît dans les enquêtes d’opinion s’explique par la stature présidentielle que la crise lui a enfin permis d’endosser, argumente une partie de ses proches : les Français reconnaissent qu’il a su tenir la barre par gros temps européen. Et ce sentiment a été renforcé par l’amateurisme des premiers pas de la campagne de François Hollande.
Mais d’autres amis lui suggèrent de cliver sans rechigner à donner un coup de barre à droite. La situation est piquante. Après la désastreuse option bling-bling, après le choix assumé - par refus de l’hypocrisie - du président chef de parti, Sarkozy s’est résolu à essayer de «faire» président. Longtemps sans succès. Maintenant que la crise lui donne enfin les épaules pour remplir le costume, il faudrait le remettre illico sur son cintre… A l’inverse, l’option du candidat tranchant correspond à son bilan et à son tempérament. Nicolas Sarkozy aime la castagne des campagnes. Et quand sa tête lui recommande de prendre de la hauteur, son corps le ramène sur le ring. L’alternative est stratégique, mais le dilemme très personnel.