Elysées 2012

Bataille de droites à l’Elysée

 

Il y a encore trois mois, l’Elysée ne voulait surtout pas que les journalistes écrivent que Nicolas Sarkozy puisse penser un seul instant à la présidentielle. Aujourd’hui, c’est tout l’inverse. La majorité aime raconter que la machine à gagner est en train de se mettre en route. A l’Elysée, le chef de l’Etat multiplie les déjeuners avec des ministres puis avec des élus de la majorité, censés demain porter la parole du candidat. Et depuis trois semaines, chaque mardi soir, un comité stratégique réunit Alain Juppé, François Fillon, Jean-François Copé, Jean-Pierre Raffarin et Bruno Le Maire. Sans que personne ne sache très bien le rôle et donc l’importance de ce comité. «C’est trop tôt pour le savoir», assure un participant. En réalité, rien de tout cela ne fait un dispositif de campagne.

Influence.

Il suffit d’interroger ceux qui sont censés travailler à la réélection du chef de l’Etat pour mesurer l’ampleur du malaise. Jamais la faille qui traverse historiquement la Sarkozie n’a été aussi profonde. Et, aujourd’hui, les deux rives se livrent une vraie guerre d’influence. D’un côté, celle incarnée par Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire défend l’idée d’un Président, dans la mesure du possible, au-dessus des partis, qui assumerait un courageux programme d’austérité, pour faire de la France l’Allemagne de demain. La priorité : la réforme de notre système social pour retrouver de la compétitivité. Dans ce scénario, François Bayrou pourrait parfaitement faire un allié de second tour.

L’autre option défendue par Jean-François Copé, Claude Guéant ou Brice Hortefeux est celle d’une campagne clivante résolument à droite, pour aller chercher les réserves du second tour là où elles sont aujourd’hui : chez Marine Le Pen. Or, mêler les deux (en gros l’alchimie de 2007) est aujourd’hui quasiment impossible, sauf à ce que Sarkozy se débarrasse de son costume de président sortant, rassembleur des Français.

«Affligeant».

Du coup, refusant de trancher, le chef de l’Etat donne des gages à tout le monde. A l’Elysée, la grande majorité des conseillers - à l’exception notable de Patrick Buisson (lire ci-dessous) - impliqués dans la préparation de la campagne défendent l’option 1. Et certains n’hésitent pas à tirer à boulet rouge sur la machine UMP et le bilan politique de Copé. Sa cellule riposte ? «Ni fait ni à faire.» Son show télévisé sur le «vrai» chiffrage du programme socialiste ? «Affligeant.» Quant aux ambitions de Brice Hortefeux dans le futur dispositif présidentiel ? «Elles n’ont jamais été d’actualité», rigole un proche conseiller. Sur l’autre rive, c’est le même mépris. Mais sur le mode : «Ces technos qui ne savent rien de ce que c’est qu’une campagne.»

Pour l’instant, l’UMP et l’Elysée travaillent ensemble sur les seules questions de logistique (réservation de salles…). Mais sur le fond des questions de stratégie politique, Sarkozy continue de compartimenter ses consultations. Seul l’actuel secrétaire général de l’Elysée, Xavier Musca, qui défend l’option Fillon-Juppé, est de toutes les réunions préparatoires. Or, Musca assure qu’il ne sera pas directeur de campagne. D’où le flottement.

Hortefeux explique que le Président ne veut pas d’une «organisation verticale», mais «horizontale». La vérité est plus inquiétante. «L’Elysée a un grave problème de ressources et ne sait toujours pas sur qui compter pour faire cette campagne», assure un proche qui a participé à la campagne de 2007. En attendant, il n’y a pas d’autres choix que de gagner du temps en rassemblant. Pour une raison simple : le Sarkozy d’aujourd’hui ne sait toujours pas qui sera le Sarkozy de 2012.