Palimpsestes

Stratégie et sondages

 

Curieuse campagne quand même, intéressante pour cela, mais étonnante en ceci qu'aucune grande tendance ne semble s'affirmer résolument : Hollande reste haut dans les sondages mais qui aura sorti son programme plus tôt qu'il ne l'avait souhaité et risque ainsi de se retrouver sans cartouche au moment clé de la lutte - quand Sarkozy se sera déclaré ; Sarkozy se cramponne dans son rôle de président en exercice, tentant de prendre de la hauteur mais se condamnant en même temps à n'y pas pouvoir répondre directement, à n'offrir que des mesures économiques lourdes et bien peu éclairantes d'une quelconque perspective et se retrouve donc dans l'obligation de devoir inverser la tendance en des temps records ne pouvant compter pour cela que sur ses talents de communiquant ; que sur l'éventuel épuisement de son adversaire ou ... sur une réelle surprise.

Dans l'attente, un mort ; un disparu !

Chevènement disparaît ! Quant à Joly ....

C'aura été la plus grande déception de cette campagne et peut-être son plus grand échec. Il aura effectivement suffi d'un rebond de la crise financière pour que subitement les préoccupations environnementales disparaissent des radars. A ce jour, le seul qui porte résolument des objectifs écologistes intimement ancrés dans le projet industriel c'est encore Mélenchon. Hollande, que ce soit au Bourget ou à France 2 ... rien ! Joly qui n'est décidément pas un fin politique se félicitera d'abord des accents de gauche du discours mais mettra deux jours pour s'apercevoir et regretter qu'il ne comportait rien, aboslument rien sur l'écologie. C'est ceci le plus grand échec de EELV : de n'avoir pas su ancrer le registre écologique dans les paramètres durables du politique. C'est ceci le plus grand aveuglement du PS ne se cantonner aux réponses économico-sociales les plus classiquement sociales-démocrates et ne n'avoir pas vu qu'un boulevard d'opportunités, de rénovation idéologiques, de nécessités politiques s'ouvrait devant lui.

Quid du 3e ?

Le 21 avril laisse décidément des traces. Il est de ces dates à ce point emblématiques qu'il n'est même pas utile d'en préciser l'année. Qu'en 2002 le revirement de l'opinion ait été si tardif, que la montée de Le Pen repérée ait été sous-estimée et l'effritement de Jospin si tardif au point que seuls les ultimes sondages non publiés aient pu -vaguement - soupçonner la possible éviction de Jospin dès le premier tour ne laissent d'inciter les sondeurs à une extrême prudence bien compréhensible.

Du coup Bayrou occupe véritablement une position centrale, qui pourrait récupérer une bonne partie des voix des décus du sarkozisme en cas de non remontée du président sortant mais aussi une partie des éventuels déçus de Hollande dans le cas où ce dernier n'arriverait pas à capitaliser durablement les intentions acquises en janvier. Pourtant ce qui ressort des enquêtes et notamment celle de l'IFOP c'est quand même l'extrême fragilité du vote Bayrou qui ne totalise que 38% d'intentions sûres quand Sarkozy et Hollande eux atteignent les 70% d'intentions sûres. Il y a ici un système de vases communiquants qu'il faudra scruter de très près dans les prochaines semaines mais qui explique que Bayrou ait assez rapidement répliqué à la fois à Hollande et à Sarkozy au terme de cette semaine qui fut marqué par le Bourget et la présentaton du programme Hollande et clos par l'interview télévisée de Sarkozy dimanche.

Position centrale mais indéniablement fragile : il peut mordre demain à la fois sur sa gauche et sur sa droite, mais tout aussi bien si la dynamique Hollande devait se maintenir et Sarkozy rebondir, être affaibli à la fois sur sa gauche et sur sa droite. Ce qui me semble décidément être sa fragilité tient au fait qu'il ne doive en réalité sa réussite - ou son échec - non pas à lui-même, son charisme, son programme, mais à l'affaiblissement des deux autres. Bayrou n'a pas ses propres clés en main. D'où sa riposte immédiate consistant à récuser à la fois les propositions de Hollandes et les décisions de Sarkozy et de récuser surtout les appels du pieds de plus en plus insistants de l'UMP. Bayrou est l'enjeu des deux autres, pas nécessairement le vainqueur. D'où le fait que chez Hollande on le rejette au centre droit sans pour autant trop l'éreinter ... ses voix seront nécessaires au second tour ; et que l'UMP lui fasse la grâce de ne pas lui opposer de candidat aux législatives. Bayrou n'est peut-être u'une couverture qu'on tire à soi.

Mélenchon progresse sans pouvoir être autrement qu'indirectement un enjeu : de sa capacité à rassembler les suffrages populaires, et donc de les ôter au FN, dépend à la fois la nécessité pour Hollande de gauchir sa campagne mais surtout l'étiage où se situera une M Le Pen décidément bien haute dans les intentions sans pour autant qu'elle soit résolument présente dans les médias et qui recueille de bien hauts scores dans la tranche des actifs.

Car c'est au fond ceci qui ressort des dernières enquêtes : on s'attend à un duel classique gauche/droite mais en même temps il n'enthousiasme guère comme si l'électorat fomentait une surprise ou, en tout cas, qu'il s'amusât au jeu du pire. Si, comme je continue à le penser, une poussée radicale est possible du fait d'une colère sourde en train de monter et qu'en même temps elle ne trouve pas de réponse dans l'offre politique du moment, alors oui de grandes surprises sont possibles attestées à la fois par le maintien d'un score plus qu'honorable de Le Pen et par la fin de l'hégémonie du PS à gauche, désormais flanqué d'une aile gauche qui n'a plus rien de symbolique. C'est ceci aussi le grand enseignement de cette première phase : après un PC quasiment disparu, la renaissance d'une gauche jacobine forte qui obligera de toute manière le PS à revoir ses fondamentaux.

A vérifier.

 


Ifop :

Plus récemment, les intentions de vote de l’Ifop ont permis de relever la baisse des deux « favoris », la consolidation du vote Marine Le Pen et la hausse de François Bayrou liée à sa déclaration de candidature. Les intentions de vote réalisées en début d’année 2012 traduiront-elles la poursuite des évolutions assez sensibles enregistrées depuis septembre 2011 ? Si le recul de François Hollande et de Nicolas Sarkozy se confirme, de même que la progression de Marine Le Pen et de François Bayrou, la campagne pourrait prendre une nouvelle tournure en janvier-février, passant de l’opposition classique et attendue entre une droite sortante et une gauche d’alternance, à un jeu à trois voire à quatre, susceptible de changer les perspectives d’accession au second tour.

Sofres

 

propositions Bayrou