Palimpsestes

SPINOZA (1632-1677)
Traite De La Réforme De l'Entendement § 27

SpinozaL'idée vraie (car nous avons une idée vraie) est quelque chose de distinct de ce dont elle est l'idée : autre est le cercle, autre est l'idée du cercle. L'idée du cercle n'est pas un objet ayant un centre et une périphérie comme le cercle, et pareillement l'idée d'un corps n'est pas ce corps même. Etant quelque chose de distinct de ce dont elle est l'idée, elle sera donc aussi en elle-même quelque chose de connaissable: c'est-à-dire que l'idée, en tant qu'elle a une essence formelle, peut-être l'objet d'une autre essence objective et, à son tour, cette autre essence objective, considérée en elle-même, sera quelque chose de réel et de connaissable et ainsi indéfiniment…
Pour connaître l'essence de Pierre, il n'est pas nécessaire que l'entendement connaisse l'idée même de Pierre, et, encore moins, l'idée de l'idée de Pierre; ce qui revient à dire que je n'ai pas besoin pour savoir, de savoir que je sais, et encore bien moins de savoir que je sais que je sais; pas plus que pour connaître l'essence du triangle, il n'est besoin de connaître celle du cercle. C'est le contraire qui a lieu dans ces idées: pour savoir que je sais, il est nécessaire que je sache d'abord
Il suit de là évidemment que la certitude n'est rien en dehors de l'essence objective elle-même: c'est-à-dire que la manière dont nous sentons l'essence objective est la certitude elle-même. Mais de là suit évidemment que, pour avoir la certitude de la vérité, nulle marque n'est nécessaire en dehors de la possession de l'idée vraie.


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