Bloc-Notes
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Honte et désarroi

Je m'étais promis pourtant de prendre du recul et de ne pas commenter les résultats électoraux.

Reflux de la gauche : se fût-il opéré aux profit de la droite - dite les Républicains - que j'eusse maugréé mais après tout l'alternance est la loi du genre. Quand même avoir conquis en 2010 toutes les régions sauf l'Alsace et voir, cinq ans après le FN être en tête dans 6 permet de mesurer la pente dévalée.

Scénario catastrophe pour la droite aussi : le moins que l'on puisse dire est que les résultats sont mitigés pour la droite classique. Si lors de son élection de 2007, Sarkozy avait paru pouvoir siphonner les voix du FN réduisant JM Le Pen à 10%, il faut bien voir que sept ans plus tard, c'est l'inverse qui se produit

 

Trois leçons à en tirer

  1. Déjà suggérée, l'inefficacité désormais avérée du discours classique sur le FN. Le dénoncer comme extrémiste, anti-républicain, voire fasciste ne donne aucun résultat et lui permet même d'adopter la posture de victime du système. Voir le FN entonner les sirènes républicaines et en appeler à la liberté, égalité, fraternité et laïcité est sans doute fort de café mais ça marche.
  2. Un paysage politique pour longtemps bouleversé qui fait de la bi-polarisation en partie sécrétée par le scrutin majoritaire à deux tours des présidentielles et législatives un souvenir pieux. Il va falloir désormais compter avec trois forces d'à peu près égales importances. Qui demain sera la 3e force se vautrant devant l'autre ?
  3. Une crise des institutions elles-mêmes : l'absence de tout réel contre-pouvoir depuis la réforme du quinquennat, l'incapacité en conséquence de répondre aux évolutions de l'opinion, poussent les électeurs aux solutions les plus hasardeuses. En même temps, si l'on veut être honnête, la montée des périls, l'impuissance des gouvernants à sortir de la crise, le recours à des solutions de plus en plus semblables, la morgue technocratique qui vise à imposer les solutions libérales, plus ou moins teintées de social selon les cas, mais incapable en tout cas d'imaginer que le pays puisse les refuser et ne pas s'y plier servilement, tout cela fit le reste.

Honte quand même !

On aurait aimé que la France avec son passé ne tombât pas dans ces pièges grossiers !

Si fait !

Tant pis pour nous. Peut-être faudra-t-il demain boire le calice jusqu'à la lie. Cette coupe, on l'a déjà bue, honte y comprise. L'enthousiasme y était. Je n'oublie pas ces foules sur la place de l'Hôtel de Ville en 44 ! Nous avons déjà montré être capables de tout brader, l'honneur y compris.

Bien sûr, me dira-t-on, l'histoire ne se répète pas. Mais si le désarroi a aujourd'hui d'autres causes qu'une défaite militaire violente, il n'en est pas moins profond. Ni moins dévastateur

Ce peuple a vieilli et est disposé désormais à se donner à n'importe quelle cocotte décrépite !

On ne dira jamais assez que la République est un combat de chaque instant, ni combien les moments de consensus sont rares et précieux.

Trop las, trop apeurés, nous nous vautrons.

Tant pis pour nous !