Histoire du quinquennat

Ivresse

Libération signale la conversation téléphonique que Sarkozy eut avec un opposant syrien.

Première réaction : ah bon ! et pourquoi pas ?

Seconde : de quoi se mêle-t-il ?

Troisième : décidément l'inaction doit lui peser.

Au delà de la mécanique un peu lassante qui fait la droite s'enthousiasmer et la gauche s'indigner ; au delà même de la question de la légitimité que cet homme n'a plus pour s'occuper de ce type de questions - tant en tout cas qu'il ne se verra pas attribuer une fonction internationale ; au delà de l'aspect politique, même qui est évident où celui-ci sans avoir l'air d'y toucher tacle Hollande pour son inaction en Syrie ; au delà même de la perspective de la rentrée qui commence à se dessiner et où, contrairement à ce qu'il avait indiqué, on le voit mal demain rester muet et inactif : si, on entendra bientôt parler de lui ! ...

oui, au delà la question toute simple de la relation au pouvoir. Les lendemains d'ivresse sont toujours difficiles. Or c'est bien d'ivresse dont il s'agit : avoir été au centre de tout pendant cinq ans ; s'être donné l'illusion de pouvoir agir sur le cours des événements ; s'être cru important parce qu'inévitablement une théorie de courtisans finit toujours par vous entourer de vanités veules et de flatteries amphigouriques ... et, du jour au lendemain, n'être plus rien, n'avoir plus prise sur rien, et voir les autres se disputer sur les décombres de l'héritage avant même qu'on ait eu fini d'ester, et constater inévitablement les béances de son successeur qui fait tellement moins bien que ce que l'on eût pu ... oui cela doit bien être douloureux ; d'autant pour cet hyper-actif invétéré mais avéré.

C'est peut être ici l'autre forme non inverse mais perverse du cumul : le pouvoir a quelque chose du trou noir, de la boite noire en tout cas, qui avale tout sur son passage. Au dehors de la puissance, il n'y a jamais rien. Toute création, on me comprend mieux est une création ex nihilo.

Non ce n'est pas une question d'addiction ; c'est une vraie question ontologique. On n'a pas le pouvoir : on est le pouvoir.

Il y avait quelque sagesse dans nos gérontocraties d'autrefois qui ne confièrent le pouvoir qu'aux vieillards. De Gaulle et Mitterrand eurent la sagesse de mourir peu de temps après avoir quitté le pouvoir. Pompidou pendant.

Giscard d'Estaing ne s'est jamais remis de sa défaite qu'il traîne comme une béance depuis trente ans ... Sarkozy semble vouloir épouser cette béance-ci.

On a raison de dire que la défaite est une mort politique.

Gare pourtant aux résurrections.