Il y a 100 ans ....
précédent suite

Massacre de Ludlow

A la Une de l'Humanité du 7 Mai un article consacré à un massacre de mineurs grévistes dans le Colorado.

Le massacre de Ludlow fait référence à une action de représailles de la Colorado National Guard durant laquelle plus d'une dizaine de grévistes mineurs trouvèrent la mort, à Ludlow dans le Colorado le 20 avril 1914. Ce massacre fait suite à un long affrontement entre les grévistes, au nombre de 1 200, et les soldats de la garde nationale. Deux femmes, douze enfants, six mineurs et syndicalistes et un garde furent tués. En guise de réponse, les mineurs s'armèrent et attaquèrent des dizaines de mines, détruisant les biens et multipliant les échauffourées avec la Colorado National Guard.

Cette histoire, je ne la connaissais pas, mais elle est, finalement, l'autre versant de la misère que nous évoquions :

- le cynisme d'un patronat qui, au nom de la liberté, ici du travail, n'hésite pas au pire pour en finir avec une grève longue. Le système patronal était bien rodé : les mineurs habitaient des logements loués par les compagnie minières et étaient rémunérés en bons d'achats valables dans les magasins de la compagnie. Des conditions de travail éprouvantes et dangereuses. Bref, un système qui, pieds et poings liés, mettaient les mineurs sous la coupe de leur employeur. Expulsés de leurs logements, les mineurs s'établirent dans des camps alentours : c'est l'un de ceux-là qui fut attaqué et incendié en faisant appel à des milices privées, essentiellement.

- l'exploitation, dans la forme la plus crue - et cruelle - se lit dans cette photo : celles d'enfants dont le regard crie l'absence d'espoirs, l'aliénation accomplie. Si nos sensibilités modernes nous font nous insurger contre de telles images, si le développement économique a permis depuis un long moment déjà de se passer du travail des enfants, il vaudrait mieux ne jamais oublier que les débuts de la société industrielle furent violents et s'en souvenir quand on observe aujourd'hui le décollement rapide de ces pays qu'on nomme émergents : assurément ce développement rapide ne peuvent pas ne pas se solder par une exploitation rugueuse de la classe populaire, une sur-exploitation des femmes et des enfants. Nous nous en choquons peut-être mais oublions d'où nous venons ainsi que cette part éhontée d(ombre du capitalisme. Que la France, via l'instauration de la scolarité obligatoire à partir des années 80 ait permis de révéler et de lutter contre le travail des jeunes enfants est une réalité qui désigne combien l'école ne fut pas seulement l'ennemie de la campagne mais aussi, dès le début, de l'usine.

Capitalisme sauvage, telle est l'expression consacrée ! Il le fut ; n'a jamais cessé de l'être même s'il prend désormais des chemins de traverse plus suaves et invente des formes plus édulcorées à l'aliénation.

La catastrophe de Courrières avait montré l'essentiel qu'il fallait retenir : au-delà de la pénibilité, au delà de ces jeunes qu'on embauchait comme galibots on se préoccupa très vite, dès les premiers jours, bien plus de préserver les installations et les ressources que de secourir les éventuels survivants.

Alors, certes, on n'en était pas en France à envoyer des milices privées pour réduire à néant tout mouvement de grève ; on n'hésita jamais cependant à envoyer la troupe comme on le fit à Fourmies ou ailleurs - tout Briand ou Clemenceau qu'on s'appelât.

Ne jamais l'oublier : la bourgeoisie n'a jamais tant le mot liberté aux lèvres que pour défendre ses prérogatives et biens !