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Jean-Jacques Waltz
Hansi (1873-1951)

Il n'est pas un de ces croquis, une de ses vignettes ou de ses cartes postales qui ne soit connu de l'imaginaire d'un alsacien qui les a vus et revus, se les ait fait raconter par un grand-père. Ces dessins sont à l'Alsace ce que le Poulbot est à Paris même si doivent s'y rajouter en plus la caricature du Prussien et la représentation aujourd'hui désuète d'une Alsace martyre.

Cette histoire qui s'éloigne reste pourtant présente encore même si pour ma génération elle fut tout simplement celle très présente de nos grand-parents.

Deux histoires séparées d'ailleurs : le souvenir d'avant 14 ne laissait déjà plus que peu d'animosité en comparaison des cinq années nazies qui creusèrent en peu d'années de bien cruelles blessures en Alsace sans compter ni les doutes ni les suspicions.

C'est aussi pour cela que si Hansi est aujourd'hui omniprésent dans les étals alsaciens pour touristes, on n'en retient plus que le folklore bien plus que ce patriotisme aussi exacerbé que son antigermanisme drôle mais désormais anachronique.

Si les costumes régionaux avaient déjà déserté mon enfance, - ces coiffes noires invraisemblables qui signaient la tête des alsaciennes ou ces habits noirs tout juste rehaussés du gilet rouge - en revanche cigognes, bretzels, ces gâteaux - brädele- qu'à Noël on portait chez le boulanger pour qu'ils cuisent dans son four ou ces superbes tartes aux quetsches n'eurent aucun secret pour moi. Pas plus d'ailleurs que le St Nicolas qui signalait début décembre la lente ascension vers Noël ponctuée par les quatre dimanches de l'Avent où l'on allumait successivement une puis deux puis trois et enfin les quatre bougies de la couronne qui étaient autant de promesses des cadeaux à venir.

Sincère, assurément, délicieusement manichéen, Hansi est l'homme d'une époque et très vite, dès l'après-guerre, sa francophilie cessera d'émouvoir : la France de l'intérieur, comme on dit chez moi, parce que reconquise, l'Alsace cessa de passionner étant une affaire réglée ; l'Alsace elle même qui cherchait alors à défendre ses spécificités que télescopait la posture d'Hansi. On lui reprocha même en présentant une province mythique d'avoi r escamoté la crise autonomiste des années 24. Ses oeuvres cessèrent de se vendre et ce n'est, au fond, qu'en rentrant lui-même dans l'histoire, qu'il aura pu reconquérir quelque notoriété.

On peut certes s'émouvoir en parcourant Mon village ou s'amuser de la caricature anti-boche du Professeur Knatschke : ils illustrent surtout combien les guerres en contraignant aux haines recuites et aux diabolisations systématiques ne vont jamais sans un lourd bagage manichéen qui interdit à chacun prudence, nuance ou conciliation.

A tout le moins peut-on reconnaître que l'antigermanisme de Hansi pour primaire qu'il fût, jouait plus de la corde de la caricature, du ridicule et de l'outrance que de la haine.