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La peste, le chien et le mauvais maître …

 

Le Monde relate cette ITV de Ruquier dans JDD où il se plaint des effets dévastateurs de Twitter …

C'est, avons-le, de bonne ou de mauvaise foi, confondre fièvre et thermomètre. On ne mitonne pas impunément, et ce depuis des années, une émission dite talk-show en mêlant people, culture et un zeste de polémique, on ne cherche pas innocemment à faire le buzz pour animer les fins de soirée télévisuelles.

Je veux bien admettre que Catherine Barma y ait sa part - elle qui fut si joliment croquée par Foresti - mais évoquer comme le fait Ruquier une émission de culture et de divertissement est quand même forcer le trait. On est plutôt dans le un clash, une tisane et au lit

Lui qui fit ses choux gras des provocations de Zemmour et Naulleau …qui s'amusa longtemps des certitudes cauteleuses et des sermonts péremptoires d'un Aymeric Caron, qui se contenta des ambiguités paresseuses d'un Yann Moix, ne pouvait pas plus ignorer que C Angot était loin d'avoir sa langue dans la poche.

Alors quoi se plaindre du buzz n'aurait-il pas quelque chose de savoureusement hypocrite ?

En réalité ce qui agace Ruquier c'est moins le bruit fait sur Twitter que l'audiance qu'on lui accorde. Ce qui est exact c'est que ce type d'émission n'a d'autre justification que l'audience réunie sans toujours bien y regarder sur les moyens pour y parvenir. Culture, débat, confrontation d'idées et présentation d'œuvre n'y ont qu'une place subalterne, j'allais écrire, prétexte. En fait c'est la tendance politiquement correct qui inspire désormais ce milieu qui est à terme gênante ; qui interdit qu'on laisse passer toute parole, position un tant soit peu tranchante. Disruptive comme on dit.

Il faut le regarder [Fillon] avec son calme feint d'assurance intérieure, avec cette bouche pincée qui barre le bas de son visage d'un déni magistral : lui, est une figure de violence - celle du cynisme - assise sur tant de siècles de domination qu'elle en paraîtrait presque légitime ; il faut le regarder nous regarder avec la bienveillance contrefaite qu'a parfois le maître pour le laquais obséquieux, avec l'effroi outré devant le manant qui se pique de se révolter ou même seulement de s'offusquer. Non décidément ce n'est pas Angot qui fut disruptive. Elle a seulement fait le travail que ne font plus les intellectuels qui préfèrent désormais se taire ou hurler avec les loups. Mais les dés sont tellement pipés médiatiquement que sa colère même paraît désormais suspecte et qu'on en viendrait même à souhaiter plaindre le contrevenant objet de tant d'acharnement. Non, décidément plus rien ne peut se passer désormais ici : il y a bien rupture mais elle est ailleurs et elle se paiera cher. Nous la paierons tous cher. C'est cela qui est impardonnable ! au moins autant que notre anémique prédisposition à pouvoir seulement entendre tonner la colère.

En relisant ce que j'en écrivais il y a deux ans je comprends mieux ce qui me gêne : il n'est pas pire que l'auto-censure qui n'est après tout qu'une des figures possibles de la lâcheté. S'il est un métier qui ne peut pas se le permettre c'est celui de journaliste même quand il contrefait seulement l'animation. A l'inverse que la provocation systématique finisse par devenir contre-productive, je n'en disconviens pas. Pour autant rien n'est pire que cette bien pensance qui envahit tout, attiédit tout ; stérilise.

On a scandé comme événement absolu de parousie tant espérée l'avènement des réseaux. Que chacun y ait droit à expression ; que grâce à eux, nous ne soyons pas réduits au rôle passif de consommateur d'informations, de données soit ! Nous pouvons désormais produire !

La belle affaire ! Pour dire quoi ? A qui ?

Platon aurait parlé de sophisme puisque c'est bien ainsi que se définit cette prétention à pouvoir parler de tout à tout le monde. Sans doute, mais reconnaissons qu'il y a bien un peu quelque chose de l'ordre du déversoir à passions, haines et rancœur. Que le prix à payer pour cette liberté d'expression enfin adossée à de réels moyens doive se payer aussi en terme de détritus je veux bien l'admettre. Il n'est pas de catharsis propre.

Mais pourquoi donc - paresse ou lâcheté - écoutons-nous ? laissons-nous ces torrents de stupidité souvent, ces déluges de haines de moins en moins ordinaires ; de plus en plus odieuses et vulgaires influencer ainsi notre expression ?

Il n'y a rien de nouveau dans tout ceci sinon qu'auparavant cette voix trouble du peuple ne s'entendait pas et d'ailleurs personne n'eût jamais pris la peine seulement de l'écouter.

Rien ne bien nouveau sinon que tout le monde parle en même temps ; que plus personne ne s'écoute ; et que, décidément, ce brut de fond sécrète des exhalaisons bien fétides.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

Après la polémique Angot, Laurent Ruquier dénonce la « dictature de Twitter »

Dans une interview au « JDD », l’animateur d’« On n’est pas couché » fustige les réseaux sociaux, responsables, selon lui, des polémiques qui ont touché son émission.

Publié hier à 13h58, mis à jour hier à 18h53

Lecture 2 min. 

L’animateur Laurent Ruquier au 69e Festival de Cannes, le 19 mai 2016. LOIC VENANCE / AFP

« Twitter a rendu folle une profession à la dérive. » Dans une interview au JDD, dimanche 16 juin, Laurent Ruquier, l’animateur d’On n’est pas couché sur France 2,pousse un coup de gueule contre les réseaux sociaux, et notamment Twitter, responsables, selon lui, de nombreuses polémiques qui ont touché son émission cette saison. L’animateur n’hésite pas à tacler, au passage, plusieurs de ses anciens chroniqueurs.

« Nous vivons sous la dictature de Twitter et de Marlène Schiappa », dénonce-t-il, en référence aux tweets de la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, à qui il reproche d’utiliser les réseaux sociaux pour faire pression sur les chaînes. « Nous sommes en permanence la proie des lobbies, des associations, de corporatismes catégoriels, du communautarisme… Or, ce qui est grave, c’est que des journalistes eux-mêmes s’y mettent ! » 

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Le présentateur fait notamment référence à la polémique concernant les propos tenus par Christine Angot sur l’esclavage dans l’une des dernières émissions d’« On n’est pas couché ». La romancière avait estimé que ce n’est « pas vrai que les souffrances infligées aux peuples sont les mêmes »« Le but avec les Juifs pendant la guerre, cela a bien été de les exterminer, c’est-à-dire de les tuer, et ça introduit une différence fondamentale […] avec l’esclavage des noirs […] où c’était exactement le contraire. L’idée, c’était […] qu’ils soient en bonne santé pour pouvoir les vendre. » Par la suite, Mme Angot a dit regretter « de ne pas avoir réussi » à se faire comprendre et d’avoir « blessé » par ses propos.

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Laurent Ruquier s’en prend à Audrey Pulvar et Aymeric Caron, ex-chroniqueurs de son émission, leur reprochant d’avoir « stigmatisé » Christine Angot sur les réseaux sociaux pour sa « maladresse », « quand personne ne peut pourtant la soupçonner de négationnisme ou de racisme ». « Que des gens de ce métier aujourd’hui sur le carreau utilisent les réseaux sociaux dans le seul but d’exister est honteux ! », tacle-t-il.

« A contre-courant de la bien-pensance »

Les anciens chroniqueurs Eric Zemmour et Eric Naulleau sont également dans le viseur de Laurent Ruquier : « Qui vient aujourd’hui accuser Christine Angot de racisme ? Eric Naulleau. Lequel travaille toujours avec Eric Zemmour. On est vraiment chez les fous ! », s’insurge-t-il. « Ni l’un ni l’autre ne se sont autocensurés à l’époque, quand Christine Angot et Charles Consigny ont souvent été obligés de mettre le pied sur le frein par peur du ramdam que risquait de provoquer le moindre écart de leur part. »

L’animateur évoque aussi les mises à pied de Daniel Riolo et Jérôme Rothen de RMC après avoir évoqué les frasques du footballeur brésilien Neymar. « On ne peut plus rien dire sur quoi que ce soit, déplore-t-il. Quelques dizaines de signalements au CSA suffisent aujourd’hui à ce qu’une émission soit sanctionnée. »

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L’animateur estime ainsi que la télévision disposait « d’infiniment » plus de libertés lorsque les réseaux sociaux n’existaient pas pour pointer du doigt certains propos de journalistes ou de chroniqueurs télé.

« Twitter a rendu folle une profession à la dérive, qui se tire une balle dans le pied. Viendra un jour où les journalistes, s’ils ne se ressaisissent pas, ne pourront plus rien dire à force de taper sur des confrères qui sortent du lot et vont à contre-courant de la bien-pensance ou de la pensée unique. »

« Nous avons tout simplement changé d’époque, conclut-il. Ce qui était accepté à l’époque de Zemmour, Naulleau ou [Michel] Polac ne l’est plus aujourd’hui »,estime Laurent Ruquier, justifiant la nouvelle formule de son émission à la rentrée, dans laquelle se succéderont des chroniqueurs différents chaque semaine, au « coup par coup », en fonction de l’actualité.