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Impénitente cuistrerie

Et revoici l'inénarrable suffisance qui craquelle le vernis bienveillant de qui contrefait le plaisir de se pencher vers nous, pauvres âmes aussi sottes que perdues.

Dans un discours au Danemark, celui qui fait campagne, escomptant devenir maître en Europe - au moins maître à penser - au crépuscule d'une Merckel, débordée sur sa droite et peinant désormais à faire peser son emprise souriante certes mais peu conciliante, Sa macronité aura encore déversé son fiel, sous prétexte d'ouverture et habits défraîchis d'humour. Face à ces vertueux luthériens nous ne serions que réfractaires gaulois, rétifs à toute réforme, enclins à toute révolte. Heureusement notre président, tout propre sur lui avec son profil lisse de gendre idéal, œuvre en son pays comme tout missionnaire dévoué, sachant à l'occasion donner de la sévérité en lieu et place de sa mielleuse sollicitude de télévangéliste extatique.

Le bellâtre simule la sagesse et nous entreprend de ces généralités, faussement généreuses mais empesées de fatuité, à sidérales hauteurs de vues sur l'âme des peuples. Voici caractéristique, ou Badiou voyait marque du pétainisme mais qui, en réalité est le signe de toutes ces pseudo-pensées pragmatiques nous enjoignant de nous adapter et soumettre à la rigueur des mutations du mondes : toujours chercher son modèle ailleurs, à l'étranger qui seul aurait anticipé les réformes nécessaires, les purges drastiques inévitables quand nous, au contraire, nous serions paresseusement abandonnés aux ultimes ressacs d'une grandeur révolue, ne nous apercevant pas même combien le monde avait, et si vite, et sans nous, changé. Ce fut avant hier le modèle anglo-saxon, puis allemand ; luthérien désormais ?

L'ironie de l'histoire est que ces chauds thuriféraires de la modernité, ces chantres de la réforme, ces trabans de la flexibilité sous des allures de modernité, ressassent en vérité les fétides recettes d'antan - celles de ce capitalisme libéral que de Gaulle nommait le laisser passer laisser faire : à contre-emploi, réforme signifie toujours sinon régression sociale, pour les uns, en tout cas dérégulation pour les autres, c'est-à-dire flexibilité, code du travail allégé à sa plus simple expression, allègement des impôts pour les plus riches etc et, désormais, ponction sur les retraites, dégraissage de la fonction publique et donc dégradation du service public ; responsabilisation et donc réduction des aides sociales, de ce fameux pognon de dingue dépensé pour rien

En ce sens, le propre d'un individu serait donc de faire prévaloir en lui la tendance à la singularité sur la tendance à l'uniformité, et l'audace de sa solitude par rapport au soutien qu'il recevrait de sa communauté.
On aura remarqué que la notion même de devoir est contraire à celle d'adaptation. On s'adapte en effet à ce qui est, non à ce qui devrait être. Aussi est-on d'autant plus capable de s'adapter qu'on est moins soucieux de son devoir. Sentir l'intense exigence d'un devoir, c'est déjà refuser de s'adapter aux circonstances. Ceux qui ne s'adaptent pas : les rebelles, les dissidents, les ci-devant, les insoumis. Grimaldi

L'injonction à s'adapter est révélateur de ce monde sans foi ni loi : Grimaldi l'avait bien compris. Vouloir s'adapter c'est l'énergie du désespoir … ou la lâcheté du paresseux ; en tout cas n'a rien à voir ni avec la vertu, ni avec l'engagement. Ce n'est rien d'autre que le renoncement à soi, à ce qui importe ; au devoir.

Démarche sans âme ni moralité, épousant clichés, lieux communs et banalités convenues du moment ; démarche technolâtre qui aura appris deux ou trois recettes sur les bancs de Science Po ou les guichets sophistiqués de quelque banquier et n'aura d'autre obsession que de nous en assigner l'ordonnance avec la componction saumâtre du Diafoirus de vile condition.

C'est le poumon, répète à l'envi la servante déguisée en médecin ! Et de vouloir amputer ici, énucléer là ! Deux trois recettes prêtes à servir à tout. Une belle indifférence au sort de ses patients.

Il y a du Diafoirus en cet homme-là. Oui, mais avec lui c'est moins drôle !