Textes

Roger Caillois,
L’homme et le sacré, 1950, 24-25

Le domaine du profane se présente comme celui de l’usage commun, celui des gestes qui ne nécessitent aucune précaution et qui se tiennent dans la marge souvent étroite laissée à l’homme pour exercer sans contrainte son activité. Le monde du sacré, au contraire, apparaît comme celui du dangereux ou du défendu : l’individu ne peut s’en approcher sans mettre en branle des forces dont il n’est pas le maître et devant lesquelles sa faiblesse se sent désarmée. Cependant, sans leur secours, il n’est d’ambition qui ne soit vouée à l’échec. En elles réside la source de toute réussite, de toute puissance, de toute fortune. Mais on doit redouter, en les sollicitant, d’être leur première victime.