index précédent suivant

 

 

Trois précautions préalables

Soyons néanmoins prudents avant de commencer cette aventure qui a tout l'air de devoir ressembler à une Odyssée. Pour autant qu'il n'y ait pas de pratique sans théorie préalable, aborder la question du politique c'est au moins envisager la question dans ses soubassements économiques, sociaux, historiques mais aussi anthropologiques et géopolitiques. C'est donc repérer les principes philosophiques sous-jacents et, de là, les morale et métaphysique implicite. Au risque de s'y perdre et de ne pas véritablement répondre à la question.

Manie, derechef, de philosophe en tout cas que de n'avancer qu'en reculant à chaque fois et de poser avant même de commencer des obstacles qu'on s'entiche de déclarer dirimants ! Mais, après tout, lenteur à progresser ne signifie pas toujours impasse !

Il y a pourtant de quoi être prudent !

1e obstacle : l'incompatibilité entre philosophie et politique

Elle me semble se jouer au moins à trois niveaux :

 

2e obstacle : du monde, de l'univers ou du local au global

S'il est un lieu où se télescopent universalité de la condition humaine, comme l'eût écrit JP Sartre, et diversité culturelle, c'est bien ici. Sur le terrain de la chose publique. De la chose politique.

Universelle effectivement la présence de l'homme au monde et son obligation de lui trouver un sens. Universelle quelque soit la réponse donnée. Qu'il se soumette en mesurant son extrême débilité et son impuissance à rien changer aux forces qui agitent le cosmos ou, au contraire, s'insurge en tentant de s'inventer un havre protecteur - a minima - ou savoir et techniques suffisamment rationnelle pour transformer le réel et l'adapter à sa main, ce sera en tout état de cause dans la conception que l'homme se fera de sa socialité qu'on le lira.

Par ailleurs, ce qu'on a appelé mondialisation et qui n'est en réalité que le stade ultime - j'allais écrire terminal - du développement économique de nos sociétés industrielles au moins autant que les périls environnementaux qui en sont la conséquence pourvoient ensemble amplement à donner contenu cruel et précis à l'idée d'universel. Il y aura, certes, toujours deux attitudes possibles face au fait humain : celle philosophique consistant plutôt à en retenir les points communs ; celle anthropologique consistant à en recenser les différences. Nous le savons depuis toujours mais ne l'admettons que malaisément : l'universalité de la nature n'a jamais gommé la diversité des cultures humaines. Nous le savons désormais l'universalité des menaces risquent bien de mettre en péril non seulement nos différences ; mais nos existences mêmes.

Alors non effectivement, gauche droite sont loin d'être des catégories universelles. Et si la France est loin d'être le seul pays régi par un bi-partisme t ce qu'il est convenu de nommer clivage gauche/droite est loin d'être aussi simple qu'il y parait ; bien plus nuancé ; tellement fluctuant.

C'est cette mosaïque que nous tenteront de respecter en travaillant sur le politique en France uniquement.

En se tenant fidèlement sur cette ligne de crête où se rejoignent théorie, pratique et histoire.

3e obstacle : de l'objet composite

Il y aurait tout lieu de se demander ce que sont ces objets étranges que l'on appelle histoire et politique !

N'entrons pas dans des débats interminables dont certains sont épistémologiques ! Retenons simplement ceci :

Dans son versant compréhensif, en droite ligne du projet que l'histoire se donne au moins depuis l’École des Annales, elle est bien une science - fût-elle molle - et même serait le carrefour de toutes les autres puisqu'on n'imagine pas qu'elle parvienne jamais à expliquer les faits du passé sans intégrer des explications économiques, anthropologiques, géographiques … sans ignorer les explications géologiques, physiques etc. Dans sa définition même, elle embrasse un objet non seulement universel mais qui frôle de si près l'action, la technique qu'on peut se demander où se trace sa frontière - et notamment celle qui la sépare et rapproche du politique.

Dans son versant technique, la politique ne saurait se penser sans théorie préalable ; sans philosophie implicite on l'a dit ; sans histoire non plus d'ailleurs dont elle se repaît au reste avec gourmandise ; dont elle fait usage immodéré dans ses rituels de fonctionnement.

Où commence, où s'arrête le politique ? à partir de quelle ligne la politique s'étale-t-elle jusqu'à croire pouvoir occuper tout l'espace ?

Belle question théorique pour spécialiste des sciences humaines et autre épistémologue chagrin. Mais vrai problème pour la question que nous nous posons ici :

Si j'osais - mais pourquoi pas finalement - écrivons ceci : puisqu'il ne saurait être question d'une théorie seule de la gauche pas plus que ne fût audible un programme, une pratique de la gauche c'est que donc seule une métaphysique de la gauche est possible.