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Ni sidéré, ni désabusé ; dégoûté

Veille de scrutin. Où la règle veut que tout le monde se taise et les protagonistes se tiennent sur leur quant-à-soi. Jour où tout semble calme et presque comme d'habitude ; où plus rien ne l'est déjà.

Je relis ce que j'écrivis il y a cinq et dix ans : toute espérance enfuie et tragique solidement installé. La certitude d'une fin, tout simplement. Quelle dégringolade.

A côté de l'horreur s'imposant avec insolence, les mesquines diatribes des apprentis notables de sous-préfecture semblent bien ridicules ; font néanmoins intégralement partie de ce script détestable que nous nous obstinons à nous imposer à nous-mêmes. Plus rien n'est à sa place : ni l'ordre des priorités, ni le classement prévisible des candidats.

A l'heure où la planète brûle et où le GIEC ne nous donne pas plus de trois ans pour éviter un cataclysme de plus en plus effrayant; où l'humanisme le plus élémentaire se fracasse contre le cynisme brut et brutal des tyrannies, oui, décidément, que le pouvoir d'achat soit la préoccupation principale de l'électorat témoigne d'une conscience bien rabougrie !

Rien, pas même les résultats de dimanche ou après-demain ceux du 2e tour, non rien ne parviendra à m'ôter ce goût de cendres qui interdit toute innocence à l'aube.

Les derniers en France qui connurent les affres de la guerre sont ceux d'Algérie : ils le vécurent mal et s'en remirent encore moins bien de n'avoir pas même pu en parler. Eux savaient et leurs parents, les miens, combien la guerre vous propulse immédiatement en cet empire effarant où la violence défigure tout. Nous, désemparés, à peine habitués à ces petites crises épisodiques qui se contentent de rétrécir nos porte-monnaie, nous regardons cela comme un mauvais spectacle, faisons mine de nous en agacer mais avons depuis longtemps désappris de regarder au-delà de la ligne embuée de nos mesquineries.

Il faut savoir entrer dans la nuit et je n'ose imaginer l'aube qu'elle nous prépare ; suis incertain de seulement le vouloir.