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Connivences insanes … putrides

J'éprouve difficulté, je l'avoue, à détourner mon attention du cas Zemmour. Pour ce qu'il a dit ! Pour ce qu'on lui a laissé dire depuis si longtemps. Pour ce qu'on en a diffusé depuis si longtemps. Pour l'étonnant aveuglement, l'invraisemblable pusillanimité de la presse, de l'incontestable connivence des commentateurs.

Quoi un Naulleau tout critique qu'il se veuille, tout donneur de leçons qu'il se pose depuis des années dans les émissions bavardes où il se pavane et parfois vautre de suffisance, quoi ce parangon de l'intelligence, du bon goût et de l'écriture moderne n'aurait rien vu ?

Je n'y crois pas une seconde.

Ou bien ces estrades médiatiques se contentent de vendre de la polémique avec autant de (mauvais) talent que les bonimenteurs qui faisaient mine sur les marchés de mon enfance de brader lot de casseroles ou d'épluche-légumes aussi polyvalents qu'inutiles ; ou bien ces illusionnistes qui paradent sous le doux titre de chroniqueur, éditeur voire journaliste ont à peine plus de culture et de capacité d'analyse que d'honnêteté.

Il est des complicités ordinaires de quoi nul ne devrait être surpris : que les grands groupes de presse - écrits autrefois, parlés ou télévisés aujourd'hui - soumis à forte concurrence, soient en quête de sensationnel n'a rien d'inédit : il n'est qu'à observer l'attitude des grands titres dans les années trente et leur veulerie à l'égard des invectives maurrassiennes pour le comprendre. Le virage, pas très à gauche c'est le moins que l'on puisse dire de Marianne depuis son rachat par le très entreprenant Daniel Kretinsky, entré entre-temps aussi dans le capital du Monde, la direction confiée à N Polony très présente sur les médias tapageurs où elle peut faire montre de ses attaches souverainistes, désigne combien la digue qui avait un temps protégé la presse des grands chevaliers d'industrie a cédé depuis longtemps. Les récentes incertitudes autour du Monde, depuis la mort de P Bergé, ne font qu'en renforcer les craintes.

C'est moins du politique que la presse devrait se méfier que des milieux d'affaires.

Ici comme ailleurs on est en train de défaire tout ce que la France de la Libération avait réussi à construire. Là, il s'agissait d'égalité ! Ici de liberté !

Qu'en revanche les journalistes de tout bord et de toute qualité se vautrent si complaisamment au service d'une audience tapageuse, au point de ne plus faire ni leur travail de vérification de l'information, ni celui d'explication ; au point de renoncer à toute prudence laisse songeur. On cherche la rigueur intellectuelle : on la trouve malaisément. On cherche des intellectuels ; ils se sont tus et l'on n'a plus affaire qu'à des intellectuels médiatiques à l'œuvre parfois bien discrète ; controversée. Le journaliste se pique désormais d'être penseur et de donner des leçons et tout ce joli monde oublie de vérifier ; de prendre du recul. Et cherche l'expert qui fera le mieux le buzz.

De Sartre ou Foucault à Onfray ! ce n'est même plus une dégringolade mais une honteuse trahison

C'est ainsi que des non-événements comme cette convention à tout prendre fasciste et vraisemblablement ratée pour l'objectif qu'elle s'était fixé de séduire une partie de la droite traditionnelle devient un phénomène national ; tapageur ; faisant une et diatribes ; controverses et menaces d'exclusion.

C'est cette complaisance à l'égard de l'extrême-droite qui m'effraie.

Ils ne pourront pas dire demain : on n'avait pas vu !