Bloc-Notes 2017
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Dubitatif

C'est peut-être ce qui me navre le plus. Ce passage d'un article récent : non point le propos en lui-même mais cette juxtaposition entre responsable du FN et professeur de philosophie. Je n'arrive pas à ne pas trouver contradictoire, injurieux même, à la décence comme au bon sens comme à la décence, de n'avoir pas même puisé dans la philosophie, et, qui plus est, dans son enseignement, de quoi se prémunor au moins des discours de haine, d'exclusion.

Je ne suis pas naïf et n'ignore pas les contre-exemples ; je sais qu'entre morale, philosophie et politique le gouffre est immense ; combien cette dernière est plus affaire de passion que de raison. Qu'il n'est nul chemin, pas même sinueux, qui mènerait d'une pensée rigoureuse et méthodique à une action cohérente.

Mais quand même !

En son essence comme en son origine grecque, la philosophie est effort humain pour dénicher quelque sens à notre rapport au monde ; je ne peux la concevoir autrement que comme une tentative d'hominisation, ou, pour parler comme Serres, d'hominescence. Politique et philosophie naissent assurément ensemble mais l'une comme l'autre sur fond de ce tragique si difficile à saisir, si aisé à mécomprendre, où exister même est piégeux pour les risques encourus d'injustice et d'ὕϐρις, où, surtout, quelque ordre que l'on parvienne à peser ou à fonder, il ne faut espérer ni plus qu'il parvienne mieux qu'à écorner provisoirement le chaos ambiant ni mieux qu'il instaure - mais si provisoirement encore - un espace où l'homme eût sa chance de se déployer.

Je peux comprendre un Socrate s'écartant autant que possible de la chose politique. Je ne comprends pas qu'on puisse se targuer de pratiquer la chose phulosophique et de promouvoir en même temps un tel discours d'eclusion, de peur et de haine de l'autre.