Textes

Aristote (325-323 av. J.-C.), Politiques,Livre 111, chap. 7, 1279 a 25, trad. P. Pellerin, coll. " GF ", Éd. Flammarion, 1990, pp. 229-230

 

AristotePuisque constitution et gouvernement signifient la même chose, et qu'un gouvernement c'est ce qui est souverain dans les cités, il est nécessaire que soit souverain soit un seul individu, soit un petit nombre, soit un grand nombre de gens. Quand cet individu, ce petit ou ce grand nombre gouvernent en vue de l'avantage commun, nécessairement ces constitutions sont droites, mai quand c'est en vue de l'avantage propre de cet individu, de ce petit ou de ce grand nombre, ce sont des déviations. Car ou bien il ne faut pas appeler citoyens ceux qui participent à la vie de la cité, ou bien il faut qu'ils en partagent les avan­tages. Nous appelons d'ordinaire royauté celle des monarchies qui a en vue l'avantage commun ; parmi les constitutions donnant le pouvoir à un nombre de gens petit mais supérieur à un, nous en appelons une l'aristocratie soit parce que les meilleurs y ont le pouvoir, soit parce qu'on y gouverne pour le plus grand bien de la cité et de ceux qui en sont membres. Quand c'est la multitude qui détient le gouvernement en vue de l'avantage commun, la constitution est appelée du nom commun à toutes les constitutions, un gouvernement constitutionnel. Et c'est rationnel, car il peut arriver qu'un seul individu ou qu'un petit nombre se distingue par sa vertu, alors qu'il est vraiment difficile qu'un grand nombre de gens possèdent une vertu dans tous les domaines, avec comme exception principale la vertu guerrière : elle naît en effet dans la masse. C'est pourquoi dans cette dernière sorte de constitution c'est la classe guerrière qui est absolument souveraine et ce sont ceux qui détiennent les armes qui participent au pouvoir. Les déviations des constitutions qu'on a indiquées sont : la tyrannie pour la royauté, l'oligarchie pour l'aristocratie, la démocratie pour le gouvernement constitutionnel. Car la tyrannie est une monarchie qui vise l'avantage du monarque, l'oligarchie celui des gens aisés, la démocratie vise l'avantage des gens modestes. Aucune de ces formes ne vise l'avantage commun