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Discours du 17 juin 1940

Français! A l'appel de M. le président de la République, j'assume à partir d'aujourd'hui la direction du gouvernement de la France. Sûr de l'affection de notre admirable armée, qui lutte avec un héroïsme digne de ses longues traditions militaires contre un ennemi supérieur en nombre et en armes, sûr que par sa magnifique résistance elle a rempli son devoir vis-à-vis de nos alliés, sûr de l'appui des anciens combattants que j'ai eu la fierté de commander, sûr de la confiance du peuple tout entier, je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur. En ces heures douloureuses, je pense aux malheureux réfugiés, qui, dans un dénuement extrême, sillonnent nos routes. Je leur exprime ma compassion et ma sollicitude. C'est le cœur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat. (2) Je me suis adressé cette nuit à l'adversaire pour lui demander s'il est prêt à rechercher avec nous, entre soldats, après la lutte et dans l'honneur, les moyens de mettre un terme aux hostilités. Que tous les Français se groupent autour du gouvernement que je préside pendant ces dures épreuves et fassent taire leur angoisse pour n'écouter que leur foi dans le destin de la patrie.

 

"Il faut cesser le combat"

La phrase "C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat" sème la consternation. Interprétée comme un cessez-le-feu, de nombreuses unités déposent les armes. Sur la suggestion de Paul Baudouin, ministre des Affaires étrangères, la phrase fut rectifiée de la manière suivante : " C'est le cœur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut tenter de cesser le combat." Ce dernier texte, tout aussi maladroit, sera publié dans les journaux du soir. Enfin, pour qu'aucune équivoque ne puisse subsister, Paul Baudouin, prononce, à 21h.20, l'allocution suivante à la radio :

 

Allocution "rectificative" de Paul Baudouin

Le gouvernement français a décidé de demander ses conditions à l'Allemagne. Il va sans dire qu'elle n'acceptera aucune condition contraire à son honneur ou à sa dignité. La France ne saurait consentir à des clauses qui signifieraient la fin de toute liberté spirituelle pour son peuple... Nos troupes épuisées n'ont pas pu remplacer les chars, les canons, les avions qui nous manquaient. Nous n'étions que 40 millions contre 80, sans la menace de l'invasion italienne.

Sans doute, dans le monde entier où le nom de la France et de la civilisation qu'elle incarne évoquent un écho dans les coeurs, d'innombrables sympathies se sont levées. Sans doute, nous avons reçu l'aide de nos alliés, de la Grande-Bretagne dont la flotte unie à la nôtre n'a jamais perdu la maîtrise des mers, dont les troupes et la magnifique aviation ont partagé nos combats, de la Pologne, de la Norvège, de la Hollande, de la Belgique. Mais, insuffisamment préparés à l'épreuve terrible de la guerre moderne qui ne s'improvise pas et pour laquelle notre ennemi n'avait cessé d'accroître sa puissance, nos alliés et nos amis n'ont pas pu apporter en temps utile le concours nécessaire à l'avant-garde que constituait l'ar­mée française.

Voilà pourquoi le gouvernement présidé par le Maré­chal Pétain a dû demander à l'ennemi quelles seraient ses conditions de paix. Mais il n'a pas pour autant abandonné la lutte, ni déposé les armes. Comme l'a dit ce matin le Maréchal Pétain, le pays est prêt à rechercher dans l'hon­neur, les moyens de mettre un terme aux hostilités. II n'est pas prêt, et ne sera jamais prêt à accepter des condi­tions déshonorantes, à abandonner la liberté spirituelle de notre peuple, à trahir l'âme de la France

Si les Français peuvent sauver ces valeurs spirituelles auxquelles ils sont plus attachés qu'à la vie, ils consenti­ront, pour cela, tous les renoncements individuels. Mais s'ils sont contraints de choisir entre l'existence et l'hon­neur, leur choix est fait et, par leur sacrifice total, c'est l'âme de la France et tout ce qu'eIle représente pour le monde, qu'ils auront sauvé.