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Réforme constitutionnelle

Il se dit ici et là que l’Élysée réfléchirait à une réforme constitutionnelle qui aurait pour but à la fois de se refaire une virginité après les meurtrissures de la réforme des retraites et de réconcilier les français avec le politique qu'ils bouderaient - ce dont les populismes seraient le symptôme. Et peut-être de venger l'affront d'un premier projet de réforme que le premier quinquennat ne réussit pas à faire aboutir.

Délicieuse niaiserie de gamin capricieux : quand ça ne marche pas, on s'en prend au joujou. Le pire est qu'ici on sollicite juristes et constitutionnalistes … aurait-on oublié qu'on ne peut être à la fois juge et parti et que le fondement même de toute vie démocratique est le suffrage universel, instance politique par excellence, qu'en conséquence la constitution qui en fixe les règles du jeu, les normes de fonctionnement ne peut, directement ou indirectement, émaner que de ce suffrage universel. Certainement pas de juristes aussi éminents soient-ils.

Fut-ce un hasard si les deux dernières constitutions ( 46 et 58) furent approuvées par référendum ?

On sait que la Ve a placé très fortement le curseur du côté de l'exécutif au détriment du législatif : telle était la marque de fabrique de de Gaulle et sans doute fallait-il - à ce point ? - contre-balancer les excès de la IVe .

Mais petites réformes après d'autres, la pire étant assurément le quinquennat et l'inversion du calendrier, on semble être arrivé à un point de non-retour. Cette constitution qui va bientôt battre le record de longévité de celle de 1875 paraît bien exsangue au point que même les velléités de réajustements - comme celle sarkozyste consistant à réduire l'utilisation du 49-3 à une par session, hors les textes budgétaires finissent par se retourner comme gant mité dont personne ne voudrait même par grand froid.

On s'apprête quand même dans les semaines à venir à faire passer une réforme (celle des retraites) dont personne ne veut sans que ce texte ait été discuté en sa totalité ni même voté tout ceci en usant de tous les subterfuges permettant de contraindre le Parlement à discuter les textes budgétaires en temps restreint. Les retraites sont question avant tout sociale et politique ; qu'importe ! Faire fi ainsi de la lettre comme de l'esprit de la Constitution ; des principes élémentaires de la démocratie finira par se payer. Mais je crains qu'à la fin ce ne soit nous qui en payions le tribut …

On avait deviné qu'une assemblée sans majorité absolue poserait chicanes ! nous y voici. On a résolu, parce que le petit manager étriqué de l’Élysée ne peut l'entendre autrement, d'en faire question technique. On ne tue pas le politique : il finit toujours par vous épuiser avant.

Alors bien sûr on peut accuser les Insoumis de tous les excès, suspendre un ou deux députés, imputer à Mélenchon la paternité de tous ces manquements à la démocratie, on ne fera jamais que jeter un voile pudique sur une manipulation institutionnelle que même le Conseil d'Etat a repérée.

Macron a oublié que par deux fois il fut élu, faute de mieux, sans réelle adhésion. Il veut l'ignorer : il ne le pourra pas longtemps ! Nous, non plus !