Sciences humaines

Anthropologie structurale II
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Si les sciences humaines témoignent (...) d'une sorte d'impuissance (qui, souvent, recouvre simplement de la mauvaise volonté), c'est qu'un paradoxe les guette, dont elles perçoivent confusément la menace: toute définition correcte du fait scientifique a pour effet d'appauvrir la réalité sensible et donc de la déshumaniser. Par conséquent, pour autant que les sciences humaines réussissent à faire œuvre véritablement scientifique, chez elles la distinction entre l'humain et le naturel doit aller en s'atténuant. Si jamais elles deviennent des sciences de plein droit, elles cesseront de se distinguer des autres. D'où le dilemme que les sciences humaines n'ont pas osé affronter: soit conserver leur originalité et s'incliner devant l'antinomie, dès lors insurmontable, de la conscience et de l'expérience; soit prétendre la dépasser; mais en renonçant alors à occuper une place à part dans le système des sciences, et en acceptant de rentrer, si l'on peut dire, «dans le rang».