palimpsesteA propos de la systémique

3 - Les quatre concepts principaux de l'approche systémique

Etymologie L'aporie de l'individu suivant

 

Ce qui semble assez clair est combien la systémique se donne comme une nouvelle façon de penser, comme une révolution épistémologique - ce qui n'esr pas rien - qui se conçoit à partir de quatre concepts fondateurs :

- la complexité

- la globalité

- l'interaction

- l'organisation (ou système)

Mais sous ces concepts, d'autres, une bonne dizaine, qui méritent d'être approchés au moins pour comprendre ce qui de nouveauté se joue ici. (voir glossaire)

information
causalité circulaire
ouverture et fermeture
finalité
régulation
boite blanche et boîte noire
rétroaction
structure et niveau d'organisation
synchronie et diachronie
ago-antagonisme
variété
 

Mais la systémique ne se veut pas seulement une théorie mais - assez logiquement d'ailleurs faute de quoi elle reviendrait d'emblée sur sa dimension globalisante - mais en même temps comme une pratique. En ceci aussi elle revient largement sur un des préceptes les plus classiques de la science positive tels que A Comte les avait pu définir : la distinction entre science et technique quand même l'une procédât de l'autre. Qu'il y eût dans le positivisme une continuité entre le Cours de philosophie positive et le Système de politique positive se lit dans la succession de ces deux oeuvres principales, dans l'adage positiviste Voir pour savoir, savoir pour comprendre, comprendre pour agir. Pour autant comme tous ses successeurs, Comte avait su maintenir la distinction entre la logique de la pensée - qui est une logique du retrait et du doute - et celle de l'action qui est celle de l'engagement et de la certitude.

Le lien est ici où le politique jouxte la pensée qui se lit parfaitement dans cette remarque faite par E Morin dans l'entretien qu'il avait accordé à nonfiction :

J’ai oublié de mentionner tout à l’heure des gens comme von Foerster, von Neumann – von Neumann qui ne m’intéresse pas seulement pour la théorie des jeux mais surtout pour la différence entre machine vivante et machine artificielle – qui ont été fondamentalement féconds pour moi au moment d’écrire La Méthode. Ces penseurs ont été à la fois des mathématiciens, des ingénieurs et des penseurs et n’ont jamais été reconnus, n’ont jamais eu le statut de penseur et du reste ont été ignorés aussi bien par les sciences physiques que par les sciences humaines ou que par la philosophie. Ils ont fondé les idées de l’auto-organisation. C’est important que je me réfère à ce type d’auteurs. 1

Complexité

Quand on évoque le terme on songe d'abord à compliqué avant même de composé de différents éléments. Il y a quelque chose de cela mais en même temps beaucoup plus : c'est que ce qui est compliqué est seulement ce qui est intriqué, entrelacé ; ce qu'avec un peu d'habileté on doit bien pouvoir dénouer ; déconstruire.

En réalité complexe dit autre chose

Ce qui est compliqué tient seulement au grand nombre d’éléments plus ou moins en désordre mais dont le principe de composition est aisément repérable. C’est le cas, par exemple, en histoire où il est difficile de repérer les causes qui font agir chacun des acteurs pris isolément mais où, en revanche, il demeure possible de tracer une causalité générale qui donne un sens à un événement. C’est le sens que prendra la théorie du hasard de Cournot , par exemple. En revanche ce qui est complexe tient à la fois au nombre de ses éléments mais surtout des liaisons entre ceux-ci ; à l’incertitude provoquée par les aléas de son environnement et, enfin, aux rapports ambivalents entretenus entre déterminisme et hasard apparents.

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Se lit, d'emblée, dans ce concept, tout ce qui peut heurter la raison analytique et rend l'approche systémique si malaisée et dérangeante : lorsque l'on peut lire chez un Morin par exemple, à propos d'un phénomène qu'il est à la fois causant et causé, strictement déterminé mais en même temps parfaitement contingent, il n'est pas difficile de comprendre ce en quoi ceci semble contrevenir au principe élémentaire de contradiction ....

En même temps ceci illustre la difficulté de compréhension posée par toute réalité complexe : si à première vue, l'objet semble simple, ce n'est que parce qu'il est appréhendé d'un seul point de vue ou de manière trop générale. En réalité c'est bien le manque d'information qui produit le flou, l'incertain, l'ambigu. Tout à fait révélateur ici que l'exemple pris par Morin du baiser passe ainsi de l'objet simple à l'objet complexe. En réalité, il en va ici comme des géométries non euclidiennes qui n'avaient pas biffé l'espace euclidien mais en avaient simplement fait un cas particulier : ici le simple n'est jamais que le cas particulier d'un objet plus complexe. C'est ainsi que l'on verra la systémique se jouer presque toujours du couple apparence/réalité.

Ce concept renvoie à toutes les difficultés de compréhension (flou, incertain, imprévisible, ambigu, aléatoire) posées par l'appréhension d'une réalité complexe et qui se traduisent en fait pour l'observateur par un manque d'information (accessible ou non).

Globalité

Dans l'idée de globalité, il y a d'abord celle du fameux le tout est plus que la somme de ses parties autrement dit, un système ne réside pas dans l'addition de ces dernières mais consiste précisément dans leur organisation. C'est dire, et ce n'est pas rien, que l'analyse de chacune des parties, prises isolément, ne permettra pas de comprendre le tout. Ecrire cela c'est bien entendu évoquer l'irréductibilité.

Ceci signifie qu’apparaissent, au niveau global, des qualités que ne possédaient pas les parties ce qui ruine effectivement l’idée d’addition. Néanmoins on a pas tout dit lorsqu’on affirme ainsi que le tout est plus que la somme des parties parce qu’en même temps on pourrait tout aussi bien dire que la partie est plus que la partie : parce qu’intégrée au système,  la partie déploie des caractéristiques qu’isolément elle n’aurait pu développer. On pourrait enfin affirmer aussi que le tout est moins que la somme des partis ne serait-ce que en tant qu’organisation, il impose des contraintes aux éléments qui le composent.

Importe alors la notion d’émergence : ce qui émerge de la globalité, ce plus – et éventuellement ce moins – du tout par rapport aux parties s’impose comme une donnée phénoménale ; est irréductible au sens que ces propriétés nouvelles ne sont pas déductibles des éléments considérés isolément. De ce point de vue il faut même abandonner le concept de superstructure dans la mesure où y prime la rétroactivité, c'est-à-dire où le produit final rétroagit en transformant ce qui le produit.

De même que le fruit, produit ultime, est en même temps l’ovaire porteur des vertus reproductrices, de même l’émergence peut contribuer rétroactivement à produire et reproduire ce qui la produit.   2

Sous le nom d'approche globale, le concept désigne également la voie d'entrée dans la démarche systémique. On entend par là qu'il convient d'aborder tous les aspects d'un problème progressivement, mais non séquentiellement : partir d'une vue générale (globale) pour approfondir les détails, avec de nombreuses itérations et retours en arrière pour compléter ou corriger la vision antérieure.

Interaction

Concept tout aussi central parce que d’une certaine manière il change tout et en tout cas les fondamentaux de la science physique classique qui considérait la relation entre deux éléments comme à la fois unilatérale et causale. Or, ici non seulement la relation est réversible mais déborde largement le strict cadre de la relation cause/effet.

Ainsi, par exemple, on observera dans la communication quatre type d’interaction : visuelle ; le langage et la communication des idées ; l’imitation ; la suggestion.

Si dans la mécanique classique, l’interaction se réduit à un jeu de forces, en revanche dans les systèmes complexes, la relation entre les éléments se traduit par un rapport d’influence ou d’échange pouvant porter aussi bien sur des flux de matière que d’énergie ou d’information . Ce qu’illustre à l’envi le concept de rétroaction.

Or ce dernier concept change tout : on ne se situe plus dans la perspective d'une causalité linéaire qui fonctionnerait dans l'unique sens de la cause vers l'effet. Et, dès lors, le travail de la preuve ne peut plus non plus se contenter seulement de faire glisser la valeur de vérité le long de la chaîne des raisons, de la proposition initiale posée comme une évidence ( le cogito) vers les effets ultimes. Ne peut pas non plus à l'instar de la dialectique hegélienne promouvoir dans une perspective cette fois-ci ternaire et non plus binaire, le conflit comme le moteur de toute dynamique et causation mais supposer toujours que le troisième terme, dépassement de la contradiction pré-existante, fût seulement la conséquence précédente. Non, cete fois-ci, il y a boucle, le chemin subitement se retourne, s'inverse et ce qui avait été exclu d'emblée, s'insinue dans le champ du savoir : l'irréversibilité du temps.

La logique classique cherchait la loi, c'est-à-dire des relations constantes et déterminables entre les objets ; cherchait donc sous la variabilité, une constante. Ici au contraire, on est contraint constamment de jongler avec des relations qui s'inversent, rendant inconcevable tout retour en arrière, tout retour au statu quo ante. Le temps que l'on avait chassé par la porte s'est insinué par la fenêtre : son irréversibilité avec lui. Le propre même d'un système - le concept même de crise le laisse entrevoir - est que chaque changement qui l'affecte, rejaillissant sur ses structures mêmes et les relations entretenues, produit un changement tel que jamais l'organisaton qui en résultera ne pourra être identique à ce qu'elle fut auparavant.

Organisation (ou système)

Sans revenir sur sa définition on peut néanmoins repérer ceci : l'organisation est le concept central de la systémique. l’organisation peut être entendue comme un agencement de relations entre composants ou individus qui produit une nouvelle unité possédant des propriétés que n’ont pas ses composants.

Mais l’organisation c’est aussi un processus par lequel matière, énergie et information sont mis en forme ou en œuvre. Ce qui est particulièrement intéressant réside ainsi dans le fait que le concept d’organisation recouvre à la fois la notion d’état et de processus et que ces deux dimensions, statique et dynamique sont indissolublement liées de telle sorte que l’on puisse considérer que l’organisation suppose implicitement l’idée d’une optimisation des composants du système et de leur agencement . ainsi un système sera-t-il toujours modélisé dans sa double dimension à la fois structurelle et fonctionnelle.

Structurellement elle peut être représentée sous la forme d’un organigramme ; fonctionnellement décrite par un programme.

 

4 - Spécificités de l'approche systémique


1) lire

2) Morin