Palimpsestes

Présidentielles 2012
Place de la Concorde 15 avril 2012

Mes chers compatriotes,

Ils pensaient que vous ne viendriez pas.

Ils pensaient peut-être même espéraient-ils que le peuple de France ne serait pas au rendez-vous.

Et le peuple de France est venu… puisque vous êtes là !

Le peuple de France est venu de tous les quartiers de Paris.

Il est venu de toute l’Ile-de-France.

Il est venu de toutes les provinces, de toutes les villes, depuis Lyon jusqu’à Nantes, depuis Bordeaux jusqu’à Strasbourg, depuis Rouen jusqu’à Lille, depuis Marseille jusqu’à Brest, des Pyrénées jusqu’aux Vosges, des Alpes jusqu’aux Monts d’Auvergne.

Il est venu même de nos territoires d’Outre-mer…

J’ai donné rendez-vous à la France que l’on n’entend jamais parce qu’on ne lui donne jamais la parole, à la France qui affronte les difficultés de la vie sans jamais rien demander parce qu’elle a trop de fierté, à la France qui souffre sans jamais se plaindre parce qu’elle a trop de pudeur, à la France qui ne proteste pas, à la France qui ne casse pas, à la France qui en a assez que l’on parle en son nom.

Et dans les profondeurs du pays, la France silencieuse a répondu par votre présence.

Sur cette place dont le nom exprime la volonté de toute une Nation de surmonter les épreuves qui l’ont déchirée et qui ont fait couler tant de sang et de larmes, les cœurs des dizaines de milliers de Français qui s’y trouvent rassemblés battent à l’unisson des cœurs des millions de Français qui, dans toutes les villes et dans tous les villages, s’interrogent avec inquiétude sur l’avenir de la France.

C’est Malaparte, l’italien, qui a le mieux parlé de ce lieu où commencent et finissent depuis deux siècles toutes nos tragédies nationales : « La place de la Concorde est une idée ; ce n’est pas une place, c’est une manière de penser. Tout ce qui est vraiment Français se mesure ici ».

La vague immense qui submerge aujourd’hui le cœur de Paris porte cette idée de France comme une irrésistible espérance.

C’est la France qui est ici.

C’est le même Malaparte qui dit que l’Italien considère l’histoire comme un caprice des dieux, l’Anglais comme un fait de la nature, le Français comme un fait de la volonté des hommes.

C’est cette volonté française de faire l’histoire pour ne pas la subir qui a conduit aujourd’hui jusqu’ici la multitude de ceux qui ne veulent pas que l’on décide à leur place au moment de se prononcer pour un choix dont l’importance sera historique.

Vous n’êtes pas là seulement pour vous-mêmes. Vous êtes les représentants de tous ceux qui n’ont pas pu venir mais qui ne veulent pas cesser d’espérer dans la France.

Vous êtes les porte-paroles de ceux qui n’ont jamais la parole, de ceux qui ne demandent jamais rien, qui ne se plaignent jamais, mais qui sont fiers de la France, fiers de sa culture, fiers de sa langue, fiers de son identité, fiers de ce qu’elle a accompli dans son Histoire, fiers de ce qu’elle représente pour tant d’hommes dans le monde.

De ceux qui n’en peuvent plus du dénigrement de la France, de sa culpabilisation, que l’on se permette de la mettre en cause à la moindre occasion.

Vous êtes les témoins,

ceux qui maintiennent vivantes la parole et la pensée quand la parole est confisquée et quand la pensée est interdite ;

ceux qui opposent inlassablement la vérité à la répétition du mensonge jusqu’à ce que la vérité finisse par triompher du mensonge.

Beaucoup d’entre vous ne sont pas engagés, peut-être s’imaginaient-ils ne jamais le faire ? Ils sont venus parce qu’ils pensent à leur avenir et à celui de leurs enfants, parce qu’ils ont acquis l’intime conviction que quelque chose d’essentiel est en jeu et parce qu’une sourde inquiétude les saisit quand ils entendent le tumulte du monde, quand ils voient les épreuves auxquelles sont confrontés tour à tour des pays qui nous sont si proches.

Le 22 avril et le 6 mai, il ne s’agira pas de choisir un camp. Il s’agira de décider pour l’avenir à un moment où l’avenir se joue.

C’est pourquoi je veux aussi parler à ces millions de français qu’une histoire personnelle ou familiale n’attache pas à un parti.

Je veux parler à cette majorité silencieuse qui, une fois encore, tient le destin de la France entre ses mains.

Je veux lui dire qu’au milieu des crises les plus dangereuses que le monde ait connues depuis un demi-siècle, entre un monde ancien qui n’en finit pas de mourir et un monde nouveau qui a du mal à naître, une seule chose doit compter : où voulons-nous aller ?

Jamais sans doute depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les choix politiques que nous avons à faire n’ont été aussi lourds de conséquences.

Je sais que beaucoup de nos compatriotes qui souffrent ont envie de crier leur souffrance, de crier leur colère en votant pour les extrêmes.

Je comprends la douleur de ceux que la crise a fait souffrir. Je comprends leur colère.

Mais les solutions extrêmes n’atténueraient pas leur douleur. Elles ne les protégeraient pas. Elles ne leur apporteraient aucune aide. Elles les feraient souffrir davantage encore. Car les solutions extrêmes sont des mensonges et les mensonges font plus de mal que la vérité.

Je comprends l’envie de dire « non » à tout pour ceux qui ont le sentiment si désespérant et si douloureux d’être dépossédés de tout, d’avoir perdu le contrôle de leur vie, la maîtrise de leur destin.

Je comprends l’amertume et le sentiment d’injustice de celui qui n’arrive pas à vivre de son travail, qui n’arrive plus à faire vivre sa famille quand d’autres y parviennent mieux sans travailler.

Je comprends ce qu’il y a d’insupportable pour celui auquel on demande des sacrifices à cause de la crise à voir ceux qui sont responsables de cette crise continuer de prospérer…

Je comprends le désarroi d’une jeunesse qui regarde avec anxiété le chômage lui barrer la route, la planète s’épuiser, la montagne des dettes qu’elle devra payer grandir chaque jour.

Dans la situation où se trouve la France, où se trouve l’Europe, où se trouve le monde, nul ne peut espérer dissocier son destin personnel de celui de tous. Nul ne peut espérer s’en sortir seul.

Je suis allé à la rencontre des Français. J’ai entendu leurs interrogations, leurs doutes.

Que demandent-ils ?

Ils demandent la justice.

Ils demandent la liberté.

Ils demandent l’espoir.

La justice qui est dans l’équilibre des droits et des devoirs.

La liberté qui permet à chacun d’écrire sa propre histoire.

L’espoir qui fait reculer la peur de l’avenir.

Mais comment répondre si délibérément on tourne le dos à la réalité du monde ?

Comment répondre si délibérément on fait semblant d’être seuls au monde ?

Comment affronter des crises dont on se refuserait à reconnaître l’existence ?

Comment relever des défis que l’on ne voudrait pas regarder en face ?

C’est en affrontant les difficultés que l’on peut les surmonter.

Notre époque réclame autre chose que l’outrance ou le déni.

Face à la montée des périls qui nous menacent elle exige de la solidité et de la gravité.

La situation de l’Europe, l’état du monde ne nous laissent aucun droit à l’erreur.

Une course contre la montre est désormais engagée avec, la crise économique, la désintégration sociale, le déclin de l’humanisme.

Les crises qui se sont succédé depuis quatre ans sont des avertissements que nous devons entendre.

Ce qui est en jeu, c’est la survie d’une forme de civilisation, la nôtre, dans un monde où la passion exclusive pour les gains du court terme et les crispations identitaires s’affrontent de plus en plus violemment, préparant, si l’on n’y prend pas garde, les grandes tragédies du futur.

Comme à l’orée de la Renaissance, des Lumières ou de la Révolution industrielle, nous n’avons pas le droit de manquer notre entrée dans l’ère nouvelle que préparent les bouleversements d’aujourd’hui.

Si nous ne voulons pas prendre le risque de perdre : notre agriculture, nos usines, nos emplois, notre art de vivre, d’aimer et de penser, notre culture, notre littérature, notre langue, tout ce à quoi nous tenons, tout ce dans quoi nous avons mis tout le génie de la France depuis des siècles. Il faut, sans biaiser, tirer les conséquences de ces crises terribles que le monde vient de connaître.

Nous avons réussi ce miracle que 66 millions d’individus farouchement individualistes forment ensemble une seule et même personne dont le génie singulier n’a cessé, depuis des siècles, d’éclairer l’Humanité.

Dans le monde entier, la France ce n’est pas le nom d’un pays, c’est le nom d’une civilisation.

Quand on entend France, on entend Molière, Voltaire, Chateaubriand.

On entend la prière de Péguy à Notre-Dame de Chartres :

« Deux mille ans de labeur ont fait de cette terre

Un réservoir sans fin pour les âges nouveaux.»

On entend liberté, égalité, fraternité,

on entend le cri de Valmy,

on entend la Grande Révolution disant au monde « le bonheur est une idée neuve »,

on entend la voix de Napoléon dictant le bulletin de victoire au Soleil d’Austerlitz,

on entend le « non » du 18 juin et la voix d’Aimé Césaire jetant Racine, Zola et Hugo à la figure des censeurs de Vichy.

Nous n’avons pas le droit de laisser dilapider cet héritage.

La facilité, le renoncement, la mollesse ne sont pas dans les gènes de la France.

On pourrait se dire qu’après tout, la France en a tant vu, qu’elle a survécu à tant d’épreuves, qu’au fond elle ne risque rien.

Mais si la France a survécu, c’est parce qu’à chaque fois qu’elle s’est trouvée confronter à de grandes échéances, elle a su, dans un ultime effort venu des profondeurs du pays, rassembler toutes ses forces pour changer le cours du destin.

La leçon de l’Histoire, c’est que la France n’a pesé dans le monde et n’a été forte dans l’épreuve que lorsque, surmontant ses divisions naturelles, elle a réussi à s’unir autour d’une grande ambition.

La France forte, c’est la France de Valmy et celle de la Résistance.

C’est la France que Jean Monnet avait rassemblée au Commissariat du Plan en 1946 pour reconstruire un pays dévasté par la guerre et lui ouvrir les portes d’un avenir si prospère qu’on parlera de lui en disant « les Trente Glorieuses ».

Les voies de l’avenir nous les connaissons.

La société de la connaissance. L’économie du savoir. La révolution numérique. La réponse aux défis de l’écologie. L’adaptation de notre appareil productif et de notre organisation sociale à l’épuisement des énergies fossiles, à la lente mais inexorable disparition du pétrole et à la non moins inexorable augmentation de son prix.

C’est un immense effort de formation, de recherche, d’innovation, d’investissement qui attend la France. C’est toute la croissance de demain, c’est toute la qualité de la vie de demain qui dépendent de cet effort.

Nous avons la jeunesse, nous avons l’intelligence, nous avons les savants, nous avons les entrepreneurs pour inventer ce nouveau modèle de croissance, ce nouveau modèle de société, pour imaginer le modèle français du XXIe siècle.

Ce nouveau modèle français, il répondra au besoin de justice parce qu’il ne sera plus soumis à la dictature de la finance, à ses profits exorbitants, à sa tyrannie de la rentabilité à court terme, parce que tout le monde sera formé, parce que tout le monde sera qualifié, parce que tout le monde pourra accéder à la promotion sociale par l’instruction et par la formation. Alors il pourra y avoir un emploi pour chacun.

Dans ce nouveau modèle français, l’école sera attentive à la fragilité des enfants et plus aucun élève n’entrera au collège sans savoir lire, écrire et compter.

Dans ce nouveau modèle français, chaque jeune français qui choisira l’alternance trouvera une place dans une entreprise.

Dans ce nouveau modèle français, les chômeurs auront un droit à la formation. Ils auront aussi un devoir : accepter l’emploi qu’on leur proposera.

Dans ce nouveau modèle français, chacun aura droit à la formation tout au long de sa vie.

Ce nouveau modèle français répondra au besoin de tous de reprendre la maîtrise de leur destin, de se sentir libre de choisir son rythme de vie, de se sentir pleinement responsable de soi-même.

Dans ce nouveau modèle français, tout le monde aura droit à une deuxième chance et toute famille de bonne foi, confrontée à un accident de la vie dont la conséquence est le surendettement, pourra, comme une entreprise, bénéficier de la faillite civile telle qu’elle existe en Alsace afin de pouvoir redémarrer dans la vie.

Dans ce nouveau modèle français, on récompensera l’effort, le mérite, le travail. On ne dénoncera pas le talent, la réussite, le succès. La jalousie, l’envie, l’amertume ne sont pas des valeurs françaises.

Je ne veux pas d’une France nivelée, égalitariste, qui tournerait le dos aux talents parce qu’elle en aurait peur.

Ce nouveau modèle français rendra l’espoir à ceux qui l’ont perdu, parce que ce sera un modèle de progrès, un modèle de développement où l’avenir sera de nouveau une promesse où les enfants pourront espérer vivre mieux que leurs parents.

Ce que je vous propose, c’est de réunir les conditions pour que la France organise les « Trente Glorieuses » du XXIe siècle.

Ce que je vous propose, c’est de renouveler l’exploit qu’ont accompli les hommes de l’après-guerre qui avaient si bien tiré les leçons des grandes fautes du passé et des tragédies qu’elles avaient engendrées.

Ce que je vous propose, c’est de mobiliser à nouveau toutes les forces intellectuelles, morales et sociales de la Nation. C’est de rendre la parole au peuple quand les corporatismes et les conservatismes se liguent pour empêcher le pays d’avancer. C’est de déconstruire l’État bureaucratique pour reconstruire un État entrepreneur qui soit une force d’entraînement et un point d’appui pour tous ceux qui créent, qui inventent, qui entreprennent.

Ce que je vous propose, c’est de remplacer le capitalisme financier par un capitalisme d’entrepreneurs. Nous ne voulons plus qu’une infime minorité dévoye les idées qui sont les nôtres.

Ce que je vous propose, c’est un État qui réduit ses dépenses, refuse la drogue de la dépense publique et remet de l’ordre dans ses finances pour pouvoir investir, pour construire l’avenir.

La condition, c’est l’unité nationale pour pouvoir faire bloc face à toutes les forces de désintégration qui menacent notre société et notre économie. Je parle au peuple de France, pas à la gauche, pas à la droite. Je parle aux citoyens quels qu’ils soient, pas seulement aux militants.

 

La condition, c’est que nous soyons rassemblés autour de nos valeurs pour défendre notre identité et notre mode de vie, parce que c’est la condition de notre cohésion et de notre solidarité, parce que c’est notre singularité qui fera la valeur de nos produits et de nos services, parce que dans le monde de demain la culture sera l’une des richesses les plus précieuses.

A l’heure où il nous faut affronter les conséquences de la crise, ce serait folie d’affaiblir notre modèle républicain, nous n’accepterons jamais le communautarisme ! A l’heure où nous avons besoin de la plus grande cohésion, nous ne laisserons pas détruire les institutions qui fondent la république : l’école et la famille.

La France rassemblée, c’est la France débarrassée des vieux démons du sectarisme et du communautarisme, c’est la France qui peut prétendre renouveler l’exploit des Trente Glorieuses parce qu’elle pourra peser en Europe et peser dans le monde.

Car il ne s’agit pas de rassembler les Français pour qu’ils se ferment au monde mais au contraire pour qu’ils soient assez forts pour ne pas avoir peur de l’ouverture au monde. Jamais je ne plaiderai le repliement.

Mais nous avons commis une erreur pendant trente ans en passant la Nation par pertes et profits alors que dans la mondialisation, partout, ce sont les Nations qui tiennent le premier rang parce qu’elles sont portées par un élan collectif qui leur donne une force irrésistible dans la compétition mondiale.

Nous avons eu tort en Europe de négliger les frontières, tort d’ouvrir nos marchés sans contrepartie, tort de laisser la bureaucratie prendre le pas sur la volonté politique et sur la responsabilité politique, tort de bâtir une Europe de la consommation sans nous soucier de l’Europe de la production.

Si les frontières extérieures de l’Europe ne sont pas protégées contre une immigration incontrôlée, contre les concurrences déloyales, contre les dumpings, il n’y aura pas de nouveau modèle français, et il n’y aura plus de civilisation européenne.

J’ai dit ma détermination à faire changer l’Europe sur la question des frontières. J’irai jusqu’au bout. J’irai jusqu’à suspendre s’il le faut, les accords de Schengen et à rétablir des contrôles ciblés à nos frontières.

J’irai jusqu’à appliquer s’il le faut à nos marchés publics les règles que s’appliquent les Américains en n’accordant leurs attributions qu’aux seules entreprises qui produiront sur le continent européen.

Je revendique pour la France le droit de choisir qui elle accepte sur son territoire.

Je revendique pour la France le droit de se protéger contre la concurrence de ceux qui ne respectent aucune règle.

Je revendique pour la France le droit de mettre en œuvre des politiques industrielles, des politiques de la commande publique et de réserver une partie des marchés publics aux PME.

Je revendique pour la France le droit de défendre ses valeurs, sa culture, sa langue, son modèle républicain, son identité. Parce que défendre son identité, défendre sa civilisation, ce n’est pas honteux c’est légitime.

La défense de ses droits, c’est ce que la France attend de l’Europe, c’est ce que la France demande à l’Europe. Mais la France le dit à ses partenaires, elle ne renoncera pas à les défendre elle-même si l’Europe ne les défend pas.

Je veux aller plus loin encore.

Après ce que nous avons fait pour sauver l’Euro, je veux poser non seulement le problème des frontières mais aussi celui du rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance. C’est une question que nous ne pourrons pas éluder. Car si l’Europe ne veut pas perdre pied dans l’économie mondiale elle doit absolument renouer avec la croissance.

La croissance, cela ne se décrète pas. Il ne suffit pas d’écrire le mot « croissance » dans un traité pour l’obtenir. Si l’on ne fait rien pour la compétitivité. Si l’on alourdit le coût du travail, si l’on décourage l’esprit d’entreprise, si l’on n’investit pas, ce n’est pas la croissance que l’on obtient, c’est la stagnation.

Si l’on ne change pas l’Europe, si l’on ne fait pas l’Europe de la production, l’Europe de l’investissement, nous ne pourrons pas avoir la croissance. Si la Banque centrale ne soutient pas la croissance, nous n’aurons pas assez de croissance.

La crise nous a montré les limites des règles qui ont été fixées dans le Traité de Maastricht. Je sais les difficultés d’aborder ce sujet. Je connais les obstacles. Mais nous avons le devoir d’y réfléchir.

Parce que c’est un problème majeur pour l’avenir de l’Europe.

C’est un problème stratégique pour l’Europe.

L’Europe doit apurer ses dettes, elle n’a pas le choix. Mais entre la déflation et la croissance, elle n’a pas davantage le choix. Si elle choisit la déflation, elle disparaîtra. Il faut se souvenir des années 30.

Si les Français me renouvellent leur confiance, j’ouvrirai ce débat et je mettrai la même énergie, la même détermination à faire avancer l’Europe de la croissance, l’Europe qui investit dans son avenir, que celles que j’ai mises à combattre la crise financière et à sauver l’Euro. Il ne doit pas y avoir de sujets tabous, il ne doit pas y avoir de débats interdits.

On nous avait dit que la Banque centrale ne pourrait pas intervenir pour sauver l’Euro. Et la Banque centrale s’est donnée la liberté nécessaire pour sauver l’Euro en fournissant de la liquidité aux banques.

On nous avait dit que le Gouvernement économique, c’était impossible. Et nous avons obtenu le Gouvernement économique.

On nous avait dit que la question des frontières était taboue. Et nous avons posé la question des frontières.

On nous avait dit que le débat sur la réciprocité était interdit. Et nous avons ouvert le débat sur la réciprocité.

Alors, sur le rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance, nous allons aussi ouvrir le débat. Et nous allons faire avancer l’Europe.

Mes chers compatriotes,

C’est à votre cœur et à votre raison que je m’adresse.

A votre cœur, parce que ce qui nous réunit ici, c’est l’amour de la France.

A votre raison, parce qu’il faut que le choix soit clair et que ses conséquences soient comprises.

Deux voies sont possibles.

L’une imposera les solutions du passé.

Au mieux, elle ne résoudra rien. Elle restera prisonnière de tous les conservatismes, de tous les corporatismes. Elle continuera à laisser les frontières s’effacer et la Nation s’affaiblir.

Au pire, elle découragera la réussite et elle ruinera les classes moyennes, sans enrichir les plus pauvres. Elle détruira la confiance des investisseurs. Elle nous mettra à la merci de la spéculation. Et pour s’en sortir, elle imposera l’austérité la plus dure qui plongera le pays dans la dépression et les plus vulnérables dans la misère.

L’autre voie, c’est celle qui sera tournée vers l’avenir, qui tirera les leçons des crises, qui inventera les solutions du XXIe siècle.

Je vous propose de construire un nouveau modèle de croissance, une nouvelle économie, une nouvelle ambition sociale. Entre le nationalisme et le laissez-faire, je vous propose pour la Nation la voie raisonnable de l’unité et de l’ouverture au monde.

La vocation de la France n’est pas de s’effacer ou de se taire. La vocation de la France, c’est d’agir pour ceux qui ne peuvent pas agir. C’est de parler pour ceux qui ne peuvent pas parler.

La vocation de la France, c’est d’être au côté des peuples qui veulent être libres, c’est d’être au côté des Chrétiens d’Orient quand ils sont persécutés.

La vocation de la France, c’est d’organiser autour de la Méditerranée une communauté de destins. La France a lancé l’Union pour la Méditerranée. La France est intervenue pour protéger le peuple libyen du massacre. La France prendra des initiatives pour que la cause de la paix et de la justice triomphent enfin au Moyen-Orient.

La vocation de la France, c’est de porter au G20, qui n’existerait pas sans elle, la régulation de la mondialisation, la moralisation de la finance et la taxation des transactions financières pour dégager les ressources dont les pays pauvres ont besoin pour sortir de la misère.

La vocation de la France, c’est d’être le porte-parole de tous ceux qui dans le monde veulent que l’homme ne soit pas sacrifier au commerce, que le droit du travail, de la santé, de l’environnement soient mis à égalité avec le droit du commerce.

La vocation de la France, c’est d’être partout la voix de ceux qui réclament la justice, la liberté et le droit d’espérer dans un avenir meilleur.

Par delà les siècles la grande voix de Victor Hugo nous dicte le programme de l’avenir : « une liberté sans usurpations et sans violences, une égalité qui admettra la croissance naturelle de chacun, une fraternité d’hommes libres, l’application du principe qui veut que tout homme commence par le travail et finisse par la propriété, le respect de l’héritage qui n’est autre chose que la main du père tendue aux enfants à travers le mur du tombeau, l’ordre comme loi des citoyens, la paix comme loi des nations ».

Mes chers compatriotes,

Entendez mon appel !

La France de Victor Hugo et du général De Gaulle, la France qui regarde vers l’avenir, la France qui choisit le progrès, la France qui veut se mettre au service de toute l’humanité, cette France c’est la vôtre.

Prenez votre destin en main !

Levez- vous !

Prenez la parole !

Dîtes ce que vous avez dans le cœur.

Dîtes ce que vous voulez pour votre pays.

Dîtes le haut et fort.

Dîtes le maintenant !

Françaises, Français,

Depuis trente ans que je me suis engagé au service de notre pays, j’ai fait une longue route, celle là même qui m’a mené jusqu’à vous.

Jusqu’à la dernière minute de cette campagne j’irai à votre rencontre pour vous parler de la France.

Peuple de France.

Entend mon appel ! Françaises, Français, aidez-moi !

Vive la France !

Vive la République !