Histoire

L’Ésotérisme nazi : Wilhelm Landig et Thulé
S François

Nous nous intéresserons ici à un auteur autrichien, Wilhelm Landig (1909-1997), en particulier à son cycle thuléen composé des romans Götzen gegen Thule, Wolfszeit um Thule,et Rebellen für Thule. Cet ancien SS est devenu une figure importante de la contre-culture néonazie occidentale qui s’est développée dans les années 60/70. Le premier volume de ce cycle, Götzen gegen Thule, « Les Petits Dieux contre Thulé », traduit en français sous le titre Combat pour Thulé, fut publié en 1971. Depuis leur parution, ses livres furent traduits notamment en français, en anglais et en espagnol. De ce fait, Landig est un personnage clé dans cette subculture. Il doit être aussi perçu comme le pendant germanique des autres théoriciens de l’« occultisme nazi » tels que Miguel Serrano ou Savitri Devi, avec qui il fut en contact d’ailleurs. Au-delà de cet intérêt, ce cycle thuléen est important pour l’historien des idées : son contenu exprime une vision du monde construite et cohérente, ce que les anthropologues appellent une « cosmologie ».

Il doit aussi être analysé comme un vecteur de diffusion d’idées, ainsi qu’un moyen de banalisation de concepts dans des milieux qui lui sont éloignés politiquement : Götzen gegen Thule est un ouvrage ouvertement révisionniste qui attira les amateurs d’« histoire mystérieuse ». En effet, ce cycle romanesque se proposait d’enseigner, et d’expliciter, à un certain public la vision völkischdu monde, comme les mythes aryanistes et la politique de la Thulé arctique, auxquels Landig adjoint d’autres mythes modernes, comme les ovnis (construits ou non par l’homme), le Royaume souterrain, les Cathares et les Albigeois, le Saint-Graal, la survivance du nazisme, les maîtres himalayens et le complot international à la fois politique et occulte, etc., le tout baignant dans un antisémitisme et dans un négationnisme assumés.

Comme nous ne sommes pas germaniste, et que la traduction française laisse parfois à désirer, nous avons privilégié une étude politique, historique et culturelle de ce cycle littéraire. Nous nous attacherons donc à analyser ici les points suivants : 1/ le contexte historico-biographique de Landig ; 2/ le mythe hyperboréen ; 3/ les grands thèmes thuléens développés dans son œuvre ; enfin, 4/ l’importance et la diffusion de l’œuvre et thèses de Landig dans les milieux extrémistes de droite.

Wilhelm Landig naquit à Vienne en 1909. Il est mort dans cette ville en 1997, ville dans laquelle il exerça le métier de designer. Il fut très tôt un militant pangermaniste : il s’engagea en effet en 1918 dans les Corps-francs. Il fut ainsi membre du Freikorps Rossbach, puis du Deutsche Wehr. Cet engagement encra en lui un anticommunisme viscéral. Membre du parti nazi autrichien, il travailla à Berlin dans un institut universitaire du IIIe Reich l’année précédant l’Anschluss. Puis, il retourna à Vienne et travailla dans un service gouvernemental jusqu’en 1941. Durant la guerre, il servit dans la Waffen SS et se fit remarquer dans la lutte anticommuniste dans les Balkans : il participa en effet, entre 1942 et 1944, à la lutte contre les partisans. Pour cette raison, il fut médaillé par les autorités oustachies croates ainsi que par ses supérieurs allemands. Il retourna à Vienne en 1944. En 1945, il fut arrêté par les autorités britanniques d’occupation et fut interné jusqu’en 1947. Après cette date, il fut utilisé par les services secrets anglais dans la lutte anticommuniste. Par la suite, il retourna à la vie civile, mais il continuera de combattre le communisme. Ainsi, il devint en 1970 le représentant autrichien de la World Anti Communist League (Ligue mondiale anticommuniste), une structure fondée en 1967 pour lutter contre l’essor du communisme. Cette structure fut aussi connue pour avoir recyclé d’anciens nazis comme Otto Skornezy, ou des fascistes comme Horia Sima.

Au début des années 50, il créa avec un autre ancien SS, Rudolf Mund, un disciple de l’aryosophe autrichien Karl Maria Wiligut (le « Raspoutine de Himmler »), et avec un ingénieur Suisse passionné par les Ovnis, Erich Halik (de son vrai nom Claude Schweikhart), un groupe connu sous le nom de Cercle Landig (ou Groupe de Vienne ou Loge de Vienne). En fait, cette ville, haut-lieu de l’occultisme depuis le XIXe siècle, est importante dans le renouveau aryosophe de l’après Seconde guerre mondiale. Landig et son groupe y vulgarisèrent aussi les textes les plus occultistes de l’Ahnenerbe, l’institut de la SS. Ce groupe est connu en outre pour avoir élaboré une synthèse doctrinale entre le mysticisme völkisch, et les thèses de l’ésotérisme traditionaliste, en particulier les points concernant la tradition primordiale hyperboréenne : ce groupe soutint par exemple la thèse de l’origine polaire des Indo-Européens. Il fut enfin, le principal vulgarisateur de la mythologie aryosophique de Thulé dans les milieux de l’extrême droite néo- ou post- nazie.

Comme plusieurs personnes évoluant dans cette mouvance, Wilhelm Landig mélangeait fiction et éléments véridiques dans ses livres. N’oublions pas que le sous-titre de Combat pour Thulé est « un roman plein de réalités » (« Ein Roman voller Wirklichkeiten »). Landig y cite un grand nombre d’auteurs dont l’ésotériste Julius Evola, l’archéologue Hermann Wirth, le raciologue Arthur de Gobineau, le militant nationaliste indien Bâl Gangâdhar Tilak, le théoricien de l’âge de glace Hanns Hörbiger, le climatologue Alfred Wegener et l’écrivain, et ex SS, Otto Rahn, afin que le lecteur puisse vérifier par lui-même les propos développés dans le livre.

L’idée hyperboréenne, développée tout long de l’œuvre de Landig et qui sous-tend sa cosmologie, est la conséquence d’une interprétation d’un concept développé par le penseur ésotériste d’extrême droite, le baron italien Julius Evola. Celui-ci considérait que l’origine de la « Tradition primordiale », c’est-à-dire la connaissance métaphysique primordiale et supra humaine, était hyperboréenne. Dans son discours Hyperborée et Thulé se confondent, mais il est vrai qu’Evola fut influencé sur ce point par les penseurs völkisch qu’il fréquenta.

Les thèses hyperboréennes de Landig furent aussi très influencées par les spéculations d’Hermann Wirth, l’archéologue völkisch membre du parti nazi dès 1925 qui vit ses travaux condamnés par l’ensemble du monde universitaire. En 1935, Wirth fut nommé directeur de l’Ahnenerbe Institut du fait de sa proximité avec la SS. Il fut néanmoins rapidement écarté. Son départ fut motivé par une divergence profonde avec Himmler, malgré un soutien initialde ce dernier et de Darré.

Enfin, les postulats ésotérico-racistes de Landig furent tributaires d’un auteur autrichien, l’aryosophe Jörg Lanz von Liebenfels. Ancien cistercien, il se rapprocha des groupes antisémites autrichiens et se convertit au protestantisme. Sa conception du christianisme consistait en un dévoiement de la Bible au profit d’une vision obscène, raciste, darwiniste, manichéenne et gnostique : la théozoologie. Cette doctrine l’amena à considérer l’Aryen comme le garant de l’ordre du monde et de la connaissance et les autres races comme les agents du chaos.

Bref Landig essaya de transmettre ses idées au début des années 70, au moment où l’Occident s’est passionné pour les « Mystères nazis », pour reprendre l’expression de Nicholas Goodrick-Clarke, à la suite de la publication du Matin des magiciens, le best-seller de Jacques Bergier et Louis Pauwels. Ce livre contribua très largement à diffuser l’idée que les faits historiques pouvaient avoir d’autres interprétations que celle officiellement établie, et ce, notamment au sujet du IIIe Reich. De plus, ils y expliquaient que l’Histoire réelle de l’humanité est cachée et la meilleure forme d’organisation de la science est sans doute la société secrète.

Ces « mystères nazis » ont, pour origine, selon ces deux auteurs, le fait que le national-socialisme, par son irrationalisme affiché et bruyant, s’est largement différencié dans ses concepts et principes de ceux de la civilisation occidentale. De fait, c’est indubitablement Le Matin des magiciens qui popularisa les « mystères nazis », qui occupent une grande part de ce livre. Selon Pauwels et Bergier, les nazis étaient persuadés qu’il existait « une science secrète primordiale aux « intonations » magiques, mais surtout que cette dernière, de nature aryenne, s’opposait à la science « judéo-libérale » ». Cette science « nordique » est, selon Pauwels et Bergier,« un ésotérisme qui prendrait sa source dans tout ce qui constitue le fond de l’ésotérisme ». Pour eux, la spéculation ésotérique nazie « s’est inscrite dans les faits. Elle a agi sur les événements. Il semble que ces événements ne deviennent vraiment compréhensibles que sous cet éclairage. Ils restent horribles, mais éclairés de la sorte, ils deviennent autre chose que des douleurs infligées aux hommes par des fous et des méchants, ils donnent à l’histoire une certaine amplitude, ils rétablissent celle-ci au niveau où elle cesse d’être absurde et mérite d’être vécue, même dans la souffrance : le niveau spirituel. Ce que nous voulons faire comprendre, c’est qu’une civilisation entièrement différente de la nôtre est apparue en Allemagne et s’est maintenue pendant quelques années. Qu’une civilisation aussi profondément étrangère ait pu s’établir en un rien de temps n’est pas, à y regarder, impensable… »1. Cette idée fut reprise par Landig afin de diffuser ses propres thèses.

En outre, à partir des années 1960, les thèmes véhiculés par cette littérature occultisante, née du succès éditorial du Matin des magiciens, vont se diffuser dans la culture populaire, aidés par un phénomène des plus intéressants : la « mythologisation » des principaux responsables nazis, reconstruction qui se fait au détriment de la réalité historique. Les sociétés européennes, et plus globalement occidentales, voient leur conception et leur perception du nazisme être modifiées par une série d’évolutions, liées au contexte politico-économique de récession dans les sociétés occidentales. Combat pour Thulé rencontra alors un public éloigné des préoccupations idéologiques qui y sont développées mais attiré par des constructions politico-spirituelles de type ésotérique également présentes. Cette rencontre se fit d’autant plus facilement que cette époque cherchait à comprendre le nazisme, ses succès militaires fulgurants, sa politique d’extermination et son irrationalisme. Enfin, il y a une stratégie éditoriale délibérée : à cette époque, le moindre livre écrit par un inconnu sur le thème de l’« histoire mystérieuse », et notamment sur les « aspects ésotériques » du nazisme, tirait à cinquante mille exemplaires et ce jusqu’à la fin de cette décennie.

Wilhelm Landig développa différents thèmes dans son cycle thuléen, mêlant uchronie, ésotérisme, thèses racistes et anticipation. Dans Combat pour Thulé, il soutint que des groupes de SS survirent à la défaite du nazisme et à la mort d’Adolf Hitler, et reprit certaines idées développées par Jacques Bergier et Louis Pauwels dans le Matin des Magiciens. Combat pour Thulé raconte en effet l’histoire de deux aviateurs allemands dont l’avion s’est écrasé en Arctique. Là, ils sont secourus par un officier SS, Gutmann (« l’homme bon »), qui devient leur guide. Après avoir été initiés aux secrets de Thulé et avoir pris conscience de la nécessité du combat occulte contre Israël, justifiant ainsi l’antisémitisme, les deux aviateurs vont parcourir le monde dans le but d’unifier différents groupes thuléens, c’est-à-dire néonazis, dont les idéaux sont en accord avec ceux des nazis réfugiés en Antarctique. Combat pour Thulé est de fait un énorme travail de révisionnisme ainsi qu’une reprise de la philosophie antimoderne d’Evola. En adaptant ces thèses en roman, Landig échappa à la législation sur les textes racistes. En effet, ce livre est un manifeste ouvertement révisionniste et antisémite : les personnages principaux, les héros du roman, participent au combat des derniers SS contre l’empire « judéo-américain ». Cette forme romanesque permit à Landig de toucher d’autres segments de la population, lui offrant la possibilité d’enseigner à son public les points suivants :

1/les mythes et la politique de la Thulé arctique ;

2/les Ovnis (alors à la mode) ;

3/les thématiques provenant du Matin des magiciens (l’Aggartha, les maîtres himalayens et la politique occulte, etc.) ;

4/les livres du SS Otto Rahn (en particulier, les liens entre catharisme et le Graal) ;

5/la littérature conspirationniste d’extrême droite sur le complot international de forces occultes (forcément juives…), etc.

Ce roman se place aussi dans la continuité des livres des néonazis et écrivains Miguel Serrano et Savitri Devi, qui commencent à publier à la même époque. L’idée d’une survivance secrète du nazisme se retrouva fréquemment dans la littérature néonazie de l’immédiat après-guerre, chez Saint-Loup ou Ladislas Szabo par exemple. Ces réfugiés SS se seraient appuyés sur les ultimes découvertes des scientifiques nazis de Peenemünde, qui auraient conçu le V7, sous forme de soucoupe volante, qui serait apparu ainsi, ici ou là, dans les ciels de la planète après la guerre…

Le deuxième volume (Wolfszeit um Thule, en français Le Temps des loups), paru en 1980, reprit la même trame et la même période chronologique, mais l’auteur y rajouta le combat anticommuniste et surtout insista sur le combat contre le christianisme et le judaïsme (les « petits dieux » du titre original du premier livre) : il insista fortement sur le combat à mort entre « l’étoile de David » et « Thulé ». Nous voyons donc un entrelacement entre les thématiques développées par le roman et la vie de l’auteur : il ne faut pas oublier qu’à la même époque, il s’impliqua dans l’action de la World AntiCommunist League (WACL), une structure qui recycla un nombre non négligeable d’anciens nazis, en particulier d’ex SS. À l’instar du livre précédent, Landig mélangea allègrement dans ce volume trame romanesque et digressions idéologiques portant à la fois sur l’intérêt de l’ésotérisme thuléen, sur la nécessité de combattre le « judaïsme mondial » et sur celle de combattre le péril communiste, par la création d’internationales anticommunistes. Nous retrouvons donc dans ce livre la défense du combat nazi contre le « judéo-blochevisme » dans lequel il excella pendant la guerre.

Le dernier volume (Rebellen für Thule, Rebelles de Thulé en français) fut publié en 1991. Contrairement aux précédents, il s’agit plus ici d’un testament politique romancé que d’un roman. En effet, l’histoire se déroule en République Fédérale Allemande, en 1979. Des élèves se rebellent contre l’enseignement de l’« histoire officielle ». Progressivement, ils prennent conscience de la véritable histoire et de l’enjeu de la « métaphysique thuléenne » et de l’antisémitisme. Ils seront aidés dans leur quête par un enseignant en histoire, qui lui-même est épaulé par certains de ses amis, d’anciens de la SS, tel l’ex-major Eyken. Dès ce moment, ces élèves, les Rebelles de Thulé du titre, adhèrent à la vision du monde de Landig, des aryosophes et de l’Ahnenerbe et combattent le rôle des sociétés secrètes capitalistes dirigées, évidemment par l’empire judéo-américain. L’objectif de Landig était limpide : il souhaitait transmettre ses idéaux, via les nombreuses « conférences », en fait les digressions de l’auteur, retranscrites dans le livre. En effet, il n’y a pas dans ce livre de V7, ni d’aventures picaresques. Il s’agit plutôt d’une sorte de bréviaire alternatif d’extrême droite.

Dans les années 1980, Wilhelm Landig fut en contact avec ce que nous pouvons appeler des « Lunatic Fringes », c’est-à-dire des néonazis excentriques et passablement illuminés. Il entretint aussi des relations avec des militants néonazis « classiques » si nous pouvons utiliser cette expression. En effet, durant cette décennie, Landig devint une figure importante de jeunes générations du néonazisme. Il devint une référence intellectuelle dans ses milieux, auréolé de son passé de combattant Waffen SS. De ce fait, ses livres furent traduits de par le monde par des militants n’ayant pas connu le Troisième Reich, montrant implicitement à la fois l’intérêt pour ces question de la part de jeunes néonazis et leur absence de culture historique, le nazisme de Landig n’ayant rien à voir avec la réalité.

Au-delà de ces milieux, les thèses de Landig intéressèrent tout un monde évoluant aux marges du New Age et de l’extrême droite la plus radicale. Il intéressa aussi des personnes éloignées de ces milieux. Cette contamination peut s’expliquer par l’intérêt dans ces milieux pour l’« Histoire secrète », c’est-à-dire pour une interprétation alternative de l’histoire à forte tendance complotiste, en particulier en ce qui concerne le nazisme. Parmi ces personnes évoluant à la fois aux marges du New Age et de l’extrême droite hétérodoxe, nous pouvons citer Jan van Helsing (pseudonyme de Jan Udo Holey). Landig fait partie des références explicites du Livre Jaune n°5, un livre à la fois négationniste et thématiquement proche du New Age, « best seller » dans ce milieu. Van Helsing cite d’ailleurs l’ex-SS. De fait, Jan van Helsing recycla son tour toute une thématique néonazie dans des textes à connotation New Age.

L’influence de Landig se ressent dans la succession thématique de ce livre, qui traite à la fois du New Age, de l’ufologie nazie, du conspirationnisme anti-judéo-maçonnique, de l’aryosophie, etc. Mais surtout, ce qui sous-tend le livre de van Helsing est une volonté de réécrire l’histoire d’une façon idéologiquement très orientée. À l’instar de son prédécesseur, Jan van Helsing fit l’éloge des extraordinaires capacités de la « science nazie ». D’ailleurs, il reconnut qu’il « éprouve un plaisir tout particulier à [vous] dévoiler ce thème », car il permet de constater « quels sont les milieux influents non allemands qui tiennent à cacher la vérité aux Allemands »2. Enfin, le livre de van Helsing est à la fois une apologie détournée du nazisme et l’expression d’un révisionnisme historique éhonté. En effet, le révisionnisme de van Helsing s’accompagne sans surprise d’un antisémitisme virulent : celui-ci cita d’ailleurs dans le Livre Jaune n°5 les fameux faux antisémites, les Protocoles des Sages de Sion, qui seraient selon lui la clef de l’histoire secrète.

Enfin, selon Nicholas Goodrick-Clarke, Landig est à l’origine de la diffusion, dans les milieux néonazis, du symbole du « Soleil noir », un symbole tiré d’une mosaïque du château de Wewelsburg, l’un des châteaux de la SS. Il devint un symbole-clé dans les milieux des jeunes néonazis allemands et autrichiens des années 90. Il fut aussi repris par le groupuscule identitaire Thule Seminar, fondé et dirigé par Pierre Krebs, un ex membre de la Nouvelle Droite. Au-delà de cela, comme nous l’avons dit ci-dessus, les thèses de Wilhelm Landig furent reprises par différents groupuscules parmi les plus radicaux de l’extrême droite, comme les français de Terre et Peuple et de Réfléchir & Agir, qui évoluent tous deux dans la frange völkisch de la mouvance identitaire. Les éditions Auda Isarn, qui ont publié en français ces livres de Landig, sont d’ailleurs une émanation de l’équipe de Réfléchir & Agir.

Wilhelm Landig est donc une référence importante de la mouvance néonazie, comme nous l’avons montré dans ce texte. Si son groupe et lui-même sont restés confidentiels durant les années 1950 et 1960, le succès éditorial des « mystères nazis » leur ont donné une opportunité de s’exprimer et de diffuser leurs idées. Celles-ci se diffusèrent largement au-delà des milieux néonazis pour contaminer certaines franges de la nébuleuse du New Age, voire certains aspects de la culture populaire comme la bande dessinée. Concernant ce dernier point, il faut reconnaître que les postulats de Landig offrent d’intéressants scénarii. Un bon exemple est D-Day, le jour du désastre, une bande dessinée américaine. Nous trouvons aussi des éléments de cette mythologie dans La malédiction des trente deniers, une aventure de Black et Mortimer. Toutefois, il ne faut pas oublier que le cycle thuléen de cet auteur est un système mythologique très construit qui véhicule un antisémitisme et un négationnisme radical s’exprimant au grand jour. Cette radicalité a aussi fait qu’il est encore très lu et traduit par les milieux extrémistes de droite.
Notes

1 Jacques Bergier et Louis Pauwels, Le Matin des magiciens, Paris, Folio, pp. 387-388.

2 Jan Van Helsing, Le Livre jaune n°5, Tourettes sur Loup, Éditions Félix, 2001, p. 154