L'homme : un être de la négation
Je pose en principe un fait peu contestable: que l'homme
est l'animal qui n'accepte pas simplement le donné naturel, qui le nie. Il
change ainsi le monde extérieur naturel, il en tire des outils et des objets
fabriqués qui composent un monde nouveau, le monde humain. L'homme
parallèlement se nie lui-même, il s'éduque, il refuse par exemple de donner
à la satisfaction de ses besoins animaux ce cours libre, auquel l'animal
n'apporte pas de réserve. Il est nécessaire encore d'accorder que les deux
négations que, d'une part, l'homme fait du monde donné et, d'autre part, de
sa propre animalité, sont liées. Il ne nous appartient pas de donner une
priorité à l'une ou à l'autre, de chercher si l'éducation (qui apparaît sous
la forme des interdits religieux) est la conséquence du travail, ou le
travail la conséquence d'une mutation morale. Mais en tant qu'il y a homme,
il y a d'une part travail et de l'autre négation par interdits de
l'animalité de l'homme."