Çà y est! Le grand combat a commencé. Après la trêve des fêtes, le grand carnaval redémarre avec son cortège de mots, de photos, d'allusions et d'illusions.

Chacun épie l'autre en quête d'une (mauvaise) querelle et derechef l'impression que le débat n'aura pas lieu faute de s'engager sur le fond, de le pouvoir laisser transparaître ou même de le vouloir.

En 2002 dominait l'impression qu'entre le programme de Chirac et celui de Jospin il n'était nulle différence ; aujourd'hui on veut nous faire croire qu'il n'en est qu'un, celui de Sarkozy.

Remarquons que les commentaires de la presse ne portent pas sur les programmes; uniquement sur les postures! Les références à l'histoire!

Ce qui néanmoins, donne le la de la semaine, c'est bien le procès en incompétence qui se poursuit à l'encontre de S Royal!

La compétence, étymologiquement, renvoie à un juste rapport, une symétrie voire une coïncidence. La compétence est une convenance désignant soit une recherche commune, soit un accord entre un individu et une chose. Celui qui est compétent c'est celui qui est approprié, qui convient à la position ou charge qu'il occupe ou sollicite.

Qu'on prenne le sens usuel, par quoi l'incompétent est un incapable, ou que l'on envisage ce que l'étymologie suggère (la convenance) en tout état de cause ce procès est odieux parce qu'ad hominem!

Sans doute S Royal, de vouloir attendre les synthèses résultant du débat participatif, est-elle en partie responsable: nous avons déjà souligné combien ses discours étaient plus incantatoires que programmatiques. Condamnée à attendre la mi-février pour délivrer son programme, ou désirant le faire car il peut s'agir ici aussi d'une stratégie de campagne, elle ne peut -ne veut - que dessiner des orientations si générales qu'elles ne signifient pas grand chose! Sans conteste cette manière de mener campagne dérange son propre camp et il n'est pas tout à fait faux que les coups bas pleuvent de tout côté, y compris du sien!

Trois manières de lire cette phase

Stratégique

Voulant éviter une campagne de toutes manières trop longue, le débat participatif li permet de reporter au plus loin possible le moment où tout se jouera! De Gaulle n'avait annoncé sa candidature qu'en novembre 65, deux mois avant le second tour! Mitterrand lui aussi tenta d'écouter la campagne. Tout le monde peut en comprendre les raisons. La leçon à tirer des précédents scrutins: rien ne se joue jamais avant février! C'est à ce moment que la campagne prend tournure. Rétrospectivement, c'est toujours à partir de là, que l'on observe le décrochage de l'un par rapport à l'autre! Mais rétrospectivement! Il est bien trop tôt aujourd'hui pour deviner si la baisse de S Royal est un trou d'air, ou le début de la fin! Son décrochage peut n'être que transitoire après l'intronisation grand spectacle de son adversaire; il est le prix à payer de cette phase transitoire! Toute la question est de savoir si d'ici un mois, elle pourra rebondir. On entendra alors des je vous l'avais bien dit si elle chute, des bien joué si elle remonte dans les sondages.

Comme toute habileté, celle-ci ne va pas sans risque!

Médiatique

A bien y regarder, les médias jouent un rôle bien trouble. En réalité, ils pratiquent l'autocélébration. Cessant depuis belle lurette d'être un simple intermédiaire, ils sont véritablement acteurs de la campagne. En quête de spectaculaire, d'événement, les médias n'ont d'autre ressource que d'en créer, ou d'amplifier le trivial, pour nourrir la chronique. D'où cette profusion de bourdes, de mini événements.

Sur le Québec, sur les sous-marins, le faux coup de téléphone de Dahan etc... Mais aussi l'intervention des RG dans la campagne ....

Quand un journaliste interroge la candidate sur le nombre de sous-marins nucléaires, il sort de son rôle! Il fait sortir la candidate de son rôle! Ce n'est pas au médias de qualifier ou de disqualifier, que je sache! A ce jeu-là, d'ailleurs S Royal aura vite fait - et sans doute vite gagné - de reprendre la posture de la victime émissaire!

Les médias semblent délibérément vouloir jouer le rôle de témoin à charge, cessant par là d'être impartiaux, en voulant ainsi intenter un procès en incompétence; en s'émerveillant faussement naïfs, d'un sondage révélant que les français trouveraient S Royal moins solide que Sarkozy, quand depuis plusieurs semaines, ils n'évoquent que ceci!

Politique

Ce qui se joue, ou révèle ici, c'est bien la conception même de la vie politique et l'idée que l'on se fait d'un Président. Le registre de la compétence n'est jamais anodin et il renvoie plus à la technocratie qu'à la démocratie. Toute la question est de savoir si l'on attend d'une élection un projet, une dynamique nouvelle, des orientations ou au contraire un homme providentiel, un thaumaturge, sachant tout, sachant tout faire.

C'est oublier un peu vite que le pouvoir est affaire collective dans nos états complexes; que nos dirigeants sont entourés de conseillers! c'est oublier surtout que la démocratie se doit toujours ne bien distinguer entre le  registre politique ( qui est le domaine de la loi) et le registre administratif, technique ( qui est le domaine du règlement)

Quand S Royal déclare vouloir inventer une nouvelle façon de faire de la politique, elle avoue effectivement ce qui fait le fond de sa démarche.

On peut toujours imaginer que le participatif est de l'ordre du gadget. Mais à remettre ainsi en cause la sincérité de l'impétrant, on n'a pas grand chose à gagner. Mais alors il faudrait tout aussi bien soupçonner celui qui déclare avoir changé!

Si tel n'était pas le cas, et qu'effectivement la démarche participative fût une démarche nouvelle tentant de réconcilier la nation avec la politique en lui redonnant la parole, alors  délibérément le reproche d'incompétence est malhonnête. Ce qui fait l'essence de la démocratie, c'est la parole du citoyen, qu'il tient de sa liberté même et non de sa supposée compétence! Si ne devaient voter que les citoyens compétents, peu voteraient! De la même manière, ce qui fait la légitimité d'un projet c'est sa double conformité avec les aspirations de la nation et les droits fondamentaux reconnus par cette dernière. (revoir )

Au bilan

Se poser néanmoins la question de cet acharnement à soupçonner l'incompétence chez Royal. Serait-ce qu'on estimât illégitime sa position de candidate? Souvenons-nous qu'après l'arrivée de la gauche en 81, on parlait d'expérience socialiste à droite, comme si la présence de la gauche au pouvoir ne pouvait durer plus que quelques instants et s'achever en catastrophe, comme si la droite avait été indûment dépossédée de sa légitime fonction.

Se poserait-on cette question si le candidat était un homme?

Oserait-on poser à un homme la question du nombre de sous-marin, comme pour vérifier ses connaissances ou le condamner à un quiz d'un quelconque Questions pour un champion ?

Oserait-on, même par humour, piéger un candidat avec un coup de téléphone d'imitateur?

Je me souviens de l'acharnement soigneusement orchestré contre la seule femme Premier Ministre! Je le retrouve ici!

 

Il n'en reste pas moins, Mme Royal, qu'il est grand temps que vous en veniez à l'essentiel! Il n'en reste pas moins que les coups portés sont odieux!

Il faut être bien courageux, inconscient, ou mégalomane pour se vouloir hisser à ces cimes-là!

 

 1 Lellouche inquiet de "l'incompétence" de Royal sur la défense
 AFP 28.01.07 | 11h16
Le député Pierre Lellouche, délégué à la défense de l'UMP et proche de Nicolas Sarkozy, a dénoncé dimanche comme "franchement inquiétantes" les "approximations" et "l'incompétence évidente" de la candidate socialiste Ségolène Royal sur la défense et la diplomatie. "Nous sommes dans un monde qui est beaucoup plus chaotique, beaucoup plus dangereux que par le passé, et donc cette incompétence évidente, cette méconnaissance des dossiers, ces approximations, je les trouve franchement inquiétantes", a-t-il déclaré sur France Inter. "Le président de la République en France est le patron de la politique étrangère, il a le domaine réservé, il doit montrer une capacité à gérer les affaires du monde, et il est le patron des armées", a-t-il ajouté. "Il ne s'agit pas d'une élection cantonale partielle en Poitou-Charentes", a-t-il ironisé, dans une allusion aux fonctions de présidente de la région Poitou-Charentes de Mme Royal. "Ne pas savoir de quoi est composée notre force de frappe alors même qu'on a été membre d'un gouvernement pendant des années (...), ne pas savoir qu'on a quatre sous-marins, ne pas savoir qu'il y a une composante aérienne, ne pas savoir qu'il y a une composante nucléaire aussi à bord du porte-avions, tout cela est quand même problématique", a déclaré M. Lellouche. Interrogée jeudi sur le nombre de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins français, Mme Royal avait répondu "un", alors que la France dispose de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE), porteurs de missiles nucléaires, et de six sous-marins nucléaires d'attaque (SNA). M. Lellouche a cité aussi les voyages de Mme Royal au Proche-Orient et en Chine où, dans ce dernier pays, "elle n'est reçue par personne et s'en tire avec un néologisme et puis ensuite un compliment invraisemblable à la justice chinoise".