Application stricte de l'adage au premier tour on choisit, au second, on élimine Onfray prend acte de l'impossible candidature d'union de la gauche antilibérale. Ne resterait plus qu'à éliminer (être de gauche, malgré tout) ou s'abstenir. Bien trop tard pour se désespérer! trop tôt pour refonder! Mais j'observe cette propension des acteurs à se penser toujours à la croisée qui ne laisserait d'autre alternative qu'entre la décadence et le renouveau; l'acte fondateur ou le délitement. Comme si nous étions à la croisée, au moment crucial. Vient le temps de la croisade! parce que les temps changent trop vite pour nos pensées si lentes à mouvoir; que la menace fût impérieuse, ou que l'occasion serait à saisir qui ne se renouvellera point? Alors oui, les guides se lèvent et parlent en vérité! Conviction: certitude appuyée sur des preuves; opinion considérée comme fondamentale, qui entraîne enthousiasme et chaleur. Ce que dit Onfray, ou ce qu'il ne dit pas, mais crisse tellement sous ses mots qu'on l'entend clairement, c'est l'actuelle inexistence d'une pensée politique alternative. Ce que trahit, du reste, le concept, négatif, d'anti-libéralisme. Je ne crois pas qu'il faille fustiger les querelles de personnes : elles ne sont que le tableau explicite d'une pensée encore incertaine d'elle-même. Qui n'est encore qu'un ob-jet; pas un pro-jet! Ce que regrette Onfray, c'est l'étiolement du politique: en réalité ce n'est pas de désir d'avenir dont il faudrait parler mais de désir politique! Ce n'est pas de désir seulement dont nous avons besoin mais d'une pensée, d'une théorie! 2 Ce dont nous avons besoin, ce n'est justement pas de silence ou de retrait mais d'une pensée qui fonctionne, s'insurge, clame mais mette les mains dans le cambouis. Messieurs les intellectuels, où êtes-vous? Nous avons besoin de vous! Seule une démarche rigoureuse nous épargnera les éclaboussures de la sottise ou les exhortations moralistes! On vous attend! |
1)Entretien avec Michel Onfray Le Monde, 29 déc 06 2 ) C’est ça, une théorie,
c’est exactement comme une boîte à outils. Il faut que ça serve, il faut que
ça fonctionne. Et pas pour soi-même. S’il n’y a pas des gens pour s’en
servir, à commencer par le théoricien lui-même qui cesse alors d’être
théoricien, c’est qu’elle ne vaut rien ou que le moment n’est pas venu. On
ne revient pas sur une théorie, on en fait d’autres, on en a d’autres à
faire. C’est curieux que ce soit un auteur qui passe pour un pur
intellectuel, Proust, qui l’ait dit si clairement : traitez mon livre comme
une paire de lunettes dirigées sur le dehors, eh bien, si elles ne vous vont
pas, prenez-en d’autres, trouvez vous-même votre appareil qui est forcément
un appareil de combat. 3) Que font les penseurs
de métier au milieu de ces ébranlements ? Ils gardent encore leur silence.
Ils n’avertissent pas. Ils ne dénoncent pas. Ils ne sont pas transformés.
Ils ne sont pas retournés. L’écart entre leur pensée et l’univers en proie
aux catastrophes grandit chaque semaine, chaque jour, et ils ne sont pas
alertés. Et ils n’alertent pas. L’écart entre leurs promesses et la
situation des hommes est plus scandaleux qu’il ne fut jamais. Et ils ne
bougent point. Ils restent du même côté de la barricade. Ils tiennent les
mêmes assemblées, publient les mêmes livres. Tous ceux qui avaient la
simplicité d’attendre leurs paroles commencent à se révolter, ou à rire.
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