Justification des lois

Remonter Etat de nature Souveraineté abandonnée Justification des lois

Spinoza

“Si les hommes étaient ainsi disposés par la Nature qu'ils n'eussent de désir que pour ce qu'enseigne la vraie Raison, certes, la société n'aurait besoin d'aucune lois, il suffirait absolument d'éclairer les hommes par des enseignements moraux pour qu'ils fissent d'eux-mêmes et d'une âme libérale ce qui est vraiment utile. Mais tout autre est la disposition de la nature humaine; tous observent bien leur intérêt, mais ce n'est pas suivant l'enseignement de la droite Raison; c'est le plus souvent entraînés par leur seul appétit de plaisir et les passions de l'âme (qui n'ont aucun égard à l'avenir et ne tiennent compte que d'elles-mêmes qu'ils désirent quelque objet et le jugent utile. De là vient que nulle société ne peut subsister sans un pouvoir de commandement et une force, et conséquemment sans des lois qui modèrent et contraignent l'appétit du plaisir et des passions sans frein.”

 

“Il est rare que les hommes vivent sous la conduite de la Raison ; mais c'est ainsi : la plupart se jalousent et sont insupportables les uns aux autres. Néanmoins ils ne peuvent guère mener une vie solitaire, de sorte que la plupart se plaisent à la définition que l'homme est un animal politique ; et, de fait, les choses sont telles que, de la société commune des hommes, on peut tirer beaucoup plus d'avantages que d'inconvénients. Que les Satiriques rient donc autant qu'ils veulent des choses humaines, ... et que les Mélancoliques louent, tant qu'ils peuvent, la vie inculte et sauvage, qu'ils méprisent les hommes et admirent les bêtes ; les hommes n'en feront pas moins l'expérience qu'ils peuvent beaucoup plus aisément se procurer par un mutuel secours ce dont ils ont besoin, et qu'ils ne peuvent éviter que par l'union de leurs forces les dangers qui les menacent de partout ; pour ne pas dire d'ailleurs qu'il est de beaucoup préférable, et plus digne de notre connaissance, de considérer les actions des hommes que celles des bêtes.”