Paul Ricoeur Philosophie de la volonté, Paris, Aubier-Montaigne, 1960, p. 12.
On entendra ici
par mythe ce que l'histoire des religions y discerne aujourd'hui : non point
une fausse explication par le moyen d'images et de fables, mais un récit
traditionnel, portant sur des événements arrivés à l'origine des temps et
destiné à fonder l'action rituelle des hommes d'aujourd'hui et de manière
générale à instituer toutes les formes d'action et de pensée par lesquelles
l'homme se comprend lui-même dans son monde. Pour nous, modernes, le mythe
est seulement mythe parce que nous ne pouvons plus relier ce temps à celui
de l'histoire telle que nous l'écrivons selon la méthode critique, ni non
plus rattacher les lieux du mythe à l'espace de notre géographie : c'est
pourquoi le mythe ne peut plus être explication ; exclure son intention
étiologique, c'est le thème de toute nécessaire démythologisation.
Mais en perdant ses prétentions explicatives le mythe révèle sa portée
exploratoire et compréhensive, ce que nous appellerons plus loin sa fonction
symbolique, c'est-à-dire son pouvoir de découvrir, de dévoiler le lien de
l'homme à son sacré. Aussi paradoxal qu'il paraisse, le mythe, ainsi
démythologisé au contact de l'histoire scientifique et élevé à la dignité de
symbole, est une dimension de la pensée moderne.
Titre 2